‘’Le risque encouru par le gérant est de voir son établissement fermé’’
Les mineurs fréquentent de plus en plus les boîtes de nuit. Le chef de la Brigade des Mœurs, le Lieutenant Sène, a accepté de s’exprimer sur le travail mené par son service. Dans cet entretien, il revient sur les sanctions prévues contre les établissements qui ne se conforment pas aux règles. Les parents aussi ont leur part.
Comment est-ce que la Brigade des Mœurs travaille pour s’assurer qu’il n’y ait pas de mineurs dans les boîtes de nuit ?
Il faut retenir que l’accès des mineurs dans les débits de boisson est interdit. Pour nous, les mineurs vont de 0 à 18 ans non révolus. Parmi eux, ce qui nous intéresse le plus, pour le cas d’espèce, c’est la tranche d’âge de 13 à 18 ans. L’accès est contrôlé. Vous savez, la réglementation existe, mais du fait de l’ignorance ou de la volonté de l’individu de se comporter autrement, cela peut conduire à des cas de violations des dispositions en vigueur. Il est évident que la police n’est pas omniprésente, mais au cours des interventions ou patrouilles, si nous tombons sur un cas pareil, nous nous opposons à cela.
Combien d’infractions sont notées par année ?
Il est difficile d’avancer des chiffres. Il y en a, mais c’est rare. Vous pouvez présumer que quelqu’un est mineur de par sa physionomie. Mais quand il vous présente une carte d’identité justifiant nettement que le document s’applique à lui, vous n’avez pas d’autres solutions.
Dans notre reportage, des ados de 14 ans ont avoué leur présence fréquente dans les boîtes de nuit. Y a-t-il des sanctions prévues ?
Il est possible que cela se passe quelque part. C’est la période des vacances et des spectacles de divertissements sont régulièrement organisés. La police ne peut pas être partout. Toutefois, retenez que celui qui doit assurer la police de son service, c’est d’abord le gérant. A défaut de la présence policière qui ne fait qu’accompagner les usagers, le premier responsable, c’est le gérant. Il y a de ces boîtes où le contrôle est strict, surtout au niveau des Almadies. Je ne ferai pas leur publicité. Les tenanciers de ces commerces ne badinent pas avec cela.
Par contre, il y a des boîtes dont les gérants sont moins regardants. A propos des sanctions, il faut comprendre que tout responsable qui reçoit des mineurs dans son établissement s’expose à la fermeture de son commerce. Si l’accès des mineurs est constaté, à défaut d’être conduit à la Police pour les besoins de l’enquête, le gérant est convoqué. A l’issue, un rapport écrit est adressé au préfet territorialement concerné. Alors, cette autorité administrative peut prononcer la fermeture temporaire de l’établissement. Soit une durée maximum de six (06) mois. Pendant la période considérée, le contrevenant devra continuer à payer à son personnel les salaires, indemnités et rémunérations de toute nature auxquels il avait droit jusqu’alors.
Dans la répression de l’ivresse publique et manifeste, il est prévu un emprisonnement de six (06) jours à un (01) mois et d’une amende de 3000 à 20 000 FCFA ou de l’une de ces peines seulement, au gérant qui aura fait boire jusqu’à l’ivresse un mineur de moins de 18 ans.
Que faites-vous des mineurs dans ce cas ?
Quand l’infraction est constatée, nous convoquons les parents de ces mineurs. Par mesure conservatoire, ce qui n’a rien à voir avec la garde à vue, le mineur est conduit au service et convocation est faite aux parents, parce que l’enfant ne peut pas être tenu pour responsable. Si par exemple le mineur a réussi à quitter l’univers familial pour une virée nocturne, le responsable de cette situation est le parent. Là, vous convoquez le parent qui sera bien sensibilisé sur le danger encouru par le mineur.
Quelle est la courbe de fréquentation des mineurs dans les boîtes?
Je sais qu’il y a beaucoup d’ouverture de débits de boissons, mais il faut considérer que ces derniers sont des endroits privés recevant du public. Ce domaine d’activités est défini et organisé par la Loi n°94-15 du 4 janvier 1994 et le Décret n°97-338 du 1er avril 1997. Au cours de nos interventions, très rarement, nous appréhendons des mineurs.
Quels sont les établissements les plus fréquentés par les mineurs ?
Le Brigade des Mœurs intervient à l’échelle régionale, donc elle peut se déployer jusqu’à Sébikhotane et Toubab Dialaw. Nous sommes censés intervenir sur toute l’étendue régionale. Mais nous focalisons la plupart de notre démarche au département de Dakar. À propos de la fréquentation, elle reste faible, car nous sommes sur le terrain et les cas découverts sont très rares. Sachez que la brigade, une fois sur le terrain, ne va pas occulter la présence d’un mineur dans un établissement. Cela n’est nullement toléré. Maintenant, c’est une disposition, il faudra trouver le corps de l’infraction, c’est-à-dire constater la présence d’un mineur dans un établissement. Même si nous ne trouvons pas de mineur, nous faisons de la prévention auprès des responsables des boîtes de nuit à ce qu’ils renforcent le contrôle sur l’accès par la justification de la pièce d’identité.
Est-ce qu’il vous est arrivé de fermer des établissements qui commettent des infractions ?
Sachez qu’il est plus habituel de voir un débit de boissons fermé à cause de sa proximité avec un lieu de culte, un établissement scolaire, de santé ou bien même à cause de troubles occasionnés au voisinage. Et pour de telles raisons, un bon nombre d’établissements a fermé. Il y a un travail à la base qui au bout permettra à l’autorité administrative d’apprécier. Celle-ci dispose d’un pouvoir discrétionnaire. Comme mission globale, la brigade a la charge de veiller à l’exercice de ces établissements qualifiés débits de boissons et sous cet angle, elle est regardante sur les cas de désagréments occasionnés, tels la pollution sonore, la circulation, sans oublier l’interdiction de l’accès des mineurs ou la vente de boisson alcoolisée à cette catégorie de personnes.
Si le responsable ou le gérant transgresse ces dispositions, il peut voir son établissement fermé. Pas plus tard que ce matin (mercredi 31 août), nous avons déféré quelqu’un pour ouverture et exploitation d’un débit de boissons sans autorisation administrative. Il a été interpellé hier dans la soirée et ce matin, il a été présenté au procureur de la République. La semaine dernière, au cours de notre patrouille, nous avons eu à arrêter deux dames dans une auberge en train de fumer du chanvre. Ce n’est pas uniquement une question de mineur, mais également de mœurs. Ceci étant dit, vous conviendriez avec moi que le travail de la brigade requiert de la discrétion.