‘’Nous ne pouvons pas humilier notre président de la République…’’
Avec l’arrivée à Dakar du chef de l’Etat français, Emmanuel Macron, le 1er février prochain, les travailleurs du nettoiement ne veulent pas ‘’humilier’’ son homologue sénégalais à savoir le Président Macky Sall. C’est ce qui explique la suspension de leur grève entamée la semaine dernière, selon le porte-parole des concessionnaires du secteur, Ndongo Fall, par ailleurs, directeur général de la Société de Transport et de Commerce (STC), dans un entretien accordé à EnQuête.
Vous étiez en grève pour des arriérés de salaires. Comment est-on arrivé aujourd’hui, à 6 milliards ?
Cette situation s’explique par des factures impayées. Et la somme se situe entre 5,5 milliards et 6 milliards de francs CFA. Nous n’avions aucune autorité à qui nous adresser. A un moment donné, nous sommes arrivés à bout. Nous n’en pouvions plus. Nous n’avons plus de carburant à mettre dans les véhicules. Les personnels nous poignardaient de partout. Les fournisseurs ne voulaient plus nous donner du carburant. C’est pourquoi on était obligé d’arrêter.
Depuis quand l’Etat a-t-il cessé de payer normalement ?
Cela fait 7 mois que nous vivons cette situation.
Qu’est-ce qui explique l’échec des négociations avec le ministre en charge du Budget, Birima Mangara ?
Nous étions d’accord avec le ministre du Budget, mais vu que nous sommes un collectif, il fallait que j’aille leur parler, avant de prendre une quelconque décision. J’ai convoqué d’urgence une réunion à la sortie de la rencontre avec le ministre. Ils étaient presque d’accord, mais du fait qu’ils n’avaient plus de carburant, ils ont préféré attendre d’avoir quelque chose pour reprendre le travail. Ensuite, le Premier ministre est entré dans la danse, en nous disant qu’il confirme ce que le ministre du Budget a dit. Il a ajouté que s’il peut raccourcir le délai, il nous donnera l’argent, c’est-à-dire les 3,5 milliards de francs CFA mardi. Ce qui a été respecté. Le PM a également ordonné à notre ministre de tutelle de nous recevoir d’urgence. Ce qu’il a fait lundi. Vraiment, on s’est bien parlé. Chacun a regretté ce qui s’est passé et, actuellement, on a repris le travail.
Vous réclamez la totalité de votre argent, pourquoi avez-vous accepté les 3,5 milliards ?
Nous sommes des citoyens, des Sénégalais. Nous ne pouvons pas exiger coûte que coûte l’intégralité de ce que l’Etat nous doit. Nous sommes patriotes, c’est pourquoi nous avons accepté ce compromis. Nous sommes des travailleurs, nous avons accepté ce qu’ils nous ont proposé.
Pour le reste, y a-t-il un moratoire pour le paiement ?
Le ministre nous a donné 3,5 milliards, aujourd’hui. Dans 10 jours, il va nous donner un milliard et le reste sera fractionné, selon les possibilités de l’Etat. Mais d’ici le mois d’avril, la dette sera épongée.
Est-ce que l’arrivée du Président français Emmanuel Macron n’a pas quelque chose à voir avec votre décision ?
Bien sûr ! C’est pourquoi, lorsque M. Mangara nous a reçus avec le Premier ministre, nous avons jugé nécessaire de reprendre nos activités. Parce que nous ne pouvons pas humilier notre président de la République. C’est nous humilier nous-mêmes. Nous ne le ferons pas.
Vous espérez que l’Etat va honorer ses engagements dans les délais avancés ?
J’en suis sûr. Je suis très confiant.
Au cas contraire ?
Nous sommes optimistes. Nous croyons que cela ne se déroulera jamais comme ça. Parce que, vu les responsabilités qui pèsent sur nous et sur l’Etat, en plus avec la visite du président français, tout le monde respectera ses engagements.
Aujourd’hui, qu’est-ce qui a changé entre l’entente Cadakcar et l’UCG ?
Nous sommes des citoyens, des travailleurs. Si l’Etat met en place un coordonnateur, ce n’est pas notre problème. Notre seul souci, c’est de pouvoir travailler avec les autres et gagner notre vie. Le changement de responsable, c’est le problème de l’Etat qui a ce privilège. Cela ne nous engage pas.
Dans cette affaire, les gens parlent de surfacturation, ce qui fait que la facture…
C’est ceux qui ne savent pas qui le disent. Parce que nous travaillons en collaboration avec des techniciens qui ont des machines électroniques. Chaque camion vient avec sa charge et est payé, après l’avoir vidé. On te donne le poids brut, le poids total en charge, et c’est électronique. Comment peut-on tricher là-bas ? C’est impossible ! Ils racontent des histoires !
Donc, pour vous, il n’y a pas eu de surfacturation ?
Aucune, à ma connaissance. Mais, il y a le fait que l’UGC travaille avec d’autres collaborateurs qui ne sont pas que des concessionnaires. Peut-être que les surfacturations pourraient se situer à ce niveau. Pas chez nous. Tout est électronique.
Donc comment expliquez-vous le remplacement d’Ibrahima Diagne ?
Cela ne nous dit rien. Parce que nous ne sommes que des travailleurs. Nous n’avons pas le droit de choisir avec qui nous travaillons. Donc, le changement d’Ibrahima Diagne ne change rien.