La Crei, la défense et l’enregistrement
Après quatre jours d’audition, Cheikh Diallo a été convoqué à nouveau hier. La défense de Karim Wade voulait l’entendre sur son passage à l’émission « Opinion ». La Cour n’a pas autorisé le visionnage l’émission.
Après les auditions de Me Mamadou Diop et El Hadj Malick Sy, Cheikh Diallo est revenu hier à la barre de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei). Les conseils de Karim Wade l’ont cité à nouveau pour l’entendre à propos de l’émission « Opinion ». Lors de cette émission diffusée sur la chaîne privée Walf TV, le 18 novembre 2012, l’ex-directeur général de Cd-média, société éditrice du défunt journal « Le Pays », revendiquait la propriété du groupe de presse. La défense voulait visionner le film, avant de passer aux questions.
Leur souhait s’est heurté au refus de la Cour. Le président Henry Grégoire Diop a demandé à la défense de poser directement ses questions, d’autant qu’elle a produit un procès-verbal de constat à cet effet. Les avocats n’ont pas voulu l’entendre de cette oreille. Pour convaincre la Cour, Me Seydou Diagne a expliqué qu’ils ont versé le PV, parce qu’ils ne disposent que d’un seul exemplaire et il s’agit d’un document non coté. Mieux, Me Demba Ciré Bathily a estimé que ce n’est pas à la Cour de leur dicter la manière dont ils doivent procéder. « Qu’on le veuille ou non, il y a plusieurs impératifs. Nous sommes devant une juridiction d’exception et nous voulons que les choses se fassent de façon exemplaire », a ajouté Me Amadou Sall. Sur sa lancée, l’avocat a rappelé que s’ils ont demandé à disposer du matériel, c’est pour pouvoir visionner.
Battant en brèche les arguments de la défense, le procureur spécial s’est demandé si la Cour est autorisée à diffuser le document qui est la propriété d’une télévision privée. Alioune Ndao n’a pas vu l’utilité de diffuser le film, dans la mesure où, a-t-il argué, « il n’a été question de CD-média que lorsque l’animateur présentait Cheikh Diallo ». Il a aussi jugé le débat inutile, d’autant que la Cour a déjà tranché et qu’elle ne devrait pas se dédire. Son adjoint Antoine Diome et Me Yérim Thiam ont abondé dans le même sens en demandant à la défense de poser directement ses questions.
Cette position du parquet spécial a irrité Me Bathily. «Ce ne sont pas des faveurs que nous quémandons, mais des droits. Il n’appartient pas au parquet spécial de discuter de la pertinence d’un élément qui nous décharge », a répliqué l’avocat. Avant de s’emporter : « Vous voyez les peines que nous encourons et on nous refuse 45 minutes ». Reprenant la parole avec un ton beaucoup plus conciliateur, Me Sall a lancé au président : « On ne vous demande pas de vous dédire, mais de reconsidérer votre décision ». Mais à la reprise, la Cour a campé sur ses positions. Jetant l’éponge, Me Demba Ciré Bathily a demandé au témoin s’il maintenait les propos tenus lors de l’émission. L’ancien Dg de CD Media a répondu par l’affirmative.
S’il avait confié que la CREI violait la loi, en s’attaquant à Karim Wade, à la barre il s’est rétracté. «C'était en 2012 que j'ai tenu ces propos. Aujourd’hui, le contexte n'est pas le même». A Me Seydou Diagne, le journaliste dira que la société CD Media est de la propriété exclusive de Karim Wade.
Me El Hadj Diouf prend la défense du témoin
Ensuite, prenant la parole à son tour pour faire des observations, Me El Hadj Diouf a violemment défendu le témoin qui, à l’en croire, était malmené par ses confrères de l’autre camp. «Des prévenus refusent de répondre et on veut dire au témoin qu'il a l'obligation de répondre. C’est du terrorisme pur et dur. On insulte la Cour et on me demande de me taire», a crié Me Diouf, faisant allusion au refus des prévenus de répondre aux questions de la Cour.
Le député a alors demandé à Cheikh Diallo s’il était venu charger ou décharger le prévenu. En guise de réponse, le témoin a confié à la Cour qu’il n’allait pas passer six mois en prison, s’il avait voulu incriminer Karim Wade. «Je suis allé en prison pour trois millions qui équivalent aux actions (30%) que Karim Wade m’avait données», a-t-il déclaré. «J’ai énormément perdu, à cause de ces six mois de détention préventive».
NDEYE AWA BEYE et FATOU SY