Le temps de la rupture
Israël en veut à mort au Sénégal pour avoir initié la résolution condamnant la colonisation juive en territoire palestinien. En représailles, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a rappelé l’Ambassadeur de son pays à Dakar. Il a aussi décidé de mettre fin à tous les programmes d’aide en faveur de Sénégal. Des mesures qui sont loin de peser sur le destin du pays de la Teranga.
‘’Les relations entre Israël et le Sénégal sont merveilleuses, et nous ferons tout afin qu’elles fleurissent davantage’’, dixit le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu en septembre dernier. Mais ce vœu risque de ne pas se réaliser. Car, depuis vendredi dernier, les relations entre les deux pays ne sont plus au beau fixe. Du fait de la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies 2334 appelant à mettre fin à la colonisation juive en ‘’territoire palestinien occupé’’. L’Etat hébreux n’a pas apprécié que le Sénégal ait porté et voté la résolution et obtenu son adoption par les Nations unies. Tel Aviv a du mal à digérer la pilule et en veut aux autres pays qui ont voté OUI. Pour manifester sa désapprobation, Israël a rappelé son Ambassadeur au Sénégal. Il en a fait pour une dizaine de pays dont la France, la Chine, la Russie, la Grande-Bretagne, l’Espagne, l’Egypte, le Japon, l’Ukraine, l’Angola, l’Uruguay et la Nouvelle-Zélande. Mais avec le Sénégal, le gouvernement de Benjamin Netanyahu ne s’est pas limité à rappeler son diplomate mais il a également annulé la visite que le ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur Mankeur Ndiaye devait effectuer à Tel Aviv le mois prochain.
Aminata Touré (Ancien Pm) ‘’Tant pis pour Israël…’’
Pour couronner le tout, Israël a aussi décidé de suspendre tous les programmes d’aide en faveur du pays de la Teranga. Mais cette radicalisation du gouvernement Netanyahu ne semble pas ébranler l’Etat du Sénégal dont la position est hautement saluée sur les différents réseaux sociaux. Au plus haut niveau, le gouvernement a défendu sa position. ‘’Le Sénégal a tenu à être conforme à sa vision de la diplomatie. Depuis 1975, il préside le comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien. Ce n'est pas parce que le Sénégal soutient le peuple palestinien qu'il est contre Israël’’, justifie Seydou Guèye, sur le plateau de la RTS1.
Embouchant la même trompette, l’ancien chef du gouvernement n’a pas mis de gants pour rappeler à Israël que le Sénégal n’entend pas faillir. ‘’Tout ce qui est demandé à Israël encore une fois, c'est de se conformer au droit international comme le font tous les pays civilisés. Point final (…). Tant pis pour lui, tant pis de n'avoir pas compris que nous sommes un pays ouvert, pas grand, pas riche mais qui ne se laisse pas marcher sur les pieds’’, écrit Aminata Touré sur sa page Facebook.
Elle ajoute sur le même ton : ‘’L'Etat hébreu qui se croit depuis si longtemps au-dessus des lois internationales doit bien comprendre que le Sénégal ne l'a pas attendu pour résolument s'engager dans la voie de son émergence et ne saurait être impressionné par les états d'âme de Netanyahou.’’ L’Envoyée spéciale du Chef de l’Etat n’a pas du tout tort en faisant ce rappel puisque sur le plan économique, Israël ne figure pas parmi les partenaires privilégiés du Sénégal. Il s’y ajoute que les relations commerciales avec l’Etat hébreu se chiffrent à une centaine de millions de dollars, selon une évaluation faite en février dernier par l’Ambassadeur israélien Paul Hirschson. Ce dernier s’était même désolé devant nos confrères de l’Agence de presse sénégalaise que ‘’les investisseurs israéliens ne soient pas très présents en Afrique de l’Ouest surtout au Sénégal, sachant que les 50% des échanges commerciaux avec l’Afrique sont concentrés en Afrique du Sud’’.
Dans le domaine agricole, avec notamment le développement de la production horticole par le système goutte-à-goutte, la coopération était à ses premiers pas. Encore que le projet d’appui au programme national d’investissement de l’agriculture du Sénégal (PASEN) mis sur pied dans ce cadre compte aussi avec le soutien de l’Italie. Cependant, c’est dans le domaine sécuritaire, notamment avec les renseignements, qu’on peut réellement jauger les relations entre les deux pays. Car une véritable coopération était nouée grâce au Mossad, (service de renseignements israélien).
C’est dire que Israël n’a pas beaucoup de moyens de pression sur le Sénégal comme la France, les USA où la Turquie. Ce dernier pays a récemment poussé le Sénégal à revenir sur sa décision en confiant la gestion des établissements Yavuz Selim à la Fondation Maarif contrôlée par le régime de Tayip Erdogan. Ce qui fait dire à Aminata Touré que ‘’l'intelligence diplomatique aurait suggéré, dans l'optique du dialogue des religions, que Israël essaye de maintenir de bonnes relations avec notre pays connu pour son Islam de tolérance’’.
FATOU SY