TAXAWU DAKAR
Après la défaite du 20 mars, Khalifa Sall et ses ouailles devront assumer leur statut d’opposants déclarés. Dakar risque d’être trop étroit pour cette cohabitation.
Les leçons d’un naufrage collectif
C’est la soupe aux grimaces au lendemain du référendum dans le camp de Taxawu Dakar. A l’image de leur leader défait, les Khalifa’s boys affichent la mine des mauvais jours. Ils ont tous été battus dans leurs fiefs et parfois jusque dans leur bureau de vote.
Avec une saveur de revanche, l’ex-Pm Aminata Touré a blanchi le scalp du maire de Dakar et éminente figure du NON. Le camp du OUI a eu la peau de Barth, tonitruant maire de Mermoz- Sacré-Cœur, mis en minorité sur cinq des six centres de vote de sa commune.
Dans le tableau de chasse du camp du OUI figurent d’autres proies non négligeables. Il faut mettre dans la besace le maire de la Médina Bamba Fall, thuriféraire du NON surpassé dans son propre bureau de vote à Gibraltar.
La défaite du maire Idrissa Diallo à Dalifort qui a déclaré ouvertement que le Ps aura son candidat à la prochaine présidentielle prend les allures d’un désaveu.
A la Patte d’Oie le maire Banda Diop, disciple du “Khalife”, est malmené dans les suffrages.
Aux Parcelles Assainies, le pouvoir a réussi son coup, en chassant en meute. Mbaye Ndiaye et le ministre des Finances Amadou Ba ont lavé l’affront des locales de 2014 infligé par Moussa Sy.
Deux “khalifa’s boys” ont réussi à sauver la face : les maires de Taxawu Dakar Alioune Ndoye de Dakar-Plateau et Jean Baptiste Diouf de Grand Dakar. Ils ont eu l’heur de suivre Ousmane Tanor Dieng dans la mouvance du OUI.
Au-delà des débâcles individuelles, ce référendum est un naufrage collectif pour Taxawu Dakar, stoppé net dans son élan.
Aux élections locales de 2014, cette entité politique était sortie auréolée de victoire. Sous la houlette de Khalifa Sall, une bande de jeunes maires avait réussi à soustraire de la tutelle du pouvoir les communes les plus riches de Dakar. Deux ans seulement après son arrivée en place, cette défaite a été un véritable choc pour le camp de Macky Sall.
De grosses pointures de l’APR se sont retrouvées sans légitimité politique à la base. Et du coup limogées du gouvernement : Mimi Touré, Mbaye Ndiaye, Seydou Guèye, entre autres.
Le coup de maître réussi par ‘’Taxawu Dakar’’ aux locales de 2014 a donc imposé cette coalition, sans structure formelle, comme une entité politique qui compte dans l’espace politique Sénégal. Et Khalifa Sall est devenu une sorte de parrain politique aux ambitions présidentielles.
Bas les masques
Fort de leur légitimité populaire, Barth et Cie se sont posés de facto en contre-pouvoir local face au gouvernement central. Il y a eu plusieurs passes d’armes. L’acte III de la décentralisation a été une lancinante pomme de discorde entre l’Exécutif et les mairies contrôlées par Taxawu Dakar. Pour les partisans de Khalifa Sall, l’acte III n’est qu’un subterfuge politique pour contenir le maire de la capitale. Les relations sont restées tendues entre l’Exécutif et les élus locaux. En témoigne la récente bataille de la Place de l’Indépendance entre l’édile de la capitale et le ministre Diène Farba.
Quelles leçons tirer pour Taxawu Dakar après la victoire du OUI au référendum ? Ses maires s’étaient impliqués corps et âme dans la campagne pour le NON. Ils se sont posés en indignés du système Macky, fustigeant le “wax waxeet”.
Cette campagne pour le NON était en réalité une bataille de positionnement pour Khalifa Sall et ses maires souteneurs. Un sorte de rodage avant les législatives de 2017 et la Présidentielle de 2019. Le maire de la capitale qui, jusque-là, avançait masqué, doit désormais assumer son destin d’opposant. Il est allé trop loin pour reculer.
Abdou Rahmane MBENGUE