Publié le 5 Jan 2015 - 13:46
LAC DE GUIERS - PREFELAG

Voyage au cœur d’un ambitieux projet de 13,9 milliards CFA

 

Sorte de ‘’poumon’’ hydraulique du Sénégal comme le Château d’eau de Dakar, le Lac de Guiers est bien méconnu des populations qui ne mesurent pas assez son caractère stratégique. EnQuête y a fait une incursion et un suivi sur plusieurs semaines, pour en faire sortir les différentes facettes, en suivant à la trace les méandres d’un projet ambitieux et structurant : le Projet de Restauration des Fonctions Ecologiques et Economiques du Lac de Guiers (PREFELAG) qui annonce déjà une aube nouvelle dans la partie nord du pays.

 

Richard-Toll. Dans cette ville du nord du Sénégal, située à 100 km de Saint-Louis, émerge un ambitieux projet. Le PREFELAG : Projet de Restauration des Fonctions Ecologiques et Economiques du Lac de Guiers. Initié par l’Office du Lac de Guiers (OLAG), ce programme de développement, financé principalement avec le concours du Groupe de la Banque Africaine de Développement (BAD),  figure au cœur du Plan Sénégal Emergent, et est estimé à 13,914 milliards, pour une durée de cinq ans. Une aubaine pour le Sénégal qui  explique bien le détour fort remarqué du Président Sall dans la zone, dans le cadre de sa tournée économique effectuée au nord du pays entre le  dimanche 26 et le jeudi 30 octobre

Le lundi 27 octobre 2014 marquait le lancement officiel des travaux. Un évènement présidé par le Président Macky Sall, accompagné par le ministre de l’Hydraulique et de l’Assainissement, Mansour Faye et le secrétaire d’Etat à l’hydraulique Diène Faye. Lancement officiel et effectif des travaux parce qu’en réalité, les activités du PREFELAG ont démarré depuis 2013, notamment par une anticipation fort judicieuse sur la préparation des différents dossiers d’Appels d’Offres, ce qui a permis de gagner du temps sur le calendrier d’exécution.

Durant ces derniers mois, plusieurs villages parmi lesquels Louguéré et Foss dans les communes rurales de Mbane et de Syer sur  les 31 villages visés par la première phase du programme d’Adduction d’Eau Potable (AEP) ont bénéficié d’une alimentation en eau. Une seconde phase est en cours pour  20 autres villages et le programme ambitionne de donner de l’eau potable aux 177 villages recensés autour de la dépression lacustre.

Bravant les chauds rayons de soleil, tout Richard-Toll avait gagné le pont de la Taouey pour assister à l’événement. C’est dire que la population attend beaucoup du PREFELAG et le manifeste de jour en jour aux autorités en charge du projet.

Magaye Yama Sarr, président de l’Union des usagers de la commune de Mbane, est des plus optimistes. ‘’Si le projet connaît une réussite, c’est indéniable que nos conditions de vie vont s’améliorer. Il y aura de l’eau potable pour tous les villages. On aura de meilleures récoltes. Et il y aura du travail pour les jeunes de la localité qui souffrent du chômage’’, espère le quinquagénaire.

L’Objectif global du PREFELAG

Magaye Yama Sarr a raison d’espérer. D’être optimiste. Ce projet mis en œuvre pour une durée de cinq ans (2014-2018) aura pour objectif principal la restauration des conditions hydrologiques et des écosystèmes du système du lac de Guiers afin de contribuer à une croissance plus inclusive dans les régions de Saint-Louis et de Louga. M. Amadou Bocoum, Coordonnateur du PREFELAG et Directeur Général de l’Office du Lac de Guiers (OLAG) explique : ‘’L’impact de ce projet se ressentira sur plusieurs secteurs.

Les effets attendus sont multiples. Par exemple, on s’attend à une amélioration de l’accès à l’eau au profit de plus de 4 millions de personnes à Dakar, le long des conduites ALG et au niveau des villages riverains ainsi que l’abreuvement de près d’un million de têtes de bétail. Il y aura une baisse sensible du coût de production de l’eau. Le taux d’accès à l’eau potable passera de 48% en 2013 à 90% en 2018. Soit pratiquement du simple au double. Même chose pour le taux d’accès à l’assainissement qui sera augmenté de 34% à 70% en 2018’’.

Ces prévisions, en ces temps de pénuries d’eau dans plusieurs quartiers de la capitale, peuvent suffire à redonner le sourire. Ce n’est pourtant pas un centième des avancées qu’apportera le PREFELAG.

Concernant l’élevage par exemple, grâce à de meilleures conditions de l’abreuvement des bétails, les bénéfices tirés de cette activité seront accrus jusqu’à 530 millions F CFA par an. La pêche va tirer également profit de cette restauration des fonctions écologiques et économiques du Lac de Guiers avec la hausse jusqu’à 20% de ses revenus.

