Publié le 19 Jun 2015 - 00:04
CHEF TACTICIEN DU PDS

Les nouveaux habits de Karim Wade

 

lundi 15 juin, un groupe de responsables du Pds, tous estampillés proches de « la refondation » conduite par Modou Diagne Fada. Lors de leur face-à-face avec le candidat du Pds à la prochaine présidentielle, le maire de Bignona Mamadou Lamine Keïta, Abdou Khafor Touré et Abdoulaye Sow de la Fncl ont découvert que le célèbre détenu est plus que jamais déterminé à se battre pour tirer profit de son séjour carcéral et confirmer sa légitimité. Loin de se morfondre sur son sort, il pèse de plus en plus sur l’orientation de la formation libérale. Il va au-delà de son dossier judiciaire et pense maintenant « politique ».

D’emblée, il faut souligner que c’est Me Seydou Diagne, l’un des avocats de Karim Wade, qui s’est chargé de l’organisation de la rencontre en tant que facilitateur. La visite était d’abord prévue le jeudi précédent, puis le vendredi, avant que des autorisations spéciales de visite ne soient délivrées pour le lundi suivant. Ensuite, seulement Abdou Khafor Touré et Abdoulaye Sow devaient échanger avec l’ancien tout-puissant ministre d’Etat. Les reports de la rencontre ont notamment permis à Mamadou Lamine Keïta d’étoffer le groupe.

S’il est constant que les demandes de réformes, de refondation et de renouvellements des instances du Pds posées par les « frondeurs » sont partagées par Karim Wade, il n’en demeure pas moins qu’à l’instar de son père, il n’a pas apprécié « la médiatisation » de l’affaire. Le candidat du Pds, selon nos sources, a expliqué à ses interlocuteurs que lui-même s’est fait à l’idée de ces « nécessaires » réformes depuis 2012 et leur perte du pouvoir. Mieux, Karim Wade a longuement plaidé pour les retrouvailles des responsables du Pds qui ont fait scission pour voler de leurs propres ailes, en citant l’ancien Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye et l’ancien maire de Dakar et fondateur de « Bokk Gis-Gis », Pape Diop.

En clair, il entend donner l’image du rassembleur, conscient qu’il est que sa personne est la cause même de la plupart des contradictions qui minent le Pds depuis des années. S’il apprécie le fait que tous s’accordent sur la pertinence de sa candidature à la prochaine présidentielle, il n’est guère rassuré par l’intransigeance du président du groupe libéral à l’Assemblée nationale, Modou Diagne Fada, qui ne s’est pas démonté quand il s’est agi de faire face au président Wade pour lui dire ce que beaucoup pensent tout bas. Sur le cas du président du conseil départemental de Kébémer, Karim Wade paraît circonspect. Il a rapporté à ses interlocuteurs sa préférence de voir Modou Diagne Fada venir lui parler « de vive voix » des problèmes du Pds, avec une appréciation mitigée de la méthode de Fada et sa suspicion à propos de probables intentions cachées.

D’ailleurs, il semble que la crise qui couve au Pds, avec les premières convocations de signataires du mémorandum du 1er juin devant la commission de discipline du Pds, a été ramenée dans des proportions plus raisonnables depuis la prison de Rebeuss. En effet, en installant un « shadow cabinet » à la manière de l’opposition dans les démocraties anglo-saxonnes, en y nommant à des postes avec des attributions bien délimitées les responsables les plus en vue du parti, dans un savant dosage entre « légitimistes » et « frondeurs », le secrétaire général national Me Abdoulaye Wade a penché pour les propositions émanant de son fils.

En freinant l’ardeur des « faucons, qui demandent l’exclusion de Modou Diagne Fada et celle de ses amis, et en se posant comme favorable à l’unité et au rassemblement, Karim Wade fait montre d’une sagesse politique que peu lui connaissaient jusque-là. 

Les deux termes de l’alternative qui se posent aux dirigeants du Pds dans la gestion de cette crise (exclusion ou accès à la demande des signataires du mémorandum) n’étaient pas simples. Ou les rangs se dégarnissent avec le départ de franges exclues par la commission de discipline ; ou alors l’état-major autour du vieux chef revoit ses plans et accepte de lancer une opération de refondation du parti, avec les risques de voir Modou Diagne Fada en sortir grandi.

Les événements des derniers jours ont montré que, depuis la maison d’arrêt de Rebeuss, Karim Wade tire les ficelles au Pds et réussit à faire passer ses mots d’ordre auprès des militants. Mue à point nommé. Mais le temps de la Justice n'est pas le temps électoral... 

 

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