Vers un Code pastoral
Les députés ont adopté une modification de la loi d'orientation agro-sylvo-pastorale visant l’établissement d’une codification de l’activité pastorale.
En invitant le ministre de l'Agriculture, de l'Équipement rural et de la Souveraineté alimentaire à réserver des champs pour accueillir les militants de Pastef arrêtés dans le cadre des manifestations qui ont émaillé le Sénégal la semaine dernière, le député Matar Diop ne donnait pas une grande image de la profession d’agriculteur.
Selon le membre de la coalition Benno Bokk Yaakaar, ‘’l’université a été incendiée par des voyous et des bandits qui n’ont rien à dire. Vous pouvez réserver de grands champs pour les parents de Pastef. Il y en a qui ont commis des actes réprimés par la loi. Ils seront condamnés comme l’a été leur leader. Si possible, il faut en faire des ouvriers agricoles et leur imposer de cultiver les zones rurales, car c’est ce qu’ils méritent. Ils ne méritent pas de vivre avec la communauté. Des casseurs et des voyous n’ont pas leur place dans la société’’.
Mais il a été très vite repris par son collègue membre de Taxawu Sénégal. L’honorable Sanou Dione s’est indigné que la condition de paysan soit assimilée à une punition, alors que des millions de Sénégalais vivent de l’agriculture. ‘’Ce sont d’honnêtes citoyens qu’il faut respecter’’, exige-t-il, en se désolant qu’un élu du peuple puisse tenir un discours pareil.
La modification adoptée à l’unanimité
Si ce genre de bisbilles est le lot quotidien des séances plénières à l’Assemblée nationale, cela n’a pas empêché les députés d’adopter le projet de loi n°01/2023 modifiant la loi n°2004-16 du 4 juin 2004 portant loi d'orientation agro-sylvo-pastorale.
Défendue par le ministre de l'Agriculture, de l'Équipement rural et de la Souveraineté alimentaire, c’est une modification de l'article 45 de la loi n°2004-16 du 4 juin 2004 portant loi d'orientation agro-sylvo-pastorale qui a été validée par le Parlement. La version 2004 précise que ‘’le pastoralisme fera l'objet de dispositions spécifiques dans une loi portant réforme foncière visée à l'article 23. Il sera également procédé à une actualisation du décret n°80-2680 du 10 mars 1980 sur les parcours du bétail’’.
Sauf que cela n’a toujours pas été fait. Pour corriger cette anomalie, Aly Ngouille Ndiaye estime qu’il est nécessaire ‘’de procéder à la modification de l'article 45 de la loi d'orientation agro-sylvo-pastorale, en vue de trouver une base juridique à la codification du pastoralisme. Ainsi, l'encadrement spécifique du pastoralisme aura pour siège une loi portant Code pastoral’’.
L'article 44 de la loi n°2004-16 du 4 juin 2004 portant loi d'orientation agro-sylvo-pastorale a reconnu le pastoralisme comme un moyen de mise en valeur de l'espace rural et des ressources naturelles.
Un contournement de la réforme foncière
Une adoption saluée par l’honorable Oumar Youm. Pour le président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar, ‘’les références pour les réglementations pour la réforme dans le secteur pastoral sont liées à la réforme foncière’’. Comme les conclusions de la Commission nationale sur les réformes foncières n’ont pas été appliquées par le président de la République, ‘’il est intelligent de contourner cet obstacle par la modification de l’article 45 qui permet d’ores et déjà d’abriter le Code pastoral’’.
Les conflits entre agriculteurs et éleveurs sont monnaie courante au Sénégal. Mais en allant vers l’établissement de ce Code pastoral, assure le ministre, ‘’on espère trouver des espaces dédiés pour chacun’’.
