Chirurgiens et gynécologues, les denrées rares !
Les maladies chroniques constituent les premières causes de décès, avec des soins excessivement chers. Or, le système sanitaire du Sénégal est confronté à une pénurie de chirurgiens et de gynécologues et un déficit de financement pour faire face à leur persistance.
Le système sanitaire sénégalais va mal. Hormis le coût élevé des médicaments pour les maladies chroniques, il est confronté à une insuffisance de ressources humaines. Hier le ministre de la Santé et de l'Action sociale a pointé du doigt l'existence d'une sérieuse pénurie de chirurgiens et de gynécologues pour une prise en charge efficace de ces maladies. Awa Marie Coll Seck s'exprimait devant les membres du Conseil économique social et environnemental (CESE) à l'occasion de la deuxième session extraordinaire de l'institution. Son intervention était consacré à la persistance des maladies chroniques dans le système de santé au Sénégal.
«2 000 sages-femmes au chômage»
«Le problème de fond des ressources humaines est qu'elles sont insuffisantes et mal réparties. Presque les 2/3 sont sur Dakar et Thiès. On a une pénurie de chirurgiens et de gynécologues. Ce sont les deux denrées vraiment rares dont tout le monde a besoin», a dit Mme Seck.
Selon elle, cette situation est imputable à une absence de politique visant à pousser et encourager les étudiants sénégalais à la spécialisation en chirurgie et en gynécologie. «Le Sénégal n'a pas fait (ce qu'il aurait fallu faire) pour que les Sénégalais se spécialisent. Le coût de la spécialisation est élevé et on a les meilleurs professeurs mais ils ne forment que des étrangers. Parce qu'avant de payer 500 mille ou 1 million de francs Cfa, les Sénégalais préfèrent s'installer et travailler. (Malheureusement) il n'y a pas eu de politique pour encourager cela'', a regretté le ministre de la Santé.
Pour mettre fin à cette pénurie, un appel à candidatures a été lancé afin d'octroyer des bourses aux Sénégalais qui vont terminer dans 4 ans. «Il faut investir si nous voulons des résultats dans 4 ans. Pendant ce temps, il y a au moins 2 000 sages-femmes qui chôment parce que de 2005 à 2010 il n'y a pas eu de recrutement. On a besoin de ces gens mais il n'y a pas d'argent. Nous aussi, on est dans une situation difficile», a-t-elle soutenu. Les recrutements ont redémarré en 2011 mais c'est 500 postes par an.
Augmenter les taxes liées au tabac
S'agissant du coût élevé des médicaments que les conseillers ont déploré, Eva Marie Coll Seck a affirmé se battre afin qu'il y ait des lignes budgétaires qui permettront de subventionner ces médicaments jugés très onéreux.
Par ailleurs, les conseillers ont recommandé la promulgation et l'application par le gouvernement de la loi anti-tabac puisque le tabac est le premier facteur de risque pour les maladies cancéreuses. Mais aussi, une augmentation des taxes liées au tabac pour lutter contre ces maladies. La loi anti-tabac est à l’Assemblée nationale, elle va être sans doute amendée dans certains aspects, notamment l'aspect des taxes, car nous voulons que ces taxes soient utiles pour financer la santé dans différents secteurs», a rassuré Eva Marie Coll Seck.
Les conseillers ont également insisté sur le renforcement du plateau technique, et celui des infrastructures d'une manière générale, l’accès aux soins, et une lutte plus dure contre la vente des médicaments de la rue, «cause de beaucoup de maladies chroniques. «Le trafic des médicaments est plus lucratif que le trafic de la drogue et les peines sont légères. Nous travaillons avec le ministère de la Justice pour alourdir les peines. Mais nous allons aussi renforcer l'inspection au niveau du ministère parce qu'il y a trop de laisser-aller. Nous avons l'audit des décès», a conclu Eva Marie Coll Seck.
VIVIANE DIATTA