Bamba draine encore sa foule
Touba, le Magal et les fidèles. La foule, la poussière aux abords de la mosquée est partout dans la ville. La visibilité n’est pas des meilleures, la lumière du jour mêlée à la poussière rend fou. Comme hypnotisés par ces minarets si proches et si loin à la fois, ils avancent les pèlerins massifs. Ils respirent l’air crasseux, toussent, mais avancent fermes. Les poitrines sous les agressions de l’atmosphère se bombent et retombent très vite. Il est 10h, et c’est l’heure à laquelle Cheikh Ahmadou Bamba embarquait pour une destination inconnue. Ici, il se dit qu’il faut être à l’intérieur où aux alentours de la mosquée à cet instant précis. Une marque de sympathie à l’endroit de leur Cheikh, leur guide, leur vénéré.
‘’Il a restauré notre dignité face à l’oppresseur, nous avons l’obligation morale et religieuse de chanter sa gloire’’, pousse le vieux pèlerin tout de blanc vêtu. Une blancheur qui fait sa mue, face à la poussière qui déferle. Ce long fil formé par les humains étouffe. Très vite une bousculade arrive, très vite aussi les marcheurs se soutiennent. Personne ne tombe, même pas ces vieilles mamies et ces vieux papis qui voient le temps faire son oeuvre sur leurs visages, avec des rides partout.
La générosité et la croyance sont les choses les mieux partagées dans les coulisses. Les oreilles n’ont droit qu’aux sons des khassaides qui tonnent de partout. Souvent tout s’arrête et s’élancent difficilement des véhicules qui fument, toussent et crachent comme des dragons frappés par la vieillesse. Un moment choisi par de petits voyous dissimulés dans la foule pour caresser les poches des pèlerins. La file avance, la mosquée de Touba apparaît là devant les premiers de la colonne.
Fusent de partout des ‘’dieureufé Serigne Touba’’. L’autre challenge à relever reste les visites au sein des mausolées. Il faut sacrifier là encore à une attente sur de longs fils humains. ‘’C’est dur, mais nous avons l’habitude et ce n’est rien comparé à la souffrance de Serigne Touba en mer et au Gabon’’, souligne Abdou, la vingtaine pétante. Le mausolée atteint, les prières pleuvent tout comme ces pièces de monnaie en guise de ziar. Une vague humaine s’en va, une autre arrive et ainsi de suite, le soir tombe sur Touba sous un décor poussiéreux.
Amadou NDIAYE