La figure du prélat présentée aux nouvelles générations
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L’archidiocèse de Dakar célèbre le centenaire de la naissance du cardinal Hyacinthe Thiandoum, 17 ans après sa mort. Dans un entretien accordé à ‘’Vatican News’’, l’archevêque de Dakar, Monseigneur Benjamin Ndiaye, présente le personnage du prélat et ses œuvres aux nouvelles générations.
Il est nommé archevêque de Dakar en février 1962, à 41 ans, succédant à monseigneur Marcel Lefebvre, exactement deux ans après l’accession du Sénégal à la souveraineté internationale. Le cardinal Hyacinthe Thiandoum est ordonné prêtre en 1949. Il est né le 2 février 1921 à Popenguine, dans la région de Thiès. Il fut le premier Sénégalais à porter le titre cardinalice, Hyacinthe Thiandoum. Dix-sept ans après sa mort, l’archidiocèse de Dakar, dont il a porté la charge pastorale pendant 38 ans, célèbre le centenaire de sa naissance. Il est prévu un colloque pour faire connaitre aux nouvelles générations les œuvres du cardinal.
Dans un entretien à ‘’Vatican News’’, l’archevêque de Dakar, Mgr Benjamin Ndiaye, met en lumière l’héritage spirituel du premier cardinal du Sénégal, Hyacinthe Thiandoum, ‘’à qui l’on doit le passage d’une église missionnaire fondée par des expatriés à une église locale tenue par des autochtones’’. Monseigneur Thiandoum relève ainsi le défi de faire une église africaine en terre sénégalaise, en comptant sur ses capacités d'autodétermination. Le cardinal Thiandoum a été un des acteurs du Concile Vatican II. Ayant assisté à toutes les sessions, il s’est fait remarquer notamment par ses interventions sur la réforme liturgique, avec une attention spéciale à l’inculturation (rites particuliers des catholiques africains et possibilité d’introduire les langues locales). En cela, il a marqué une nette rupture d’avec son prédécesseur au siège apostolique de Dakar, Mgr Marcel Lefebvre. ‘’Monseigneur Thiandoum passait des sessions du Concile à son diocèse pour rendre compte de ce qui se faisait et donner les orientations dans le bon tempo, pour que nous puissions réussir justement cette inculturation’’, raconte Mgr Ndiaye.
Sa création comme cardinal, en 1976, par Paul VI, sera accueillie comme une reconnaissance d’une église sénégalaise florissante. ‘’C'était un grand bonheur pour le Sénégal. C'était comme le signe d'une église majeure qui avait un témoignage à apporter non seulement en dedans, mais également au-dehors. Cela a évidemment augmenté l'auréole du cardinal lui-même et son rôle dans l'église. On verra combien de fois il interviendra par la suite dans différents synodes romains avec cette touche particulière au synode de 1994, lors du premier synode dédié à l'Afrique et où il a été le rapporteur général, donnant des synthèses qui ont marqué de manière durable les travaux de ce synode africain’’, révèle l’archevêque de Dakar.
Outre l’inculturation, le cardinal Thiandoum aura marqué les esprits par son combat en faveur du dialogue islamo-chrétien. A en croire Mgr Ndiaye, le premier cardinal du Sénégal ne s’est pas contenté de théoriser la relation avec les musulmans. Mais ‘’il l'a vécu dans les faits, en étant l'ami de plusieurs chefs marabouts auxquels il se plaisait à rendre visite et certains qu'il invitait même au pèlerinage national marial de Popenguine’’.
De cette manière, soutient-il, nous pouvons affirmer du cardinal Thiandoum qu’il est l’un des architectes d’un Sénégal où tous sont frères, malgré les divergences de points de vue. ‘’Nous héritons, de ce point de vue-là, d'un exemple que nous devons suivre. Cela contribue beaucoup à une connaissance mutuelle et à une estime réciproque qui est le ciment d'une entente fraternelle entre croyants de sensibilités différentes’’, fait-il savoir.
Par ailleurs, faisant le bilan du dialogue entre musulmans et chrétiens au Sénégal, Mgr Ndiaye se dit satisfait des efforts fournis dans la réappropriation du combat du cardinal Thiandoum.
Cependant, l’archevêque de Dakar tire la sonnette d’alarme contre ‘’un djihadisme existant’’ qui est à nos portes, qui peut connaître même des partisans chez nous. ‘’Nous devons désamorcer ces bombes à retardement. Et la meilleure manière de le faire, c'est de cultiver ces relations à travers d'abord une meilleure connaissance réciproque’’, avertit-il.
Par ailleurs, à l’initiative de l’ambassade du Sénégal près le Saint-Siège, une célébration eucharistique a été présidée ce week-end par le cardinal Peter Turkson, en l’église Santa Maria in Portico, en mémoire du cardinal Thiandoum.
VIVIANE DIATTA