‘’Barthélemy Dias n’a jamais été en phase avec Khalifa Sall’’
Membre du Bureau politique du Parti socialiste, Mamadou Mbodj Diouf descend en flamme Barthélemy Dias, Aïssata Tall Sall et Khalifa Sall. Aussi, dans cet entretien avec EnQuête, le Directeur général de la modernisation des daara soutient-il que malgré les apparences, Barthélemy Dias n’a jamais été en phase avec Khalifa Sall.
L’Assemblée nationale a récemment procédé à la levée de l’immunité parlementaire de Barthélémy Dias qui peut désormais comparaître. Quel est votre avis sur cette affaire ?
J’ai été plus ou moins trop proche de cette affaire. Quand les évènements se passaient, j’étais le Secrétaire national adjoint du Mouvement des jeunesses socialistes donc adjoint direct de Barthélémy Dias. Le camarade Dias dont nous sommes entièrement solidaire, a toujours voulu que cette immunité soit levée pour qu’enfin de compte, cette affaire soit jugée. Que l’Assemblée nationale, à travers sa commission ad hoc, décide de lever cette immunité parlementaire, cela ne peut être perçu que comme une bouffée d’oxygène.
Le maire de Mermoz-Sacré Cœur dénonce des relents politiques dans cette affaire. Qu’en pensez-vous ?
Je ne pourrais pas trop m’engager dans cette voie. Barthélemy Dias a toujours voulu que son immunité soit levée. Je pense que depuis 2014, il a adressé une correspondance à tous les députés de cette législature pour demander la levée de son immunité. Il a toujours été constant dans cette dynamique. Je pense que c’est un ouf de soulagement même pour nous ses camarades socialistes. Aujourd’hui, avec la levée de son immunité parlementaire, on pourra dépasser cette affaire et passer à autre chose.
Est-ce que cette affaire n’est pas liée à ses prises de positions au sein du PS ?
Je ne le pense pas. Je trouve dommage que les gens puissent faire le rapprochement. Je condamne ses prises de positions et j’ai eu à le lui dire. J’espère qu’il n’a pas juste peur de voir se terminer son mandat sans pour autant que celui-ci ne soit renouvelé. Si c’est le cas, il n’y a pas péril en la demeure dans la mesure où il n’est pas le seul militant socialiste. Parce que, quand il a fallu investir pour cette législature, on était plus de trois cent mille militants et parmi eux, il a fallu choisir 20 et le Bon Dieu a fait qu’il en fait partie.
Maintenant on s’achemine vers la fin de cette législature, d’autres seront investis. Mais au PS, on investit ès qualité et s’il avait occupé des responsabilités comme celui de Secrétaire général de coordination, d’Union régionale ou Secrétaire général de mouvement comme il l’a été, la question ne se poserait pas. Il aurait toutes ses chances de rempiler. Malheureusement, ce n’est plus le cas. Barthélémy Dias est un simple militant comme tout autre militant. On ne peut pas investir des militants et laisser des responsables. Je lui ai carrément dit que ce ne serait pas sage de sa part de vouloir tirer à boulets rouges sur la direction et sur le Secrétaire général du parti juste parce qu’il a peur de perdre son mandat de député.
Pensez-vous que ses agissements soient uniquement liés à sa volonté de garder son statut de parlementaire ?
J’en ai l’intime conviction. Je pense que je suis assez bien placé pour pouvoir l’affirmer. J’ai eu beaucoup de discussions avec lui sur la question.
Comment voyez-vous son engagement aux côtés de Khalifa Sall ?
Je me demande jusqu’ici s’il y a réellement un engagement de Barthélemy Dias aux côtés de Khalifa Sall. Parce qu’il n’a jamais été en phase avec le maire de Dakar. S’il y a aujourd’hui un revirement, c’est parce qu’à un moment donné, il y a une convergence d’intérêts. Quelque part, Barth a peur de perdre son mandat et Khalifa a besoin d’un soutien de taille pour pouvoir confirmer sa position au niveau du parti et sur l’échiquier politique national et peut-être conforter sa posture de présidentiable. Après avoir dirigé le Mouvement des jeunes, cela ne l’honore pas d’avoir cette posture qui consiste à saper la cohésion et l’unité du parti.
