Idriss Déby charge la France
Le président tchadien n’a pas pris de gants pour accuser la France d’être à l’origine de l’instabilité de la Libye. Idriss Déby accuse aussi l’ex-puissance coloniale d’être à l’origine de l’insécurité qui prévaut dans le Sahel.
En invitant ses partenaires africains à ‘’sortir des sentiers battus’’ et ‘’se tenir un langage de vérité’’, le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian ne s’attendait certainement pas à ce que son pays soit la cible des attaques du président tchadien. Car, le panel qui a mis fin, hier, au Forum sur la Paix et la sécurité, a servi de cadre au président Idriss Deby Itno pour solder ses comptes avec l’ancienne puissance coloniale. Réagissant à l’intervention de son homologue sénégalais, Macky Sall qui a demandé à la France de ‘’finir le travail’’ déjà entamé en Libye, l’homme fort du Tchad a déclaré: ‘’La France a fini son travail. Car, l’objectif recherché de la France a été l’assassinat de Kadhafi.
Mais ce qu’elle n’a pas réussi, c’est le service après vente’’. Et le président Déby de dénoncer l’attitude de la France qui, selon lui, n’est mue que par ses intérêts. ‘’Aujourd’hui, Kadhafi est mort. La Libye est devenue le terreau des terroristes, des brigands. Les populations ne savent plus à quel saint se vouer. Les Nations unies qui ont donné le quitus à l’Otan sont responsables’’, charge Déby.
Si ce discours a été accueilli avec des salves d’applaudissements dans la salle, il a, par contre, surpris le ministre français de la Défense. Ce dernier dit ‘’constater la situation’’ comme tout le monde sans en dire plus.
Cette situation d’insécurité en Libye est d’autant plus préoccupante pour les chefs d’Etat africains qu’elle a fini par déstabiliser les pays voisins. ‘’Grâce à l’opération Barkhane, nous avons intercepté 3 tonnes d’armes en provenance de la Libye’’, renseigne le président malien Ibrahima Boubacar Keïta. Saluant le rôle joué par la France dans la lutte contre les jihadistes, le président malien a interpellé la communauté internationale sur la situation qui prévaut dans le Sahel. Car, dit-il, ‘’c’est notre modèle de civilisation qui est en jeu’’.
Ainsi, pour faire face à cette menace terroriste, le président sénégalais pense qu’il faut une ‘’approche sécuritaire globale’’. Avant d’appeler à une action concertée des échanges d’informations, à une harmonisation des législations et de l’entraide judiciaire et à la mutualisation des moyens avec les forces dotées d’équipement. Macky Sall juge inacceptable que l’Afrique ne puisse pas disposer d’une unité de 50 000 hommes pour gérer de manière rapide ses conflits. Un avis partagé par son homologue tchadien.
De l’avis d’Idriss Déby, l’insécurité en Afrique n’est qu’une question de volonté politique. ‘’On ne peut pas éternellement demander l’intervention de nos partenaires occidentaux. 60 ans après les indépendances, l’Afrique ne peut même pas assurer sa propre sécurité. Où est le sérieux ?’’ se demande le président tchadien, dont le pays préside d’ailleurs le conseil de sécurité des Nations unies. Mais, selon le président malien, cela suppose que l’Afrique règle d’abord un certain nombre de préalables. ‘’Il faut améliorer la bonne gouvernance, il faut une implication des jeunes et des femmes dans la gestion des affaires, régler la question du chômage, faire la promotion de la justice’’, préconise IBK.
DAOUDA GBAYA