Touba transcende tout
Rendre hommage au fondateur du Mouridisme ignore de plus en plus les clivages de tout ordre. Touba est le lieu de convergence d’un tiers de la population sénégalaise pour au moins deux jours. Entre démonstrations de force vocale des ‘’ baye-fall ‘’ et une assistance de plus en plus cosmopolite, le Magal dans toute sa splendeur.
Bamba Fepp, Bamba Partout, Bamba...everywhere. Le slogan lancé par Serigne Modou Kara illustre bien le triomphe du Magal dans l’agenda religieux sénégalais. Accueillant 4 millions de personnes environ pour cette édition, selon le président du comité d’organisation, Serigne Bass Abdoul Khadre, le 120ème anniversaire du départ en exil vers le Gabon de Serigne Touba confirme une tendance de plus en plus portée à la diversité. La cérémonie religieuse a cessé d’appartenir à la communauté mouride exclusivement. En 2013, le 18 safar (date du calendrier musulman à laquelle on célèbre le Magal) venait allonger le nombre de jours fériés, chômés et payés au Sénégal.
‘’ C’est une décision pertinente car les gens prenaient ce congé avec ou sans l’aval d’un supérieur’’, déclare Djibril Diouf, devant la maison familiale sise à quelques jets de pierre de la grande mosquée. Ses parents tidianes, disciples de l’autre grande confrérie du pays, ont quitté le quartier Hersent de Thiès pour venir rendre hommage au fondateur du Mouridisme. ‘’ C’est mon premier pèlerinage ici et je compte revenir chaque année. D’après l’affluence que je viens de constater, je me rends compte que ce n’est pas qu’une affaire de mourides’’, jubile Astou Fall, assise à côté de lui.
A la résidence Khadimou Rassoul, en face de la grande mosquée, les va-et-vient remarqués d’un trio espagnol n’échappe à personne. ‘’ Na ga def, naka war ? ‘’, lance Pedro au vigile commis au lavage des mains. Un salut à la manière des disciples de Bamba et des habits traditionnels amples prouvent qu’il est familier avec les usages de la voie mouride malgré quelques maladresses dans ses gestes. ‘’ C’est la deuxième fois que je viens célébrer le Magal. Pour moi, c’est toujours un plaisir de savoir que je partage une foi avec tant de personnes’’, confie-t-il.
Mouhamed Fadel Sankhé, chroniqueur religieux à Jant-bi fm (Touba) « Tout ceci est le reflet d’un Serigne Touba multidimensionnel » « Dans son panégyrique Massaalikoul Jinaan, Serigne Touba a assuré que ceux qui suivent les directives de leurs guides respectifs les rencontreront immanquablement. Mais il faut comprendre que dans l’entendement du saint homme, il n’y a aucun clivage confessionnel d’aucune sorte. Ce qui comptait pour lui, c’était la pratique vertueuse de l’Islam. Seule la vérité perdure aussi longtemps, et quand on vient à elle, on ignore même les motifs qui poussent à se rendre à Touba. Être au service de Dieu a ceci de réjouissant que quand arrive la récompense, c’est toujours au-delà des espérances. Les gens qui assistent au Magal dans leur diversité confessionnelle est une excellente chose. Tout ceci n’est rien d’autre que le reflet d’un Serigne Touba multidimensionnel. Il n’y a rien d’étonnant que des personnes ne répondant pas à la doctrine mouride viennent dans la ville pour célébrer Cheikhoul Khadim. C’est l’inverse même qui aurait été préoccupant. » |
Ousmane Laye Diop (envoyé spécial à Touba)