Publié le 22 Jan 2018 - 17:48
SITUATION SOCIALE ET SÉCURITAIRE TENDUE

Ceinture de feu autour du pouvoir

 

Macky Sall et son régime doivent être ingénieux pour se tirer de cette situation sans séquelle. Outre le front social en pleine ébullition, le pouvoir doit faire face à la nouvelle donne en Casamance et à une campagne arachidière qui a du plomb dans les ailes. Sans oublier le dialogue politique au point mort et la volonté des magistrats de gagner leur indépendance.

 

A l’évidence, le régime du président Macky Sall traverse actuellement une mauvaise passe. Le gouvernement doit faire face à plusieurs urgences, acculé qu’il est de toute part. A ce jour, presque tous les syndicats d’enseignants ont déposé un préavis de grève. Certains ont déjà initié des mouvements, alors que d’autres se préparent. Ce n’est pas pour rien que le Premier ministre ait décidé de prendre les choses en main, après l’échec des négociations avec ministre de la Fonction publique. Mahammed Boun Abdallah Dionne vient en pompier pour tenter d’éteindre un feu que son gouvernement a vu venir, mais qu’il n’avait manifestement pas jugé utile d’éteindre ou de circonscrire à temps. Et la tâche risque d’être d’autant plus difficile qu’il y a une grosse fissure entre enseignants représentatifs et d’autres dits non représentatifs. Les exclus de la table pourraient donc faire monter les enchères, quelle que soit l’issue des négociations.

Dans le supérieur, la violence que la police a exercée avant-hier sur les étudiants n’est pas de nature à apaiser la tension. Justement, ça fait longtemps qu’on ne voyait plus les pensionnaires de l’Ucad sur l’avenue Cheikh Anta Diop pour réclamer leurs bourses. Ceci est donc un mauvais signal d’un retour éventuel des manifestations, surtout à un moment où le Saes a déjà déposé son préavis de grève pour non-respect des accords sur la réforme des titres et celle de la retraite. Et comme pour dire que les difficultés dans le supérieur ne se limitent pas au public, les établissements privés d’enseignement supérieur menacent de mettre à la porte les 40 000 étudiants que le gouvernement leur a envoyés, si l’Etat ne paye pas les 16 milliards de francs Cfa de dettes cumulées depuis 2013.

Et, pourtant, le régime n’a pas que l’éducation à gérer. Les acteurs de la santé sont aussi sur le pied de guerre. Que ce soit les médecins ou les autres corps regroupés au sein de la coalition And Guesseum dirigée par Mbalo Dia Thiam et Sidiya Ndiaye, ils sont tous prêts à manifester vivement leur mécontentement face à ce qu’ils qualifient  d’absence de volonté de la part de l’Etat. Pendant ce temps, les travailleurs des collectivités locales et ceux de la Sde se signalent.

Autant dire que le front syndical est réellement en ébullition. Ce qui n’est pas tout à fait nouveau. Cependant, on note l’arrivée de nouveaux acteurs et pas des moindres.

Casamance, une paix en pointillé

En fait, depuis l’arrivée de Macky Sall au pouvoir, le gouvernement a signé avec les centrales syndicales ce qu’ils ont appelé le ‘’Pacte national de stabilité sociale et d’émergence économique’’. Les organisations dirigées par Mody Guiro, Mademba Sock, entre autres secrétaires généraux, étaient plus dans un syndicalisme d’accompagnement que dans une position critique vis-à-vis de l’Etat et des employeurs, malgré la précarité dans laquelle se trouvent les travailleurs. Après trois ans de mise en œuvre (2014-2017), les leaders des centrales semblent être plus déçus que satisfaits. Cheikh Diop de la Cnts/Fc a clairement déclaré que ce qu’a fait le gouvernement est ‘’insuffisant’’ (sic) comparé à ses engagements. Il a également déploré qu’il n’y ait pas eu, de la part du président Sall, un appel pour une séance d’évaluation du pacte.

 Quant à la Cnts, elle a directement déterré la hache de guerre. Mody Guiro et Cie ont annoncé une marche nationale le 23 janvier prochain. Les centrales semblent se décider (enfin !) à défendre les intérêts des travailleurs. ‘’Toutes les actions syndicales conformes à la loi seront mises à contribution pour la satisfaction des préoccupations des travailleurs, condition sine qua non de la paix sociale dans le monde du travail’’, prévenait la Cnts lors d’une conférence de presse du vendredi 22 décembre 2017.