Nous sommes un parti organisé et structuré. Toutes les décisions prises par la direction découlent de procédures démocratiquement menées et lui, il le sait. Il a maintenant le droit de ne pas être d’accord avec les positions de la direction du parti. Il a le droit de ne pas être en phase avec le Secrétaire général par rapport à la ligne du parti. Mais je pense que le PS a des instances appropriées pour poser ces genres de question. Une fois posée et que la majorité des militants se prononcent pour ou contre, l’essentiel en tant que militant discipliné, c’est de se ranger. Malheureusement ce n’est pas ce qu’on observe actuellement.
Comment appréciez-vous la posture du maire de Dakar?
Je fais partie des jeunes qui l’ont beaucoup côtoyé et ont beaucoup échangé avec lui. Je n’ai jamais mis de gants pour lui dire ce que je pense de ses prises de position. Ceux qui me connaissent en tant que membre du Bureau politique savent très bien qu’à chaque fois que de besoin, je l’interpelle pour lui dire : camarade, je ne suis pas d’accord avec tes prises de position. Cela a débuté depuis cette histoire de candidature naturelle qui est, on l’a constatée, une montagne qui a accouché d’une souris. Tout le monde pensait qu’il allait être candidat en 2012 tant le débat sur la candidature naturelle du parti a été agité. C’est lui-même et Aïssata Tall Sall qui étaient les pourfendeurs de cette candidature naturelle du Secrétaire général du PS. Au final, personne n’a été candidat en dehors d’Ousmane Tanor Dieng. Cela a produit un désastre et nous le regrettons profondément.
Vous avez parlé tout à l’heure de Aïssata Tall Sall. Comment jugez-vous ses prises de position par rapport au PS ?
Voilà une dame qui me surprend beaucoup. Une dame pour qui j’avais beaucoup de considération. Mais je pense qu’elle est tombée bien bas. Ce n’est parce qu’elle ne parvient pas à décrocher l’Union régionale de Saint-Louis ou parce qu’elle a été battue lors des derniers renouvellements en tant que candidate au poste de Secrétaire général du parti et qu’elle n’a pas pu non plus hériter du poste de Secrétaire général adjoint, qu’elle doit maintenant boycotter le PS et ses instances ou qu’elle doit continuer à tirer à boulets rouges sur le parti. Je pense que cela ne l’honore pas.
Ce n’est pas une belle image qu’elle offre vu sa stature et la personnalité qu’elle incarne. Ses dernières sorties ont été très décevantes. Ce n’est pas cela qu’on attend d’elle. Elle a le droit de se tenir à l’écart. Mais quand elle prend l’option de se mettre à la périphérie du parti, en situation de quasi-démission, elle ne doit pas continuer à porter des jugements de valeur sur le fonctionnement du parti parce qu’elle n’en sait absolument rien du tout. Quand on refuse de participer aux réunions du BP, du Secrétariat exécutif national et de toutes les autres instances, la meilleure chose qu’elle avait à faire, c’est de se taire.
Si elle pense qu'au PS les décisions se prennent hors des instances, elle peut toujours continuer à errer dans ses rêveries de la parfaite candidate à la présidentielle. La question de la candidature du PS sera tranchée au moment opportun quand le parti en décidera et suivant un appel à candidature. Ce que nous ne pouvons pas accepter, c'est cette habitude de certains camarades à vouloir ramer à contre-courant de la décision de la majorité des militants. Une minorité ne saurait contraindre une majorité. Malheureusement pour eux, les militants ne sont pas dupes. Et ce ne sont pas les turpitudes de quelques coordinations va-t-en-guerre comme celle de Khalifa Sall à grand-Yoff, qui empêcheront la direction du parti de dormir. On aura beau provoquer, la décision reviendra toujours aux instances et à ce jour, on n'y a pas dérogé.
PAR ASSANE MBAYE