Dakar et l’omniprésence de la schizophrénie
La Journée mondiale de la santé mentale a été célébrée, hier. À cette occasion, au centre Délossi, le médecin psychiatre Mouhamed Coulibaly a invité les populations à la déstigmatisation, à faire consulter à temps les patients et à pérenniser leur suivi. D'après lui, beaucoup de personnes souffrant de troubles mentaux qui errent à Dakar sont touchées par la schizophrénie.
Une bonne partie des malades mentaux errant au Sénégal, notamment à Dakar, sont atteints de schizophrénie, selon le docteur Mouhamed Coulibaly, médecin psychiatre au Centre hospitalier national psychiatrique de Thiaroye. Il s'exprimait, hier, au centre Delossi Keur Serigne Babacar Kane, en marge de la Journée de mondiale de la santé mentale.
Qu'est-ce que la schizophrénie ? Elle se manifeste par l'expression de pensées ou d'expériences qui semblent entièrement déconnectées de la réalité, accompagnées d'un discours ou d'un comportement désorganisé, ainsi que d'une participation réduite aux activités quotidiennes. Des problèmes de concentration et des perturbations de la mémoire peuvent également survenir.
Ainsi, selon les spécialistes, ''le patient est moins attentif, présente des difficultés à se concentrer, mémoriser, comprendre ou se faire comprendre. Il peut avoir des difficultés à planifier des tâches simples comme faire son travail ou des courses, ce qui peut être source d'un handicap majeur dans la vie quotidienne''.
Le Dr Coulibaly déclare : "Les malades mentaux sont souvent victimes de stigmatisation et sont laissés en marge de la société. Ils subissent plus de violence qu'ils n'en font subir. La stigmatisation est un frein dans la prise en charge de ces patients."
Pour le médecin, la première forme de violence vécue par ces patients est d'être exclus de la société, marginalisés et ne pas recevoir les soins nécessaires.
Ainsi, l'organisation de cette journée est l'occasion de sensibiliser les populations et les pouvoirs publics à la question de la santé mentale. Il s'agit de faire prendre conscience de l'importance d'accorder une attention particulière à ces malades mentaux errant qui viennent souvent de familles, mais qui sont livrés à eux-mêmes.
"Durant cette Journée mondiale de la santé mentale, les populations sont invitées à passer un moment en compagnie de personnes exclues de la société, pour discuter de la question de la santé mentale en présence d'un professionnel de la santé mentale et d'un enseignant-chercheur, afin de mieux sensibiliser", explique Ameth Daff, initiateur du centre Délossi. "Beaucoup de gens, poursuit-il, ne considèrent pas ces personnes comme des êtres humains. Ce sont les oubliés de la société. On les laisse manger dans des poubelles et vivre dans la rue", s'indigne M. Daff.
Création d'un centre de santé mentale de proximité
Selon lui, si d'autres couches vulnérables sont soutenues, ce n'est pas le cas pour les malades mentaux. Il propose donc la création d'un centre de santé mentale de proximité. Étant donné que tout ne peut pas être accompli en une seule journée, une caravane de sensibilisation a été organisée avec la distribution de flyers, les 8 et 9 octobre, par M. Daff et Cie.
Le centre Delossi accueille 14 pensionnaires. Il vient en aide aux personnes souffrant d’un handicap mental. Ces dernières sont récupérées dans les rues ou au niveau des sapeurs-pompiers. "Ces malades ont un trouble psychiatrique, mais des maladies physiques peuvent les attaquer à tout moment. Quand nous recevons un patient, il y a deux choses à faire. D'abord, nous l'amenons à l'hôpital pour une prise de sang, afin d'avoir un bilan de santé physique, avant d'évaluer son état mental", explique Ameth Daff.
"La maladie mentale tue très rarement. La grande majorité des décès survient à cause de maladies physiques associées", poursuit-il.
À Keur Babacar Kane, le personnel fait avec les moyens du bord pour assurer des soins adéquats. Mais à Delossi, bâtisse fatiguée, les conditions apparaissent malsaines, donnant à penser qu'il ne s'agit pas d'un centre de soins. On a l'impression que l'endroit est abandonné. Il est temps de se préoccuper des malades mentaux qui font partie de cette société.
BABACAR SY SEYE