L’étudiant Daouda Dème risque 5 ans de réclusion criminelle
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En détention préventive depuis le 12 décembre 2018, l’étudiant Daouda Dème a finalement été jugé, hier, à la barre de la Chambre criminelle du tribunal de grande instance de Dakar. Accusé de tentative de meurtre sur son camarade étudiant Ibrahima Ngom alias ‘’Général’’, il encourt 5 ans de réclusion criminelle.
Daouda Dème et Ibrahima Ngom n’oublieront jamais la date du 17 septembre 2018. Jour où le dernier nommé a failli passer de vie à trépas. Depuis lors, Daouda s’est lui octroyé un ticket pour la citadelle du silence. Il va encore attendre pour être édifié sur son sort. Une querelle entre coalitions estudiantines est à l’origine de cette affaire.
Lancés dans une course effrénée pour avoir plus de lits pour les codifications, les membres des deux coalitions amicales des étudiants de la faculté des Sciences s’étaient farouchement opposées. Après une altercation verbale dans la matinée du 17 septembre, une bagarre a éclaté entre les deux protagonistes, dans l’après-midi. Ibrahima Ngom reçu trois coups de machette. Le laissant pour mort, Daouda Dème a disparu dans la nature.
La victime, grièvement blessée, a été évacuée à l’hôpital. Dans le coma pendant 22 jours, Ibrahima, qui souffrait d’une fracture crânienne et d’une hémorragie infra-cérébrale, a été évacué d’urgence au Maroc pour des soins médicaux.
Pendant ce temps, son bourreau se terrait à Pire, chez sa tante. Ensuite, il a tenté de quitter le territoire national. Alors qu’il s’apprêtait à s’envoler pour le Maroc, il a été cueilli à l’aéroport Blaise Diagne de Diass.
Après trois années de détention préventive, l’étudiant Daouda Dème a finalement fait face aux juges de la Chambre criminelle du tribunal de Dakar, hier. ‘’Je n’ai jamais eu l’intention de tuer Ibrahima Ngom qui était un frère pour moi’’, a-t-il dit pour contester le chef de tentative de meurtre qui lui est reproché.
Le jour des faits, raconte-t-il, il avait rendez-vous avec le doyen de la faculté des Sciences de l’époque, Cheikh Oumar Hann, pour les codifications. ‘’A la base, j’ai été élu président de l’amicale. Mais les résultats ont fuité et le doyen a suspendu l’élection. C’est la raison pour laquelle il y a eu deux représentants. Pour éviter des heurts entre nous, il a d’abord discuté avec le camp d’Ibrahima. Le 17 septembre, il devait nous rencontrer’’, confie l’étudiant en Master 2 de mathématiques.
Mais, selon lui, après son entrevue avec le doyen, ses camarades et lui ont croisé la coalition adverse dans le campus social. D’ailleurs, dit-il, il y a eu une vive altercation entre eux. ‘’Ils étaient tous armés de gourdins et de machettes. Un des nôtres, en l’occurrence Ndiéguène Diouf, a même été blessé. Je l’ai emmené au centre médical du Coud pour qu’il soit soigné’’.
‘’Je me rappelle lui avoir porté un coup au niveau du flanc gauche’’
A l’en croire, c’est en allant au pavillon Q qu’il a croisé Ibrahima Ngom avec d’autres étudiants. ‘’C’est au cours de notre bagarre que je l’ai blessé. Je me rappelle lui avoir porté un coup au niveau du flanc gauche. Je n’ai jamais eu l’intention de le tuer’’, s’est-il défendu.
En outre, il reconnaît que ce jour-là, il détenait une machette. Si l’on se fie à ses déclarations, l’arme était celle de son ami blessé. Sur sa fuite, il dit qu’il avait peur ; c’est la raison pour laquelle il a pris la poudre d’escampette.
Mais sa version des faits a été battue en brèche par le témoin oculaire Mouhamadou Moustapha Ndiaye. ‘’Le matin du 17 septembre, il y a eu une altercation verbale entre les deux camps. Et quelque temps après, Daouda et Ibrahima se sont croisés dans le campus social. Daouda, qui voulait en découdre avec Ibrahima, a extirpé sa machette et lui a d’abord porté un coup au flanc, ensuite à la bouche. Malgré les coups qu’il recevait, Ibrahima tentait de se défendre. Mais il a reçu un troisième coup à la tête et il s’est affalé sur le sol’’, raconte Mouhamadou Moustapha Ndiaye qui précise que la victime n’était pas armée.
A la barre, il a également soutenu que l’accusé et la victime ne s’entendaient pas. Poursuivant, il révèle avoir entendu une audio où Daouda invitait ses camarades à se battre jusqu’au bout pour obtenir ce qu’ils voulaient. ‘’S’il faut verser du sang, faisons-le, avait-il dit’’, a ajouté le témoin. Ce dernier reconnaît que l’accusé l’avait sollicité pour qu’il demande à Ibrahima de lui pardonner, car il regrettait son acte.
La partie civile réclame 100 millions F CFA
Au moment de plaider, l’avocat de la partie civile, qui reste convaincu que Daouda Dème voulait tuer son client, a réclamé la somme de 100 millions de francs CFA pour dédommagement. Le représentant du ministère public a, lui, requis 5 ans de réclusion criminelle. ‘’Il avait la volonté de lui donner des coups. La tentative de meurtre est établie. La victime doit son salut à une prise en charge rapide et efficace. Il faut le condamner, mais en prenant compte de son repentir’’, a lancé le maître des poursuites.
Les avocats de la défense ont, pour leur part, sollicité une application bienveillante de la loi. ‘’Il ne ressort pas du dossier que le prévenu portait une arme pour ôter la vie de la victime. Le guet-apens n’est pas aussi déterminé’’, a plaidé Me Bamba Cissé qui prône l’annulation des mouvements syndicalistes à l’université.
Selon la robe noire, la peine requise par le parquet peut être revue à la baisse. De même que la somme réclamée par la partie civile.
MAGUETTE NDAO