Publié le 21 Jan 2012 - 13:49
EDITO

Urgences affligeantes

Le dramatique meurtre, lundi, par balle du jeune étudiant Jean-Marie Cabral, décédé, semble-t-il, sans assistances médicales sérieuses, a une fois de plus révélé le scandaleux système des urgences hospitalières. D'après le directeur de l'institut de formation ''Sud-info'', Alassane Ngom, qui a évacué le blessé à l'hôpital régional de Ziguinchor, l'étudiant ressortissant de Guinée-Bissau n'a vu aucun médecin et qu'il n'a pas été opéré fissa pour extraire le projectile reçu. Il aurait pu être sauvé d'autant qu'''il n' n'avait aucun pronostic vital'', à en croire M. Ngom, l'indigné.

 

 

L'on oserait douter des accusations de ce formateur si le cas d'espèce sortait de l'ordinaire. Or, c'est courant et banal, ces délits de négligence coupable dans nos structures de santé. L'excuse d'un manque de moyens matériels pouvait prospérer sauf qu'elle ne tient pas trop pas face à des pratiques méprisantes dans le système de prise en charge de la santé publique.

 

 

Combien de fois la presse a rapporté des cas de patients morts des suites du peu d'empressement dont ont fait montre des personnels de santé à prodiguer les premiers secours. Ou encore en faisant preuve d'insensibilité incroyable en baladant le malade et ses parents d'une structure à l'autre.

 

 

A l'image d'une société sénégalaise pervertie par l'argent-roi, l'humanité a foutu le camp depuis longtemps des salles d'attentes, de consultations et de chirurgie. L'urgence, c'est d'abord les espèces sonnantes et trébuchantes, les soins viennent bien après, si le malade ne crève dans l'intervalle. Dès lors, il n'est pas surprenant que les cris révoltés du chef d'établissement n'ont jusque-là suscité aucune réaction, ni auprès de l'Ordre national des médecins, ni du ministère de la Santé encore moins du chef du gouvernement et de son patron, le président de la République.

 

Même pas l'annonce d'une enquête administrative pour situer les responsabilités à l'hôpital régional de Ziguinchor. Comme s'il allait de soi qu'au Sénégal de ce 21e siècle, on entre à l'hôpital pour mourir et que l'exception est d'en sortir vivant.

 

 

De fait, l'impunité dont semblent bénéficier des médecins qui ont renié le serment d’Hippocrate fait écho aux crimes politiques et ceux perpétrés par des éléments des forces de l'ordre aujourd'hui davantage mobilisées à casser voire tuer de l'étudiant et de l'élève. Lesquels ne manifestent qu'un droit à l'éducation et à la formation dans les meilleures conditions dignes des 40% du budget dits injectés dans le secteur.

 

 

Mais le grand bluff de l'alternance est désormais totalement découvert, les urgences sont à l'accaparement des deniers publics et le maintien au pouvoir. Quitte à allonger le décompte macabre, à la suite des militaires et des nombreux civils en Casamance, des étudiants Balla Gaye et Jean Marie Cabral, des jeunes Malick Bâ et Ndiaga Diouf, de l'innommable drame du bateau Le Joola et ses plus de 2000 morts... C'est aussi, et malheureusement, ça l'alternance. Vivement l'alternative.

 

Mamadou Lamine BADJI

 

 

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