Si l’Etat n’avait à faire qu’au monde syndical, le travail pourrait être moins ardu. Mais il y a d’autres urgences encore. Alors que des pas décisifs ont été faits en direction de la paix en Casamance, amenant même le chef de l’Etat, dans son message de fin d’année, à appeler de ses vœux pour ‘’une paix définitive, sans vainqueurs, ni vaincus’’, voilà que la tuerie de Boffa Bayottes vient semer le doute dans les esprits. Non seulement certains l’ont interprétée comme une réponse à l’appel de Macky Sall, mais aussi les opérations initiées par l’armée pour punir les fautifs font craindre des dérapages qui pourraient réveiller de vieux souvenirs et compliquer la recherche de la paix. Sans compter les éventuelles conséquences sur le tourisme. C’est dire donc que ce n’est pas une mince affaire.

Des graines sans acquéreurs

Pendant ce temps, les paysans du bassin arachidier ne savent plus que faire de leurs graines. Après une production abondante, la commercialisation s’est avérée, à ce jour, ‘’catastrophique’’. La campagne manque d’argent, obligeant les cultivateurs à brader leurs récoltes. Il suffit de se référer à l’appel à la participation au financement de la campagne lancé aux banques par le ministre des Finances Amadou Ba, pour s’en convaincre.

D’ailleurs, ce n’est que la  semaine dernière que le ministre de l’Economie et des Finances a obtenu, lors de son voyage en Arabie saoudite, un montant de 52 milliards de francs Cfa pour la Sonacos, dans le cadre de la collecte des graines. Les autorités (déclaration du directeur de l’Agriculture ces derniers jours à Kaolack) veulent faire croire que la commercialisation se déroule correctement. Mais il suffit de se rendre dans le Saloum pour constater le contraire. Dans certaines parties, on note même le retour des bons de dépôt. Pas plus tard qu’en début de semaine, les paysans de Kaffrine continuaient à livrer leurs arachides contre un bout de papier. Les exportateurs, qui avaient promis de tout acheter, en cas de levée de la taxe sur l’exportation, sont quasi invisibles, en dépit de la suspension de la taxe.

Que dire du terrain politique ! Les dernières élections législatives ont laissé un fossé difficile à combler. Le dialogue est actuellement au point mort. Même l’opposition (non significative ?) qui a accepté de parler avec le pouvoir a du mal à s’entendre avec le camp présidentiel, notamment sur le parrainage et sur la caution. L’affaire Khalifa Sall, avec ses relents politiques, donne plus d’échos à la revendication d’indépendance formulée par les magistrats, notamment à travers l’Ums et  son président Souleymane Téliko.

En un mot comme en mille, le contexte actuel est délicat pour les tenants du pouvoir. A un an de la présidentielle !  

BABACAR WILLANE

Section: 
INAUGURATION ESI DE RANÉROU ET BRIGADES DE PODOR ET D'AÉRÉ LAO : La gendarmerie intensifie son maillage du territoire
RENFORCEMENT DES MOYENS DES FDS : 3 321 personnels garnissent les rangs de la maréchaussée
Journée ‘’Set Setal’’
VICTIMES DE LA CRISE POLITIQUE : Les FDS, les parents pauvres 
SECTEUR DE LA SANTÉ : Le Sames décrète 48 heures de grève, les 18 et 19 février 2025
Msas
THIÈS : STATIONNEMENT ANARCHIQUE, INCIVISME ET EMBOUTEILLAGES : Le calvaire des commerçants et des clients au marché central
Armée nationale
“YOR-YOR” DE DIAMALAYE - SOUTIEN DE L’ÉTAT, ZAKAT, UNITÉ DES CŒURS... : La master classe de Serigne Mouhamadou Lamine Laye
RÉSEAUX CRIMINELS INTERNATIONAUX : Interpol frappe au cœur de la mafia ouest-africaine
SAINT-LOUIS : JOURNÉE NATIONALE DE CONCERTATION DES COLLECTIVITÉS La gouvernance de proximité et la gestion des déchets au menu
ASSOCIATION DE MALFAITEURS, USURPATION DE FONCTION : Le faux Adjudant Diop de la SU interpellé
Pollution de la Falémé
APPEL DES LAYÈNES : Polémique sur l’aide de l’État
ESCROQUERIE : Assane O. Sonko se fait passer pour un gendarme et dépouille une commerçante
RENCONTRE INÉDITE ENTRE POLICIERS ET JOURNALISTES : Les prémices d’un dialogue constructif
11e ÉDITION DE LA MARCHE INTERNATIONALE DAKAR - THIAYTOU : Un hommage à Cheikh Anta Diop
1,4 MILLIARD DE TOURISTES INTERNATIONAUX DANS LE MONDE EN 2024 : Le Moyen-Orient, l’Europe et l’Afrique obtiennent les meilleurs résultats
Alliance des forces de progrès
COHABITATION JOURNALISTES-POLICIERS : Le début d'une nouvelle ère