Le passage d’Aly Ngouille Ndiaye devant les députés a été l’occasion pour l’honorable Guy Marius Sagna d’interpeller sur les choix du gouvernement dans la distribution du matériel agricole. Au ministre, l’activiste reproche que ‘’les Sénégalais votent un budget pour que vous achetiez du matériel agricole pour les paysans. En lieu et place, vous équipez des nervis avec des pick-up et des armes pour s’attaquer aux Sénégalais’’.
Guy Marius Sagna : ‘’Au lieu d’acheter assez de matériel agricole, vous équipez des nervis’’
Rien d’étonnant, déduit-il, qu’en 2023, pour 15 000 villages au Sénégal, ‘’vous ne prévoyez que 10 058 semoirs. Cela ne couvre même pas un semoir pour un village’’. Le député de Pastef s’indigne que pour tous ces villages, l’État prévoie la distribution ‘’de 5 525 houes locales, 2 196 houes occidentales, 246 charrettes UCS, 797 charrettes à cheval, 606 charrettes pour âne’’.
Réagissant aux interpellations du leader de Frapp/France dégage, Aly Ngouille Ndiaye n’a pas souhaité entrer dans une polémique, en reconnaissant qu’il est ‘’vrai que nous n’avons pas 15 000 tracteurs à distribuer pour que chaque village puisse en avoir un’’. Ceci dit, ajoute-t-il, le président de la République a réalisé des prouesses inégalées dans la distribution du matériel agricole : ‘’85 milliards F CFA ont été alloués à l’achat de matériel agricole avec un programme de distribution en cours de 700 tracteurs, 50 moissonneuses-batteuses dans tout le Sénégal. Et avec ce programme, j'ai demandé, par une circulaire, qu’au moins chaque arrondissement du Sénégal reçoive un tracteur. J’y veillerais personnellement.’’
Ibrahima Baba Sall, nouveau 1er vice-président L’Assemblée nationale du Sénégal a élu un nouveau vice-président. Hier, lors du passage du ministre de l’Agriculture, le président du Parlement, Amadou Mame Diop, a inscrit à l’ordre du jour le scrutin pour l’élection du remplaçant d’Abdoulaye Diouf Sarr. Ainsi, le président de groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar, Omar Youm, a proposé Ibrahima Baba Sall, seul candidat. Le vote s'est déroulé dans le calme. Sur les 105 votants, 93 députés ont voté pour, 2 contre, 9 abstentions et 1 nul. Le député-maire de Bakel, membre de la majorité, vient intégrer ainsi le bureau de l’Assemblée nationale. Son prédécesseur a été nommé directeur général du Fonds souverain d'investissements stratégiques (Fonsis) depuis mai 2023. |
Les députés s’écharpent sur un prolongement du mandat de Macky Sall Même si la possibilité d’un prolongement du mandat du président de la République Macky Sall n’est qu’une rumeur, le débat se pose déjà à l’Assemblée nationale. Hier, Guy Marius Sagna l’a soulevée, face au ministre de l'Agriculture, de l'Équipement rural et de la Souveraineté alimentaire. Comme pour faire passer un message au chef de l’État, le député a notifié à Aly Ngouille Ndiaye ‘’qu’aucun mandat ne sera prolongé au Sénégal. Que ce soit un mandat de 5 ans, de 2 ans ou même d’une minute. Il n’y aura pas de troisième mandat. Macky Sall terminera en 2024. S’il le sait, c’est mieux pour lui’’. Le député de Ziguinchor ajoute que si ‘’l’on est prêt à discuter pour un rallongement’’ du mandat du président de la République, que ‘’l’on soit également prêt pour abréger son mandat’’. Il a été repris par le président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar. Pour Oumar Youm, ‘’personne ne peut dire que le président de la République finira sa mission à la tête du pays dans 6, 8 mois ou une autre date. Nous croyons en Dieu. Nous ne sommes pas nés au pouvoir et nous n’allons pas mourir au pouvoir. C’est ceux qui veulent prendre le pouvoir par la force, la violence qui mettent en danger le pays. Face à celui qui se comporte comme un âne, il faut se comporter en cocher’’. |
Lamine Diouf