Le mécanicien prescrit un médicament contre la stérilité à une femme enceinte
Le mécanicien Ousmane Diakhaté a été condamné à 2 ans de prison ferme pour exercice illégal de médecine. Sa tante Awa Sougou, une sage-femme d’État à la retraite, a écopé de deux ans assortis du sursis, pour avoir illégalement ouvert un cabinet médical.
Diplômé d’un Certificat d’aptitude professionnel (CAP) en mécanique générale, Ousmane Diakhaté exerce la médecine depuis 1992, ''par passion'' comme il l’a dit hier, à la barre du tribunal. Soit 20 ans d’exercice illégal, à côté de sa tante Awa Sougou, une sage-femme d’État. Si jusque-là Ousmane Diakhaté se limitait à prendre les constances des patients (le poids, la tension artérielle…), le mécanicien a décidé de se muer en gynécologue. En effet, après 36 ans de service, l’ex-maîtresse sage-femme de Bourguiba, partie à la retraite le 25 août 2011, a ouvert une clinique dans son propre domicile, au quartier de Diamaguène-Diacksao. Or, elle n’a pas encore d’autorisation administrative. Malgré cela, la clinique fonctionnait, avec le faux médecin Ousmane Diakhaté. C’est dans ces circonstances qu’un jour, la dame Nogaye Sèye souffrant de douleurs abdominales, s'est présentée auprès du ''médecin'' Ousmane Diakhaté. Après consultation, le mécanicien-gynécologue lui a prescrit une ordonnance et lui a fixé un autre rendez-vous.
Il détecte un cancer et prescrit une ordonnance destinée aux femmes stériles
Lors de ce second rendez-vous médical, raconte Nogaye Sèye, à la barre du tribunal : ''Il m’a demandé de monter sur la table. Ensuite, il a introduit un bâton de fer dans mon sexe et m’a déclaré que j’ai une plaie qui risque de causer un cancer du col de l’utérus''. Abasourdie par un tel diagnostic, Nogaye Sèye s'est rendue auprès d’une sage-femme officiant à l’Hôpital général de Grand-Yoff qui l’a orientée vers un médecin généraliste du nom de Pape Mamadou Diop, spécialisé en médecine d’urgence. Après échographie, le médecin lui a révélé qu’elle n’avait aucune trace de cancer et qu’elle était plutôt enceinte, avec une grossesse normale. Intriguée, la dame lui a demandé s’il ne s’était trompé de diagnostic.
Devant l’insistance de la patiente, le médecin Pape Mamadou Diop lui a demandé en retour l’adresse d'Ousmane Diakhaté. Devant l’usurpateur de fonction, le médecin s'est présenté comme le grand-frère de Nogaye Sèye et lui a demandé des éclairages sur la supposée maladie de ''sa sœur''. Ne se doutant de rien, Ousmane Diakhaté a confirmé son diagnostic, avant de réclamer 150 000 francs. Car, le médicament n’est disponible que sur commande. Pour ferrer le faux-médecin, Pape Mamadou Diop lui demandera de lui prescrire néanmoins l’ordonnance. Il tombera des nues lorsqu’il découvrira que le médicament en question est destiné aux femmes victimes de stérilité primaire, alors que Nogaye Sèye est enceinte. Aussi, le médecin a-t-il saisi les éléments de la brigade de gendarmerie de Thiaroye.
Le faux-médecin : ''J’ai prescrit l’ordonnance par pitié''
Attrait hier à la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar, pour exercice illégal de médecine et immersion dans une profession réglementée, Ousmane Diakhaté a tenté de se disculper. ''Je n’ai jamais consulté, ni prescrit une ordonnance, a-t-il laissé entendre. Je prenais uniquement les constantes. Comme elle se tordait de douleur, j’ai eu pitié d’elle et je lui ai prescrit un spasfon, pour calmer la douleur, car elle est atteinte d’une infection vaginale''. Toutefois, les déclarations de sa co-prévenue n'ont pas arrangé sa situation. ''Je suis surprise, car je ne lui ai jamais demandé de faire des consultations, a confié Awa Sougou. Même mes cachets, je les garde soigneusement'', dira-t-elle.
La sage-femme à la retraite révélera ensuite que son neveu Ousmane Diakhaté n’est pas diplômé. Cependant, poursuivie pour exercice illégal de médecine, elle a reconnu les faits qui lui sont reprochés. ''La demande d’autorisation ne m’a pas encore été délivrée'', a avoué Awa Sougou. Face à ces aveux, le représentant du parquet a requis deux ans contre les deux prévenus. L’avocat de la défense n’a obtenu la clémence que pour l’ex-sage-femme d’État qui a écopé de deux ans assortis du sursis. Ousmane Diakhaté a été condamné à deux ans ferme. Tous les deux doivent payer chacun une amende ferme de 100 000 francs Cfa.
FATOU SY