Publié le 13 Aug 2015 - 09:35
SERIE DE MEURTRE DE SENEGALAIS A L’ETRANGER

Le silence coupable des autorités

 

Combien de Sénégalais ont été tués à l’étranger ces dernières années ? Mystère ! Car jusqu’à présent, aucun chiffre officiel n’est disponible sur le sujet. En tout cas,  la série macabre se poursuit au sein de la communauté sénégalaise établie à l’étranger. Et avant-hier encore, un Sénégalais de 50 ans du nom de Mor Sylla, originaire de Mbour a perdu la vie à Salou, en Catalogne dans des circonstances troublantes. Alors que la police espagnole impute cette mort  au défunt qui a sauté du troisième  étage pour échapper à la perquisition de son domicile, ses compatriotes eux parlent de meurtre. D’ailleurs ils ont organisé hier une marche pour exiger que toute la lumière soit faite sur cette affaire.

 En réalité, la liste de nos compatriotes assassinés à l’étranger au cours de ces dernières années est longue. De l’Italie aux USA, en passant par l’Espagne, la Grèce, la Mauritanie, le Maroc, Gabon…, il ne se passe plus une année sans que la presse ne fasse état du meurtre d’un de nos compatriotes. Se posent alors avec acuité les causes voire mobiles de tels crimes. Certes, il y a longtemps que l’émigration n’est plus ce qu’elle était. La crise économique qui sévit dans le monde a engendré la montée de la xénophobie dans bien de pays d’accueil. Désormais l’étranger est vu comme un usurpateur d’emploi ; un ‘’utilisateur éhonté’’ des services sociaux et de santé, un pollueur...

Il faut donc se rendre à l’évidence. Avec les effets conjugués de la crise socio-économique, le ciel n’est plus clément ailleurs. Que ce soit en Europe, aux Usa ou en Afrique, les exemples de jeunes Sénégalais qui se cassent la figure sont légion. Mais quand les meurtres s’y mêlent, la pilule devient plus dure à avaler. Il appartient dès lors à l’Etat de veiller sur ses compatriotes  établis à l’étranger. Car on ne le dira jamais assez : l’apport des travailleurs immigrés dans l’économie nationale est incommensurable. Si dans  certaines  contrées du Sénégal l’on ne meurt pas encore de faim, c’est en grande partie dû aux envois financiers de ces derniers. L’Etat a donc un devoir de protection et surtout d’assistance sur ses immigrés.

Aujourd’hui, beaucoup de dossiers relatifs à des cas  meurtres dont sont victimes des compatriotes  sont en souffrance. Qu’il suffise de citer les assassinats de Mor Diop et Modou Samb en Italie, Ismaila Faye à Rabat, Charles Ndour à Tanger (Maroc), Moustapha Kebe au Gabon, Magatte Fall à Almeria, Abdoulaye Mbengue à Palma de Mallorca, Aliou Ba à Vicar del mar,  Mamadou Gueye à Barcelone (Espagne). Dans tous ces cas, on n’a pas senti l’assistance juridique de l’Etat. Conséquence : la plupart de ces dossiers dorment dans les tiroirs. Alors qu’il incombait à nos autorités consulaires et diplomatiques de peser de tout leur poids pour que les auteurs de ces assassinats soient jugés et condamnés et les familles des victimes dédommagées.

Il urge donc aujourd’hui de revoir notre politique migratoire surtout dans son volet juridique. Car, en dépit de la crise économique en occident ou ailleurs en Afrique, ils sont nombreux les jeunes Sénégalais à persister et à croire que le bonheur qui leur échappe est de l’autre côté de nos frontières.

Ibrahima Khalil Wade

 

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