Publié le 26 Mar 2021 - 23:24
FONCTIONNEMENT DE LA JUSTICE

Les confidences du procureur spécial Alioune Ndao

 

Entre dépit et amertume, l’ancien procureur spécial près la Cour de répression de l’enrichissement illicite a craché, hier, ses vérités et réclamé plus d’indépendance dans le fonctionnement de la justice.

 

Revenant sur les récentes émeutes, le magistrat à la retraite Alioune Ndao regrette : ‘’C’est la première fois que des attaques physiques sont portées sur des sièges de juridiction. Cela montre qu’il y a un réel problème de confiance entre les justiciables et la justice. C’est faire preuve de cécité que de le nier, comme certains magistrats le font. Il est temps que les acteurs de la justice ouvrent les yeux.’’

Selon lui, même s’ils ne sont pas tous fondés, certains reproches contre la justice ne manquent pas de pertinence. ‘’C’est le cas de 5 % des dossiers qui constituent la figure de la justice. Car ce sont justement les dossiers où l’attitude de la justice est le plus scrutée’’, diagnostique l’ancien parquetier. Pour lui, les responsabilités sont partagées, entre les décideurs qui refusent de mettre en œuvre les réformes et certains magistrats prêts à tout pour accéder à certains postes’’.

Interpellé sur son limogeage de la Cour de répression de l’enrichissement illicite quand il était en fonction, il a estimé que c’est une preuve éloquente que la justice est tout sauf indépendante. ‘’Cela avait déjà montré que les tenants du pouvoir Exécutif n’ont aucun respect à l’endroit du pouvoir Judiciaire. Ils ne veulent pas d’une justice indépendante, parce que ça ne va pas dans le sens de leurs intérêts. Ils veulent toujours avoir la justice sous leurs ordres. Quand on me débarquait, j’étais sur ma ligne en tant que magistrat indépendant. Peut-être, c’est cette ligne qui ne leur plaisait pas. Mais ils n’ont pas donné d’explications’’, a dit l’ancien procureur, non sans signaler qu’il avait tenu bon ; puisqu’il a été militaire, gendarme et policier avant d’entrer dans l’Administration.

Par ailleurs, Alioune Ndao n’a pas manqué de donner quelques conseils à son ancien substitut devenu ministre de l’Intérieur. ‘’Je lui souhaite bon vent en lui demandant de faire beaucoup attention aux politiques. Qu’il évite que ces derniers ne le mettent dans le gouffre, parce qu’il a sa carrière de magistrat devant lui. Donc, il a intérêt à faire beaucoup attention. Je lui demande aussi d’améliorer sa communication. Depuis qu’il est à ce poste de ministre de l’Intérieur, sa communication est calamiteuse. Il s’adresse mal aux Sénégalais’’.

Très en verve, le magistrat à la retraite s’est aussi prononcé sur la question du troisième mandat. ‘’Tout le monde sait que Macky Sall n’a pas droit à un troisième mandat. Lui-même, il le sait. La Constitution est claire. Nul n’a le droit d’avoir deux mandats consécutifs. On ne parle pas de mandat de 5 ans, ni de mandat de 7 ans’’, analyse-t-il.

Et d’insister à l’endroit de son ‘’frère’’ Félix Diome : ‘’Il doit faire beaucoup attention. Macky Sall n’a que trois ans qui lui reste au pouvoir. Il ne faut pas accepter qu’il le mette dans des situations difficiles. En tant que politicien, il pourrait facilement s’en sortir.’’

Entre les deux magistrats, la relation ne date pas de la Crei, comme le pensent beaucoup d’observateurs. Alioune Ndao explique : ‘’C’est quelqu’un avec qui j’ai travaillé avant la Crei. Il était sous ma direction, quand j’étais au parquet général. Il venait me voir quand il avait des difficultés. Il me prenait comme son propre grand frère. Il me disait des choses qu’il ne disait pas à son père. On avait des liens très proches.’’

REACTIONS SOCIETE CIVILE

Alioune Tine : ‘’Nous sommes dans le temps de l’action’’

Pour le renforcement de l’Etat de droit au Sénégal, Alioune Tine est convaincu qu’il faut donner aux magistrats leur indépendance. Parlant des dernières émeutes, il déclare : ‘’Quand on examine les sources profondes de cette crise inédite, c’est pratiquement l’incapacité de nos institutions à réguler la violence, mais surtout la violence politique. Parmi les déclencheurs de cette crise, c’est une perception de la justice qui n’est pas indépendante, une perception très forte d’injustice chez les Sénégalais.’’

Pour Alioune Tine, il y a eu assez de réflexions et de propositions. Il ne reste plus qu’à passer à l’acte. ‘’Nous ne sommes plus dans le temps des propositions ; nous sommes dans le temps du réel. Je dirai même de l’invention du réel, de la possibilité d’avoir une autre justice plus indépendante’’.


Birahime Seck : ‘’Il faut que les acteurs de la justice posent des actes concrets’’

A en croire le coordonnateur du Forum civil, Birahime Seck, les acteurs de la justice doivent être en première ligne, dans ce combat.  La crise, selon lui, a montré que les acteurs de la justice sont en danger. ‘’Quand je dis acteurs de la justice, je parle des magistrats, des avocats, des greffiers, tous ceux qui travaillent dans le service public de la justice, parce que le citoyen lambda n’arrive pas à faire la différence. Et celui qui n’écoute pas les alertes de la société civile, écoutera forcément la rue. Et mieux vaut écouter les alertes de la société civile, des acteurs de la justice, que de devoir faire face à la rue’’.

Pour M. Seck, il faut impérativement que des actes concrets soient posés pour pousser les décideurs à apporter des réformes au système judiciaire. ‘’Et là, j’interpelle tous les acteurs. Quels actes doivent être posés, selon des périodicités à déterminer, pour que les Sénégalais puissent nous entendre ? Il faut que les toges, les robes noires soient visibles’’.

MOR AMAR

 

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