Publié le 25 Oct 2017 - 18:30
DEUXIEME SESSION ORDINAIRE DU HCCT

Ousmane Tanor Dieng se lâche

 

C’était une véritable séance d’exorcisation. En plénière, hier, Ousmane Tanor Dieng, attaqué sur tous les fronts, y compris par ses propres conseillers, a remis les point sur les ‘’i’’, appelé à la mobilisation des troupes pour surmonter la montagne de difficultés qui attend cette institution nouvellement créée par le président de la République Macky Sall. Les passeports diplomatiques, les véhicules, le siège, les attaques… Tanor fait parler son cœur.

 

Le ‘’casse-tête’’ des sans-abri

‘’Nous avons des contraintes énormes. Elles sont principalement liées à la disponibilité des salles. Surtout pour la tenue des séances plénières. C’est vraiment très difficile de trouver à Dakar des lieux de réunion. J’en suis arrivé à croire que l’investissement le plus sûr se trouve dans la construction de salles pour les séminaires. Toutes les salles sont prises. Nous essayons de trouver des solutions, mais c’est un véritable problème, un casse-tête. J’en profite pour vous dire que je fais tout, avec l’appui du président de la République, pour faire avancer les travaux du siège. Comme vous le savez, c’est un siège qui était initialement prévu pour des appartements, une quarantaine ou une cinquantaine. Il faut en faire maintenant des bureaux. C’est extrêmement compliqué et coûteux, mais nous faisons tout pour que ça avance.’’

Le désespoir du président

‘’Dans un premier temps, on avait dit qu’il serait livré en avril, puis en mai, ensuite, il y a eu les législatives, pendant 3 à 4 mois où rien n’a été fait. Maintenant, ils ont recommencé les travaux. Mais ça traine encore. Ils disent qu’ils vont tout faire pour les terminer d’ici la fin de l’année, mais je n’y crois pas. Je ne pense pas que le chantier puisse être livré d’ici le mois de décembre. Les travaux risquent de prendre un peu plus de temps. C’est un gros problème, mais il faut faire avec. Nous devons faire preuve d’engagement et de patience. C’est d’ailleurs pourquoi je tiens à féliciter les présidents de commission, les rapporteurs et les membres des bureaux pour les efforts qu’ils font pour travailler dans des conditions à peu près normales, bien que nous soyons dans des conditions impossibles. On aurait pu choisir de ne rien faire, d’attendre qu’on termine les travaux du siège. Car ce n’est pas du tout évident de travailler dans ces conditions.’’

La mise en garde aux rebelles

‘’Pour les autres questions (les véhicules, les passeports, entre autres, NDLR), elles sont en voie de règlement. Par conséquent, il vaut mieux ne pas en parler. Cela les complique davantage. (Grognes et murmures dans la salle. Tanor hausse le ton et met en garde).

‘’Je vous avertis : parler de ces questions les complique. Comme on le dit : Kougnouy djign…’’ (les conseillers terminent la phrase)‘'… deum do sothio yèllou liir.’’

‘’Voilà, reprend Tanor. Discuter de cela sur la place publique, c’est nous rendre le plus mauvais service. Il ne faut pas que nous nous laissions entrainer dans une situation comme ça. Je vous le dis en toute connaissance de cause. Ce n’est pas à notre avantage. Le président, avec la pression de l’opinion, va finir par dire que pour ce qui concerne les véhicules, il arrête tout. Il n’autorisera aucune administration à acheter des véhicules. Donc, il ne faut pas nous signaler outre mesure. Si vous le faites, c’est Ok, mais ce qui en découlera, nous serons les responsables. Encore une fois, il n’y a pas de tabou, on peut parler de toutes les questions, mais il faut savoir où en parler, comment en parler.’’

‘’75 hauts conseillers sur les 150 ont déjà leur passeport’’

‘’Parfois, on pose n’importe comment des problèmes. Alors que certains de ces problèmes sont en voie de règlement ou presque résolus. Au moment où on parlait des passeports, la question était presque derrière nous. En effet, sur les 150 hauts conseillers, les 75 ont déjà leur passeport. Tout est en train d’être réglé progressivement. Mais il faut tout faire dans la discrétion, si nous voulons aboutir à ce que nous voulons. Le président a fait beaucoup d’efforts. Il faut savoir que beaucoup de choses qui sont faites le sont par dérogations. Ce n’est pas de droit. Je pense qu’il est important de le comprendre ainsi. C’est un tort de vouloir nous comparer à l’Assemblée nationale qui est un pouvoir. Comme le Judiciaire et l’Exécutif. Les députés ont des droits liés à leur statut. On ne peut pas se lever un jour et demander les mêmes droits. Ce n’est pas possible.

Voilà les conseils que je tenais à vous donner. Vous pouvez maintenant en faire ce que vous voulez, mais vous êtes avertis. La presse, on en a besoin. C’est bien, mais il ne faut pas qu’on se laisse manipuler. C’est à nos dépens.’’

Par rapport aux attaques, ‘’j’ai dit à mes enfants…’’

‘’Maintenant, vous savez que moi, je suis habitué aux critiques. Ça fait 40 ans que les gens disent des choses négatives sur ma personne. Je ne peux pas dire que cela ne me fait pas mal, mais j’ai appris à vivre avec. Je disais à mes enfants que si j’étais resté diplomate, on ne parlerait pas de moi. Mais quand on choisit de faire la politique, on ne peut refuser aux gens de parler de soi. Chacun a la liberté de dire ce qu’il pense. Il faut leur laisser avec leur conscience. Quand je n’occuperai plus de fonctions, on ne parlera plus de moi.’’

Le sacerdoce du HCCT

‘’En tant qu’assemblée consultative, nous sommes tenus de donner des avis motivés sur les politiques de décentralisation et d’aménagement des territoires. A ce titre, nous intervenons dans plusieurs domaines, notamment l’aménagement du territoire, la sécurisation foncière et la bonne gouvernance. Nous devons travailler pour le renforcement des collectivités territoriales, l’amélioration de la gestion des ressources naturelles et plusieurs autres problématiques liées au développement des territoires. C’est un véritable sacerdoce que nous avons, une mission exaltante avec des moyens limités.

‘’Si nous voulons arriver à des résultats probants, il faut de l’organisation et de la méthode. Chaque commission a hâte de faire quelque chose. Mais il faut concentrer nos efforts sur les préoccupations de l’heure. Eviter de trop embrasser pour mal étreindre. Quantité n’est pas forcément qualité.

‘’Pour la présente session, nous allons apporter notre contribution aux questions de l’emploi des jeunes, de l’emploi des femmes, faire des avis et recommandations au président de la République. Car nous sommes une institution chargée de conseiller le chef de l’Etat sur la décentralisation et l’aménagement du territoire. Le thème de cette session porte sur l’attractivité des territoires et la promotion de l’emploi. Ce sont des questions auxquelles le président accorde une importance particulière. D’ailleurs, il a demandé au Premier ministre de tenir une conférence nationale sur la même problématique, au mois de décembre prochain. Nous allons réfléchir et apporter notre contribution.’’

‘’La fin de mon mandat dépend du président’’

‘’C’est une confusion. La durée de mon mandat n’est pas liée à celle des membres du bureau qui est d’un an. Le président du Haut conseil n’est pas concerné par cette règle de l’annuité. La fin de mes fonctions dépend du président de la République. Il n’est soumis à aucun délai. Il peut y mettre un terme quand il veut.’’   

Mor Amar

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