Le Sames menace d’arrêter les missions de prélèvement sur le terrain

Si l’Etat ne prend pas ses responsabilités, les malades souffrant du coronavirus vont se retrouver sans soignant. Le Sames ne compte plus exposer ses agents face aux différentes menaces et met en garde Abdoulaye Diouf Sarr et Mansour Faye.
Le Syndicat autonome des médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes du Sénégal (Sames) est vraiment contre la communication de l’Etat. Car, de l’avis des syndicalistes, malgré les conditions difficiles dans lesquelles le travail est effectué, l’Etat a fait croire à une partie de la population que les agents de santé sont rétribués en échange d’hospitalisation de malades de la Covid-19. Ce, en communiquant à outrance sur les 1 000 milliards du plan de résilience économique que le secteur de la santé n’a pas vus. Cela met les agents en situation d’insécurité, car ils sont, tout le temps, menacés.
Pour mettre fin à cela, le Sames tient à informer la population qu’aucun agent de santé n’a reçu de l’argent, en échange d’une hospitalisation de malades.
D’ailleurs, soutient le secrétaire général dudit syndicat, Docteur Amadou Yeri Camara, les équipes d’investigation manquent cruellement d’appui et les comités de développement sanitaire supportent la quasi-totalité des charges. ‘’Nous exigeons le respect et la sécurité des agents de santé. Nous allons demander purement et simplement l’arrêt des missions de prélèvement sur le terrain, si l’Etat ne prend pas ses responsabilités pour la protection des agents’’, prévient le Dr Camara. Dans un communiqué parvenu à ‘’EnQuête’’, le Sames dit comprendre la nécessité de faire reprendre les activités économiques brandie par l’Etat. Mais souligne que la cacophonie des décisions prises par l’Etat a conduit à la banalisation de la maladie par la population. ‘’Le message subconscient est que l’Etat est passé à autre chose. Le relâchement constaté dans la population est global, y compris au sein des forces de défense et de sécurité chargées d’appliquer les mesures de port obligatoire des masques dans les lieux publics et dans les transports’’, déplore le Dr Yeri Camara.
En outre, le syndicat soutient que les agents de santé sont laissés à eux-mêmes ‘’Nos patients diabétiques, hypertendus, cancéreux et nos ainés succombent de plus en plus et de jour en jour. Bientôt, la barre des 100 décès sera franchie. L’Etat doit se ressaisir et suivre les indications du Comité national de gestion des épidémies. Aujourd’hui, il est nécessaire de faire comprendre et appliquer les mesures de port obligatoire des masques dans les lieux publics et mettre assez de ressources pour assurer correctement les missions de terrain des districts’’, fustigent les syndicalistes. C’est le sens, disent-ils, qu’il faut donner au geste posé par l’Ordre national des médecins du Sénégal et les autres ordres qui ont fait des dons en équipements de protection.
Suppression du HCCT et du Cese
Par ailleurs, le Sames juge le moment nécessaire pour supprimer les institutions comme le HCCT et le Cese à ‘’l’utilité douteuse, pour consacrer les ressources économisées aux véritables priorités sanitaires et éducatives’’.
Le deuxième aspect abordé par le syndicat concerne la dette hospitalière. Selon le Sames, au lieu de payer ses dettes aux structures de santé, conformément à l’instruction du chef de l’Etat, l’Agence de la couverture maladie universelle (Acmu) propose une convention dans laquelle elle demande aux directeurs d’hôpitaux de renoncer à une partie des montants dus et validés. Il en est de même pour le remboursement des coûts de prise en charge de la gratuité des enfants âgés de 0 à 5 ans au niveau des districts sanitaires. A ce niveau, renseigne le Dr Camara, les montants validés ont été amputés sans aucun critère précisé. En lieu et place, dit-il l’Acmu propose un montant insignifiant représentant parfois le dixième du montant réel dû à rembourser immédiatement aux structures, sous condition que ces dernières renoncent au reste de la dette constatée jusqu’en décembre 2019.
‘’Cette tentative d’arnaque ne passera pas. Tous les agents de santé feront face. Nous n’excluons aucune méthode de lutte, si l’Acmu persiste dans ce chantage basé sur la détresse financière des structures de santé’’.
Le Sames dénonce également les atteintes répétées à l’honorabilité et à la dignité des agents de santé par les sorties médiatiques du ministre du Développement communautaire et ses directeurs d’agence. Qui, dit-il, incapables de faire face à leurs responsabilités pour payer leurs dettes, accusent sans preuve et jettent le discrédit sur le secteur de la santé en totale manque de solidarité gouvernementale. ‘’Même de petits conseillers techniques à l’Acmu se permettent d’accuser de vol les responsables des structures de santé. Comment peut-on voler une dette ? L’incompétence et le ridicule ne tuent pas ! Cela ne nous étonne guère, puisque ces agences servent juste à caser la clientèle politique’’, dénonce le Dr Camara.
Quant au ministère de la Santé et de l’Action sociale, les syndicalistes soulignent qu’il profite de la crise de la Covid-19 pour procéder à plusieurs nominations à des postes de responsabilité. Ce, sans même respecter les règles de compétition acquises depuis plusieurs années. ‘’La santé est éminemment technique et le Sames n’acceptera aucune nomination clientéliste de novices sans expérience qui vont mettre en péril les programmes de santé’’, menaces les syndicalistes.
Sur ce, ils comptent prochainement publier leur plan d’action, au regard de tous ces problèmes identifiés. Ils demandent, en outre, aux agents de santé de se tenir prêts et de ne prendre aucun risque dans le suivi des contacts.
VIVIANE DIATTA