Le dialogue parallèle des opposants

Pendant que le président Diomaye tenait son dialogue à Diamniadio, ce mercredi, avec les “forces vives” de la nation, le Nouveau front force alternative (NFA), regroupant notamment l'Alliance pour la République et le mouvement Gueum Sa Bopp, a organisé son “contre-dialogue”.
Le Dialogue national de ce 28 mai a manqué d'être national. L'Alliance pour la République, l’ex-maire de Dakar, Barthélemy Dias ainsi que le mouvement Gueum Sa Bopp Les Diambars, pour ne citer qu'eux, n'étaient pas présents. Les deux premiers cités ont même tenu des concertations parallèles, le même jour, intitulé ‘’Dialogue alternatif et citoyen’’, ou encore “contre-dialogue”. Durant plus de trois tours d'horloge, cette frange de l'opposition s'est entretenue avec le public sur des questions économiques.
“Le peuple a droit à l'information. Nous voulons savoir comment les ressources publiques sont utilisées, trimestre par trimestre. Où est le rapport ?”, s'interroge d'emblée le membre de l'Alliance pour la République en ancien ministre de la Jeunesse, Pape Malick Ndour.
Dans le même ordre d'idées, l'’’apériste’’ a indiqué que le Sénégal a contracté des emprunts considérables chez les pays voisins tels que le Mali et la Côte d'Ivoire. Selon lui, c'est là un état de fait “préoccupant”, dans un contexte où la dette publique fait couler beaucoup d'encre.
Après le volet économique, PMN s'est aussi permis de jeter des cailloux dans le jardin du tandem Diomaye-Sonko. “Ils n’ont ni programme, ni vision, ni solution et ils n’auront aucun résultat”. S'adressant particulièrement au Premier ministre Ousmane Sonko, qui a déclaré que le Sénégal n'est plus “sous perfusion” de certains décaissements de bailleurs étrangers, PMN rétorque tout simplement que “ce n'est pas vrai”. Selon l'ancien ministre de la Jeunesse, dans le budget 2024, déjà, l'extérieur a contribué à hauteur de 1 178 milliards F CFA. Poursuivant son argumentaire, M. Ndour souligne qu'à l'image du récent emprunt contracté, notamment dans la sous-région, “la politique de l'endettement n'est pas bonne”.
Plus virulent que ses alliés de l'opposition, Bougane Guèye Dany s'est lui aussi intéressé à la question économique. “Si on arrive au point où c’est le Mali qui nous prête de l’argent, c’est parce qu’on a un sérieux problème. Le rapport d’exécution budgétaire que l’ancien régime publiait était un outil pour contrôler l’action de l’État. Mais aujourd’hui, force est de reconnaître que personne ne sait comment est utilisé l’argent de l’État”.
Chiffres en main, le leader de Gueum Sa Bopp a voulu alerter sur la dette qui, selon lui, devient de plus en plus exponentielle. “En 2024, l’Assemblée nationale avait prévu un endettement de 2 100 milliards, mais ce régime s’est endetté à hauteur de 4 500 milliards F CFA. Aujourd’hui, au cinquième mois seulement de l’année 2025, ils se sont endettés à hauteur de 1 800 milliards. Donc, ce régime a trompé les Sénégalais”.
Parlant proprement du dialogue, Pape Malick Ndour estime : “Ce dialogue ne concerne pas (leur) parti. Quelles que soient les conclusions, l’APR n’est pas prête à les valider.”
Pour le néo-‘’apériste’’ Hamidou Hanne, il était question, d'abord, d'expliquer pourquoi l'APR a décliné l'invitation du chef de l'État. “Nous avons décidé de ne pas aller à ce dialogue pour plusieurs raisons. Ces gens n'ont pas de parole et ils ne tiennent jamais promesse. Fonds politique, Conseil supérieur de la magistrature, l’amnistie, rien de tout ce qui a été promis n'est matérialisé à ce jour. Et en cohérence avec notre parti, nous avons décidé de ne pas prendre part à cette mascarade”.
Dans son commentaire, M. Hanne laisse entendre que l'heure n'est pas aux discussions. “Pendant que cette caste politicienne discute à Diamniadio, le pouvoir s'exerce de manière brutale sur le peuple. La vie est de plus en plus chère ; l'école est déstructurée et des menaces pèsent sur les libertés”.
Imam Ndao solde ses comptes
Lors de ce dialogue alternatif, montant au créneau, l’imam Ndao s'en est bien pris à ses collègues oustaz à propos de la question de l'homosexualité. “Aujourd'hui, la posture des oustaz est honteuse. Cela frôle l'hypocrisie. Ils n'avaient pas fait de cadeaux au président Macky Sall, il y a deux à trois ans. Leur mollesse, pour ne pas dire leur silence actuel, est incompréhensible, dans la mesure où la question LGBT fait des percées dans notre pays. C'est aujourd'hui qu'ils devraient plus prêcher contre un tel fléau”.
L'histoire se répète
Pour revenir au dialogue avec le boycott de l'Alliance pour la République, c'est juste une histoire de “revanche”. Car, il y a exactement deux ans, le Pastef avait faussé rendez-vous au président d'alors qui avait organisé un dialogue pour apaiser le climat au sein de l’arène politique. Rappelons qu'en revanche, Taxawu Sénégal de Khalifa, qui était dans la même coalition que le parti d'Ousmane Sonko, Yewwi Askan Wi, avait pris part au rendez-vous de l'ancien pouvoir. Aujourd'hui, l'histoire s'est encore répétée, car au sein du Front de pour la défense de la démocratie et de la République (FDR), certains comme le mouvement ARC d'Anta Babacar Ngom ou le Taxawu Sénégal de Khalifa Sall n'ont pas décliné l'invitation, tandis que Gueum Sa Bopp et l’APR ont préféré l'abstention.
Mamadou Diop