Ces goulots qui étranglent le secteur de la médecine privée
Le Congrès du Syndicat des médecins privés du Sénégal (Symeps) a été, pour son président, Dr Ardo Boubou Ba, une tribune pour faire un diagnostic sans complaisance des goulots qui étranglent leur secteur.
Le Syndicat des médecins privés du Sénégal (Symeps) a tenu son congrès hier. L’occasion a été saisie par son président pour sérier les difficultés que rencontre leur corporation. Selon le docteur Ardo Boubou Ba, l’approvisionnement en médicaments est un véritable problème. Il y a beaucoup de cliniques privées dans le pays qui assurent des soins au même titre que le secteur public.
Ces cliniques, d’après lui, devraient pouvoir bénéficier des produits de la Pharmacie nationale d’approvisionnement (PNA). ‘’Mais il semble que c’est la réglementation qui ne le permet pas. C’est une question importante qu’il va falloir résoudre, dans le cadre d’une concertation avec le ministre de la Santé’’, a confié le Dr Ba.
Concernant l’exercice illégal de la médecine, à ses yeux, c’est une réalité. C’est une vieille bataille du Symeps. ‘’C’est ce que j’appelle l’exercice illicite et exercice illégal de la médecine. Illicite, parce qu’il y a des gens qui font de la médecine sans avoir la prérogative de le faire. Et illégal, ce sont des gens qui ne sont même pas du corps de la santé et qui font de la médecine. Nous avons dans la banlieue de Dakar des gens qui soignent, qui hospitalisent qui font des diagnostics et qui ne sont jamais passés devant une faculté de Médecine. C’est un problème grave. Il faudrait que ça soit pris à bras le corps et qu’il y ait une discussion approfondie, aussi bien avec les autorités, les médecins privés que ceux-là même qui sont des tradipraticiens et les médias’’, lance le Dr Boubou Ba.
‘’Le secteur privé de la santé assure au moins 50 % des soins dans ce pays’’
En outre, il souligne que les membres du Symeps rencontrent beaucoup de difficultés dans leur exercice. C’est un secteur qui n’est pas pris à sa juste valeur. Parce qu’aujourd’hui, après les dernières évaluations qui ont été faites, le secteur privé de la santé assure au moins 50 % des soins dans ce pays et sur toute l’étendue du territoire, et ce sont des soins de qualité. ‘’Le secteur manque de solidarité. On essaie d’analyser pourquoi cela. Je pense que c’est dû au fait que chacun est dans son coin surchargé de travail. Ce syndicat existe depuis plusieurs décennies et il a été difficile d’organiser la solidarité. Nous avons espoir que cela va changer, parce qu’aujourd’hui, il y a des centaines de médecins. En 1978, nous n’étions même pas 100. Aujourd’hui, il y a 600 ou 700 médecins. Ils peuvent aider à résoudre ce problème’’, renseigne-t-il.
Il poursuit : ‘’La première difficulté, c’est la communication qui nous a manqué et la solidarité qu’il nous faut absolument établir. Quand les gens en face savent que vous n’êtes pas forts, ils ne vous respectent pas. La nomenclature des actes professionnels est un sujet important. Elle est la base et permet d’établir les tarifs des médecins privés. Or, cette nomenclature, il faut le savoir, devait être établie par l’autorité. C’est-à-dire le ministère de tutelle’’.
‘’Nous avons travaillé pendant deux ans, en nous réunissant tous les mardis pour proposer cette nomenclature au ministère de la Santé pour validation. Cela a été présenté à plusieurs ministres de la Santé successifs, en vain. La dernière réunion que nous avons tenue au mois de mars avec l’ancien ministre de la Santé pour valider encore enfin cette nomenclature et jusque-là, ce n’est pas fait. C’est la plus grosse difficulté, parce que, pour que les tarifs puissent être homogènes et que l’opinion soit informée, il faut qu’il y ait une base. Sinon, chacun peut faire ce qu’il veut et ce n’est pas normal’’, souligne-t-il.
‘’C’est vrai que nous sommes une profession libérale et le code de déontologie précise bien que les honoraires des médecins sont libres, mais il faut les établir avec tact et mesure’’, indique le président du Symeps.
En ce qui concerne leurs perspectives, il est d’avis qu’il faut massifier ce syndicat, faire en sorte qu’il y ait une adhésion importante, surtout des jeunes. C’est eux qui vont faire plus face à ces problèmes.
CHEIKH THIAM