Publié le 27 Jun 2021 - 04:38

Le délit irrépressible d’incompétence scientifique

 

Qu’une loi votée par le Parlement - l’Assemblée nationale sénégalaise en l’occurrence - divise l’opinion est chose courante en démocratie. Mais pour s’en sortir, un État démocratique s’organise de telle sorte que celles et ceux qui s’opposent à la nouvelle loi et celles et ceux qui la confortent en parlent pour en avoir bien pris connaissance et pour s’être toujours faits remarquer par un haut niveau scientifique et technique.

 
Or depuis peu au Sénégal - disons après les Législatives de juillet 2017 -, deux sous-groupes d’individus ont fait irruption dans le débat sans se soucier des prérequis et des acquis scientifiques et techniques grâce auxquels leurs contributions suffisent, au meilleur des cas, à convaincre ou, au pire des cas, à être prises en compte quand arrive le moment d’amender un texte de loi.
 
Hors de l’Hémicycle de l’Assemblée nationale où se tiennent les plénières, le débat peut se poursuivre de manière civilisée suivant un modus vivendi auquel se conforment tous les participants sous la conduite de modérateurs - journalistes pour la plupart - qualifiés pour des joutes spéciales.
 
Le premier sous-groupe est celui d’un petit nombre d’élus au suffrage universel auquel appartient le député Ousmane Sonko et qui s’opposent aux nouvelles lois sans même prendre le temps de s’en imprégner, donnant ainsi l’illusion de siéger à l’Assemblée nationale dans le but d’y représenter la société plus dignement que la grande masse majoritaire d’élus à qui l’opinion abusée impute systématiquement toutes les mini crises de la représentation qui caractérisent la démocratie représentative.
 
Le face-à-face qui en résulte fait que les plénières se poursuivent dans la rue, grâce aux éléments surexcités constitutifs du second sous-groupe dont les performances dans l’agitation pallient le déficit de culture politique et surtout l’incompétence scientifique et technique disqualifiante quand le débat devint le seul tremplin crédible pour gagner la confiance du plus grand nombre. Il s’agit bien du sous-groupe d’activistes sans bagou intellectuel dont les plus notoires aujourd’hui sont Landing Mbissane Seck alias Kilifeu, Guy Marius Sagna, Fadel Barro dans une moindre mesure et tous les autres.
 
C’est donc trop leur demander quand arrive un nouveau texte de loi que de conquérir les faits sur les préjugés, de les constater et de les construire par la pensée au terme d’un effort de systématisation moins excitant que le corps à corps avec les forces de l’ordre sous le regard admiratif de compagnes restées à la maison.
 
Leur délit irrépressible de ces activistes est un délit d’incompétence scientifique et technique dont les patrons de la police et de la gendarmerie doivent bien avoir conscience - ils en ont certainement conscience au niveau très élevé de la hiérarchie auquel ils se situent - pour ne plus les faire arrêter pour un oui ou pour non.
 
Le problème reste alors entier tant que la désintellectualisation du débat politique dans les institutions de la République, dans l’audiovisuel, dans les réseaux sociaux et, naturellement, au sein même de la société se poursuit sous les encouragements de responsables politiques qui voient dans la marginalisation d’hommes et de femmes connus pour leur compétence scientifique et technique ce qu’ils ont juste à faire pour préserver leurs avantages en numéraire et leurs privilèges indus.
 
La défiance des institutions de la République et des personnages qui les animent au plus haut niveau par les éléments les plus représentatifs des deux sous-groupes peints plus haut s’explique, elle, par leur mépris pour ces responsables politiques peu fréquentables, mais tous bien introduits dans les sphères où se prennent les décisions qui affectent l’ensemble du corps social. Les mêmes responsables sont pour beaucoup dans la théâtralisation et la guerre ouverte des chefs politiques du camp de la majorité lors de la célébration, Place de la Nation, du dixième anniversaire de la révolution citoyenne du 23 juin 2011.
 
Abdoul Aziz DIOP
 
Conseiller spécial à la Présidence de la République
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