Publié le 8 Jul 2014 - 14:49
SUPPRESION DU POSTE DE PM

L’Apr presque convaincue, les alliés sceptiques 

 

Le limogeage du Premier ministre Aminata Touré par le président de la République et son remplacement par Mouhamed Dionne repose le débat sur l’utilité de cette station « maudite » dans l’architecture institutionnel.

 

Après seulement deux ans passés à la tête de la magistrature suprême, le président de la République, Macky Sall en est à son troisième Premier ministre. Une ‘’instabilité institutionnelle’’ qui met en cause le poste de chef de gouvernement considéré aujourd’hui par certains comme une ‘’station maudite’’. Faut-il le garder ou le supprimer ? Pour Youssou Touré, nouveau secrétaire d’Etat à l’Alphabétisation et à la Promotion des langues nationales (NDLR : interrogé avant sa nomination), il n’y a pas à réfléchir midi à 14h, ‘’il faut le supprimer’’. « Ce poste de PM ne fait que créer une dualité au sommet de l’État qui peut amener des crises à notre démocratie’’.

Ce point de vue est partagé avec beaucoup de ses camarades de parti. Premier à théoriser la suppression de cette station, Mame Mbaye Ndiaye, dans un entretien paru dans les colonnes de EnQuête le 3 janvier 2014 dernier, constatait que ‘’la fonction de PM est génératrice d’ambitions et donc de conflits’’. Rien que de ce point de vue, elle mérite selon lui d’être supprimée. Embouchant la même trompète, le président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar est monté au créneau quelques jours plus tard pour enfoncer le clou. Selon Moustapha Diakhaté, ‘’le quinquennat que souhaite instaurer le président de la République Macky Sall ne rime pas avec un bicéphalisme dans l'Exécutif’’.

Le débat ainsi posé, les langues se délient. Certains allant même jusqu’à soutenir que ‘’le poste de PM en tant que tel n’est pas une institution’’. ‘’C’est le gouvernement du Sénégal qui est une institution et le poste de PM est une désignation d’un leader pour diriger le gouvernement’’, soutient ce responsable de l’APR sous le couvert de l’anonymat. Avant d’ajouter : ‘’politiquement, Macky Sall a intérêt à supprimer le poste de PM car son type de management n’a pas besoin d’un PM’’.

Loin de partager cet avis, le Secrétaire général de la Ligue démocratique rappelle que ‘’nous sommes dans le cadre d’un régime présidentiel où il y a toujours ce poste qui, non seulement permet au président de la République de prendre un peu de recul par rapport à la politique quotidienne, de développer une vision mais aussi de pouvoir apprécier les problèmes auxquels le pays est confronté et les remèdes à apporter’’.

‘’C’est très important pour la direction des affaires de l’Etat en tant que tel que d’être plongé dans la quotidienneté’’, estime Mamadou Ndoye selon qui, ‘’le PM doit par contre prendre cette quotidienneté dans le cadre de l’exécutif et de façon à se mettre en avant comme une sorte de chef d’équipe gouvernementale’’. Pour Mamadou Ndoye, ‘’l’utilité du poste de PM réside dans ce décalage qui permet au président de la République réellement d’avoir une vision globale et de pouvoir jouer son rôle d’arbitre en tant que chef de l’Etat’’.

Dans l’histoire politique du pays, les relations entre présidents de la République et Premiers ministres, ont toujours  étaient heurtées. Qu’il suffise de citer le bras de fer entre  Senghor et Mamadou Dia ou la suppression du poste de Premier ministre par Abdou Diouf qui ne parvenait plus à s’entendre avec son PM d’alors, Habib Thiam. Sans oublier Abdoulaye Wade qui, en l’espace de douze ans a eu six Pm successifs. Seulement, après avoir supprimé le poste de PM le président Abdou Diouf avait vite fait de le rétablir. Parce que, souligne Mamadou Ndoye, ‘’il s’était mis en situation de risque’’. ‘’Quand le président de la République supprime le poste de PM, il sait qu’il se met au devant de la scène et dans ce cas les risques de prendre un certain nombre de coups sont trop grands’’, estime-t-il.

Prévu dans le dispositif constitutionnel en vigueur, le poste de PM n’est pas en tant que tel un problème. Selon le porte-parole du Parti socialiste, ‘’c’est plutôt la culture politique, l’esprit républicain et démocratique, les valeurs et les principes qu’ont les hommes aux postes de responsabilité qui posent problème’’. Pour Abdoulaye Wilane, ‘’au moment où il est désormais souhaité qu’un président de la République ne soit plus chef de parti, il ne peut pas être forcément quelqu’un qui s’occupe de gestion au quotidien de la politique gouvernementale’’. Dans un pays comme le notre, ‘’la politique, quand on est aux responsabilités gouvernementales, requiert une attitude faite d’élégance et de courtoisie’’.

De son côté, Seydou Gueye, porte-parole de l’Alliance pour la République (APR) est d’avis que « quand on a l’avantage d’avoir un homme qui a les expériences de part et d’autre, il faut lui laisser le choix de définir le schéma institutionnel qui lui semble le plus efficace pour pousser le pays vers l’émergence’’. 

ASSANE MBAYE

 

 

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