Publié le 14 Aug 2012 - 20:30
UN SOURD-MUET MEURT EN PRISON

Des relents de bavure

 

Un sourd-muet âgé de 35 ans est décédé ce week-end entre les mains des gendarmes de la brigade de Kédougou. Sa mort a entraîné une violente réaction de la population qui a manifesté sa colère devant les locaux des pandores. Des échauffourées ont fait une victime et suscité la réaction du ministre de l’Intérieur.

 

 

Cela a tout l'air d'une nouvelle bavure. Kékouta Sidibé, un sourd-muet âgé de 35 ans, a trouvé la mort dans les locaux de la brigade de Kédougou, dans la nuit de dimanche à lundi. Il était marié et père de deux enfants. Le défunt, Balla Sidibé et Bamboudou Mady avaient été arrêtés en train de fumer du chanvre indien. Au cours de cette interpellation, Kékouta Sidibé qui est karatéka a opposé une farouche résistance aux pandores qui ont finalement réussi à le maîtriser et à le mettre dans le panier à salade, après l'avoir ligoté et traîné sur 30 mètres, selon des témoins.

 

 

Apparemment, les sévices se sont poursuivis jusque dans les locaux de la gendarmerie car, lorsque ses parents sont venus lui apporter à manger en prison, ils se sont retrouvés avec un cadavre. ''Il y a de très fortes présomptions de torture, de traitements cruels inhumains et dégradants'', a souligné Alioune Tine, président de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (RADDHO) au téléphone d'EnQuête. ''Il est mort depuis le week-end, les gendarmes avaient de la peine à le dire à la famille'', s'est désolé Alioune Tine. Selon lui, ''c'est d'autant plus dramatique que le gars est un handicapé, c'est un sourd-muet''. Le trio est accusé de vente et d’usage de chanvre indien.

 

Dès l'annonce de cette énième bavure des forces de l'ordre, les populations de Kédougou se sont retrouvées devant la brigade de gendarmerie de Kédougou pour manifester leur colère. Aux jets de pierres des manifestants ont répondu les grenades lacrymogènes des gendarmes. Au cours de ces échanges, une personne a été grièvement blessée par des éclats de grenades lacrymogènes, rapporte le correspondant de l'Agence de presse sénégalaise. Le blessé a été acheminé au centre de santé de la ville par les manifestants.

 

Cette tension a fait réagir les autorités, en la personne du ministre de l'Intérieur Mbaye Ndiaye. Dans une adresse solennelle, le ministre a invité les populations de Kédougou à faire confiance à la justice. Avant de prendre l'engagement qu'une enquête sera diligentée pour élucider les circonstances de cette mort tragique et punir les coupables.

 

Pour leur part, les organisations de droits de l'Homme demandent que justice soit faite. ''La torture est un crime odieux, international et imprescriptible, selon la convention contre la torture. Un tortionnaire peut être jugé dans tous les pays qui ont ratifié la convention contre la torture'', s'est insurgé Alioune Tine qui invite à pousser plus loin les frontières de l'impunité. Dans ce sens, il a salué les efforts faits par la gendarmerie. Dans la mesure où ''des gendarmes ont été arrêtés et punis''. ''Nous attendons que la justice intervienne de façon prompte'', a toutefois poursuivi le président de la Raddho pour qui la seule manière d'éviter les violences populaires est de faire en sorte qu'il n'y ait pas d'impunité, dans le cas d'espèce.

 

Selon le chargé de communication de la gendarmerie, le commandant Diop, ''des enquêtes administratives et judiciaires ont été ouvertes pour situer les responsabilités. Au terme de cette investigation, la gendarmerie va prendre des sanctions''.

 

 

Gaston COLY

 

 

 

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