La production halieutique devrait passer de 2000 à 4000 tonnes/an. Enfin, l’agriculture, un des principaux secteurs qui occupent les jeunes du Walo, bénéficiera d’au moins 30 000 ha de terres irrigables. Toutes ces activités auront un effet positif sur l’emploi des jeunes. En effet, d’ici cinq ans, dans cette partie nord du Sénégal où le chômage n’épargne pas la jeunesse, au moins 3000 emplois ruraux seront créés au profit des jeunes et des femmes. Et les 1000 seront des emplois verts.

Autre point saillant du projet, souligne M. Sidy FALL, le Directeur technique de l’OLAG et responsable technique du projet,  le retrait de la réserve du Ndiaël du registre de Montreux (sites en danger) et son maintien sur la liste des sites RAMSAR (Zones humides d’importance internationale). ‘’On veut faire du Ndiael, un Djoudji (le parc) bis. Ce sera une réserve touristique génératrice de revenus’’, assure-t-il.

Les composantes du projet

Pour atteindre les objectifs de ce projet dans les délais fixés, trois composantes ont été établies. La première consiste à l’amélioration du système hydrologique du système de Lac de Guiers.

Durant cette phase, plusieurs travaux de réhabilitation seront opérés. La réhabilitation constituera l’essentiel des activités. Des activités divisées en cinq temps. Le premier concernera le curage de chenal de la Taouey sur 17 km, l’enlèvement des végétaux aquatiques (30 ha), à la réhabilitation d’ouvrages de régulation et de digues de protection. Le second temps sera notamment celui du Curage du chenal de Yeti Yone (13 km).

Le troisième enregistrera non seulement la réalisation de digues de protection (14 km), d’un axe de navigation (7 km), de nichoirs (2), de pistes de désenclavement (7 km), de pare-feu (400 km), de postes de garde (3), de miradors (3), mais aussi la construction de débarcadères (2). Enfin pour les quatrième et cinquième temps, l’accent sera mis sur l’installation d’équipements hydrométriques, à la mise en place d’un observatoire scientifique, à l’extension du réseau AEP (90 km), à la réalisation d’ouvrages d’assainissement (166) et d’abreuvoirs pour le bétail (12).

Après la phase des travaux, la seconde phase sera axée sur le renforcement des capacités et l’appui aux initiatives économiques. Deux activités essentielles la composent. D’abord la formation des bénéficiaires (800 personnes dont 200 femmes) et personnels (20) et la mise en œuvre d’activités pilotes génératrices de revenus (écotourisme, mini-laiterie, transformation de produits agricoles).

Enfin la troisième phase, la composante III, est celle de la gestion du projet. Elle a donc démarré depuis le début. Elle consistait à la mise en place du comité de pilotage du projet.

Presque 6 milliards déjà engagés

Si le président de la République a officiellement lancé le démarrage des travaux du PREFELAG, en réalité ceux-ci ont commencé depuis le mois de mai passé. C’est Madame Aminata Touré, Premier ministre de l’époque, qui avait présidé la cérémonie. ‘’Ce projet est l’occasion pour l’état de réparer une injustice faite aux populations riveraines du lac de Guiers qui, jusque-là, n’ont pas accès à l’eau potable alors que vivant autour de la plus importante réserve d’eau douce du pays’’, avait-elle déclaré.

Avant elle, le Président Macky Sall avait déjà promis de réparer cette injustice à l’occasion du Conseil des ministres délocalisé de Louga, du 20 décembre 2012. Depuis, les plusieurs travaux ont démarré.

Les travaux lancés ce 27  octobre 2014 par le chef de l’Etat se chiffrent à de 5, 800 milliards (soit 42% du budget). Parmi ces réalisations, on peut citer le curage de la Taouey sur 17 km donc les études d’exécution viennent d’être achevées. L’obstruction des points d’accès au lac par les végétaux aquatiques (Typha) est un vieux souvenir pour les populations de Témey Toucouleur, Mbane, Ndiakhaye, Foss, Guidick, Syer 3, Malatack et Diaminar Keur Kane. Sans pour autant oublier, les trois points d’abreuvement du bétail situés sur l’axe Mbane-Syer, qui accueillent des milliers de bovins par jour en provenance du Ferlo.

Il y a aussi l’aménagement de Yéti Yone, la réhabilitation des digues de Pakh, Fermeture, Bountou Bath, la digue Css à Temeye et des ouvrages annexes dont les études d’exécutions sont en cours. Enfin, dans le cadre de l’Alimentation en eau potable (AEP) des villages riverains, certains villages de la rive Est du Lac comme Louguéré (Mbane) Foss (Syer) bénéficient déjà de l’eau potable.

En chiffres

Budget global: 13, 943 milliards FCFA

• Prêt FAD : 80,3% budget

• Contrepartie Etat : 15,1% Budget

• Don FEM : 4,6% budget

 

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