Publié le 27 Jan 2014 - 14:26
NEBULEUSE MARITALIA

L’Etat exhume une affaire 9 milliards

 

Le feuilleton judiciaire mettant aux prises Alioune Ndiaye, PCA de MARITALIA et Mayoro Mbaye, actionnaire dans la société, va de rebondissements en rebondissements. Il vient de prendre une tournure inattendue.

 

Mayoro Mbaye, administrateur de société, en procès avec la société MARITALIA dont il est actionnaire, a été expulsé avant-hier samedi 25 janvier de sa maison à Hann Marinas par les gendarmes de la Brigade de Hann Maristes. Les pandores se sont appuyés sur l'échéance d'une hypothèque contractée dans le cadre de ses activités avec MARITALIA. La villa reprise est évaluée à plus d'un demi-milliard de nos francs.

Ce fait nouveau donne une tournure étonnante à une affaire très complexe qui date de 2003. Dernièrement, l'implication des politiques avait donné un souffle nouveau à ce bras de fer juridique qui met aux prises des acteurs majeurs de la justice et de la politique. Aujourd'hui, M. Mbaye dénonce la mesure d'expulsion qui le frappe, puisque l’hypothèque a été contractée au titre d'actionnaire de la société  MARITALIA contre laquelle il est en procès, depuis plus de 10 ans.

''J'ai dû subir les affres d'une justice au service d'une seule partie, comme s'il était décrété que je n'aurais pas droit à une justice équitable et que je devais tout perdre, me taire à jamais et ne plus jamais travailler au Sénégal'', témoigne-t-il. ''Les plaintes contre ma personne et mes proches, déclare M. Mbaye, ont fait l'objet d'une diligence incroyable avec à la clé mandat de dépôt et arrestations multiples'', au moment où ces ''réclamations et plaintes contre des personnes dénommées, ont à la fin visé X, sans que jamais l'enquête n'aboutisse''. Aujourd'hui encore il s'interroge, car cette affaire lui a déjà valu trois séjours carcéraux.

9 milliards Cfa, des abus et du faux

Dans cette affaire, Alioune Ndiaye a été inculpé, le 25 février 2013, pour abus de biens sociaux portant sur les sociétés Maritalia, Technipact et Lampafric. Bien après que la Chambre d'accusation suivie par la Cour Suprême aient rendu deux décisions (le 01 juillet 2010, pour le premier et le 06 juin 2011, pour le second), demandant son inculpation. Les malversations sont estimées à 9 216 288 792 F Cfa.

Mayoro Mbaye reproche à Alioune Ndiaye d'avoir fait des transferts frauduleux de parts sociales lui appartenant au sein des sociétés ALGA SARL, GENECOM SARL, Technipact SARL et LAMPAFRIC SARL, dans le seul dessein de l'évincer. Pour cela, il poursuit Alioune Ndiaye son cousin germain, et Sidy Mbaye son oncle, pour le délit de faux et usage de faux. Les actes argués de faux ont été découverts en septembre 2010.

Le rôle décisif de Sidiki Kaba et Aminata Touré

En effet, détenant 11% des actions de MARITALIA SA, Mayoro Mbaye réclame depuis 2003 le paiement de 442 536 300 F Cfa aux titres de ses dividendes de 1996, 1997, 1998, 1999, 2000, 2001 et 2002. Cette somme est le fruit d'un rapport d'expertise, en date du 13 août 2004, de Khourédia Thiam Niang confirmé par Abdou Ndéné Ba. Selon M. Mbaye, de 1996 à 2001, la société MARITALIA SA, propriété de Alioune Ndiaye qui détient 89% des actions, n'a pas distribué de dividendes d'un montant total de 2 908 974 997 F Cfa.

Après 10 ans de procédures, M. Mbaye informait le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Me Sidiki Kaba, dans une correspondance, en date du 23 janvier 2014 dont EnQuête détient copie, ''des injustices subies par (s)a famille et (lui) même depuis 10 ans'' et de la mesure d'expulsion prise contre lui. Il affirmait que ''la justice est en train de saboter la procédure'' ; également que ''des procédures sont pendantes et personne ne semble vouloir les vider''.

Il révélait dans sa missive détenir des preuves de corruption et de concussion dans ces dossiers. Dans une lettre antérieure, en date du 18 novembre 2013, il écrivait au Garde des Sceaux que son ''contradicteur'' avait eu le loisir de faire main basse sur ''les 06 entreprises qu'ils ont en partage, leurs biens et aujourd'hui le patrimoine de sa famille''.

Ainsi, à force d'adresser des correspondances aux autorités, Mayoro Mbaye a obtenu un écho favorable auprès du ministre de la Justice Me Sidiki Kaba qui, dans une lettre datée du 1er octobre 2013,  jugeait ''inadmissible'' que cette plainte avec constitution de partie civile remonte à plus de 10 ans. Il y informait avoir saisi le Procureur général près la Cour d'appel de Dakar, pour s'imprégner du dossier qui prenait une tournure politique.

Selon des sources proches du dossier, ce n'est pas seulement l'actuel garde des Sceaux qui a pesé de son poids. L'actuel Premier ministre Aminata  Touré était aussi intervenue pour réclamer...lumière. Est-ce une des raisons pour lesquelles Alioune Ndiaye a finalement été inculpé par le Doyen des juges sans  cependant être emprisonné ? En tout cas, c'est sur la base d'un rapport d'expertise au contenu effarant et aux conclusions claires qu'Alioune Ndiaye va être inculpé sans être placé sous mandat de dépôt. Une affaire à suivre...

Gaston COLY

 

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