Le 20 mars, si près si loin
Un contre-la-montre s’engage pour le référendum de mars prochain. Quinze mesures et 22 articles qui vont reconfigurer, ou pas, la Charte fondamentale en vigueur depuis 2001. Mais des interrogations subsistent sur les conditions ‘limites’ d’organisation de cette consultation
‘‘Pourquoi une fois l’avis du Conseil constitutionnel donné et qu’il n’y a plus d’urgence, cette précipitation soudaine et injustifiée à organiser un référendum dans un délai d’un mois à peine ?’’ Le questionnement est de l’ancien Premier ministre du Sénégal, Abdoul Mbaye. Une interrogation reprise par Cheikh Tidiane Dièye de la plate-forme Sénégal Avenir bi nu beug, lors de la mise en place du ‘‘Front du NON Niani bagn na’’ avant-hier. La tenue du référendum dans les délais fixés (20 mars prochain) n’est pas pour rassurer les partisans du vote négatif. A partir de ce vendredi, seuls 22 jours séparent l’électorat sénégalais de la quatrième consultation référendaire de son histoire. Un laps de temps d’à peine trois semaines qui laisse planer quelques craintes sur les capacités de l’Etat à organiser ce vote de manière satisfaisante, dans le délai qu’il s’est imparti.
Le problème le plus immédiat réside dans la révision des listes électorales. Omar Sarr dénonçait samedi dernier à Mpal ‘‘une période restreinte d’un mois’’, en promettant de trouver des moyens de combattre la décision du Président Sall. Le chargé de communication de Rewmi qui soutient mordicus que le vote négatif sera de rigueur a estimé, hier, que sa formation et tous ceux qui sont pour le NON sont mis devant le fait accompli. ‘‘Peu importe, le président Macky Sall n’a consulté personne sur les délais, ou sur les contenus. Il a fait ce qu’il veut, nous devons nous adapter à cette situation. Même si c’est demain. Il faut nécessairement que le peuple sénégalais dise non à cette forme de réformette’’, déclarait Thierno Bocoum au sortir des consultations citoyennes de l’opposition et de la société civile.
Validité des cartes prolongée
Appréhensions de l’opposition ou pas, le parti au pouvoir et ses alliés se donnent les moyens d’une participation massive et un triomphe du OUI. Le ministère de l’Intérieur et de la Sécurité publique, en charge des élections, essaie de dissiper cette crainte qui se fait jour dans le camp adverse. L’expiration de la validité des cartes d’électeur ne devrait pas poser de problèmes puisqu’un communiqué, passé hier à la télévision nationale, faisait état de l’éligibilité de ces cartes jusqu’en décembre de l’année courante. Le Sénégal devrait passer après à la carte d’identité biométrique de la Cedeao. La semaine dernière, lors d’une rencontre avec le secrétariat exécutif national (Sen) de l’Apr, Macky Sall avait annoncé qu’un décret serait pris dans les jours à venir pour un prolongement de la validité des cartes d’identité et d’électeur. Toujours est-il que les ‘marron-beige’ semblent avoir une légère avance puisque leurs comités centraux dans les communes et départements du pays sont en train d’être installés sous la houlette du ministre de la Gouvernance locale Abdoulaye Diouf Sarr. Mieux, le ministre délégué chargé de la Microfinance est déjà en campagne électorale pour le triomphe du OUI au soir du 20 mars 2016. Après la banlieue dakaroise et Louga, Moustapha Diop était hier à Thiès et compte se rendre aujourd’hui à Diourbel.
La diaspora sacrifiée ?
Les appréhensions du ‘‘Front du Non Niani Bagn na’’ concernant le vote de la diaspora ne semblent pas infondées non plus. Des consuls contactés par EnQuête affirment également que le ‘‘délai est très court’’ pour organiser ce référendum. Selon ces derniers, il faut adresser des correspondances aux gouvernements des pays d’accueil puisque le vote y est organisé après une décision administrative. La mise à disposition de salles, de la logistique, de la sécurité et de tout le dispositif nécessaire à une consultation dépend des autorités de ces pays alors que rien n’est encore esquissé dans ce sens.
A ce problème structurel, risquent de s’ajouter des difficultés relatives aux ressources humaines. Et selon un diplomate aujourd’hui à la retraite, une importante majorité des plénipotentiaires détachés dans les différents consulats étrangers sont des néophytes qui en sont à leurs premières élections. Toutes choses qui font que la Direction générale des élections, contactée au téléphone, déclare qu’une sortie est incessamment prévue pour éclairer l’opinion sur les différentes dispositions prises pour tenir le vote dans les meilleurs délais…et les meilleures conditions.
OUSMANE LAYE DIOP