Le procureur de Ziguinchor enfonce les personnes arrêtées
Le journaliste René Capain Bassène aurait-il planifié et exécuté l’attaque du 6 janvier dernier qui a fait 14 tués et 7 blessés dans la forêt de Boffa-Bayottes ? Tout porte à le croire. Du moins, si l’on se fie à la déclaration, hier, du procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Ziguinchor.
‘’Il résulte de certaines déclarations que l’attaque du 6 janvier 2018 a été planifiée et exécutée par une personne dont nous tairons le nom, pour le compte de deux villages de la localité. La décision a été prise lors d’une réunion et l’opération a été menée par des personnes de la localité avec un renfort d’hommes sous les ordres d’un lieutenant d’une faction qui s’est déplacé spécialement pour l’exécution de la tâche’’, a déclaré, hier, le procureur de la République près le Tribunal de grande instance (Tgi) de Ziguinchor, lors du point de presse conjoint organisé avec la gendarmerie.
Selon le maître des poursuites Alioune Abdoulaye Sylla, ‘’la suite de l’enquête a permis d’identifier et de garder à vue celui qui aurait planifié toute l’opération et 15 autres personnes supposées avoir pris une part active dans les faits, objet de la présente procédure’’.
A en croire le maître des poursuites, après l’attaque du 6 janvier dernier, la prise en main de l’enquête, par la gendarmerie nationale, sous la direction du procureur de la République, a très vite permis une avancée significative dans les investigations. Et la synthèse des informations recueillies par des moyens humains et techniques par la section de recherches a vite mené vers des personnes de la localité de Toubacouta et vers un cantonnement d’une faction rebelle.
‘’Les premières auditions réalisées et les données techniques recueillies ont donné une tournure décisive à l’enquête’’, explique le procureur de la République. M. Sylla révèle qu’à cette fin, une partie des armes, munitions et tenues serait venue des bases rebelles d’un front. Et le reste de la logistique était détenu par des personnes habitant la localité de Toubacouta.
Alioune Abdoulaye Sylla a remercié, au terme de sa déclaration, tous ceux qui ont apporté leur expertise à cette procédure et a rendu un hommage mérité à la gendarmerie nationale en général et à la section de recherches dirigée par le colonel Issa Diack et son équipe en particulier, pour leur professionnalisme, leur efficacité, leur discrétion et leur sens du devoir qui ont permis de réaliser, en un temps record, les résultats obtenus dans le strict respect de la procédure pénale, de la dignité humaine et des droits humains.
Même si l’information judiciaire se poursuit, tout laisse à penser qu’il s’agit bien du journaliste René Capain Bassène que le procureur général près le Tribunal de grande instance de Ziguinchor faisait allusion. Pour la simple raison qu’il a été inculpé le même jour avec 15 personnes de Toubacouta. A-t-il été le cerveau de ce massacre ? Les prochaines semaines édifieront l’opinion.
Le dimanche 14 janvier dernier, 15 personnes du village de Toubacouta, à une dizaine de kilomètres au sud de Ziguinchor, et le journaliste René Capain Bassène, en charge de la communication à l’Agence nationale pour la relance des activités socio-économiques en Casamance (Anrac), ont été placés sous mandat de dépôt et conduits à la Maison d’arrêt et de correction (Mac) de Ziguinchor. Neuf autres ont été libérées, faute de charges suffisantes à ce stade de la procédure. Une information judiciaire a été ouverte. Sous les préventions d’association de malfaiteurs, participation à un mouvement insurrectionnel, tentative d’assassinat, détention d’armes sans autorisation administrative, coups et blessures volontaires, vols en réunion et le mandat de dépôt requis, le juge d’instruction, après les avoir inculpées, les a placées sous mandat de dépôt. Le même jour, une délégation judiciaire prise par le juge d’instruction a permis, pour le moment, l’interpellation de 8 autres personnes qui lui ont été présentées ce mardi 23 janvier avant d’être inculpées et placées sous mandat de dépôt.
Le procureur se lave à grande eau Hier, le procureur a fait la genèse des événements ‘’catalyseurs’’ du massacre du 6 janvier dernier. Il explique que dans le courant du mois de novembre 2017, deux plaintes pour coups et blessures volontaires ayant entraîné des incapacités temporaires de travail respectives de 60 et de 10 jours avaient été déposées par deux exploitants forestiers au parquet du Tribunal de grande instance (Tgi) de Ziguinchor. L’enquête qui en avait résulté avait permis l’arrestation de quatre individus présumés appartenir à un comité de vigilance qui avaient été jugés et condamnés à une peine d’emprisonnement d’un mois sur le fondement de l’article 294 du Code pénal qui sanctionne les faits incriminés d’une peine allant de 1 à 5 ans. ‘’Il est important de préciser que la juridiction correctionnelle inscrivait cette peine d’une relative clémence dans une logique d’apaisement justifiée par une dynamique de rapprochement des parties évoluant toutes au sein d’une seule et même communauté’’, précise le procureur de la République. Ainsi, il s’est dédouané, en soulignant que le ministère public n’avait pas initié des poursuites contre les plaignants, en raison de la nature des faits qui auraient, en tout état de cause, nécessité une saisine préalable du directeur des Eaux et forêts ou de son représentant pour que des poursuites soient envisageables et recevables conformément aux articles L18 et 21 du Code forestier. |
HUBERT SAGNA (ZIGUINCHOR)