Publié le 22 Aug 2023 - 21:52
MIGRANTS DE FASS BOYE SECOURUS AU CAP-VERT

Les rescapés rapatriés à Dakar

 

Les rescapés de Fass Boye ont été rapatriés, hier, à Dakar. Ils sont venus au bord de l'avion militaire qui a atterri à l'aéroport Léopold Sédar Senghor.

 

Des jeunes avec leurs bagages (sachets) en main descendent de l'avion militaire. Ils sont accueillis par leurs parents. Deux ambulances sont prépositionnées pour transporter les rescapés qui ont besoin de soins à l'hôpital. Originaires de Fass Boye, ces jeunes hommes reviennent de l’enfer. Ils avaient embarqué à bord d’une pirogue de fortune pour rallier l'Espagne. Le voyage vers l’eldorado s’est transformé en cauchemar. Après des jours de dérive, leur embarcation a été repérée le 14 août au large de l'archipel capverdien, avec officiellement 38 rescapés.

Les secours ont récupéré sept dépouilles. Celles-ci ont été inhumées au Cap-Vert, renseigne la ministre déléguée des Sénégalais de l'extérieur Annette Seck Ndiaye, présente à l’accueil des candidats à la migration. Un des rescapés, informe-t-elle, est resté au Cap-Vert pour s’y soigner, car son état de santé ne lui permet pas de voyager.

Récit des parents éplorés

Parmi les parents venus accueillir leurs fils, il y a Abdoulaye Kandj. Il renseigne qu'il avait ‘’deux fils’’ dans l’embarcation. Baye Mor Kandj, 16 ans, son fils biologique, fait partie des rescapés rapatriés. Par contre, Pape Sow, 17 ans, le fils de son meilleur ami qu'il a élevé, est malheureusement décédé. "Je leur ai acheté un tracteur pour qu'ils puissent travailler ensemble. Je ne savais pas qu'ils programmaient ce voyage. Ils ne m'ont rien dit. Lorsque j'ai appris la nouvelle, j'étais dans le désarroi et j'avais le cœur meurtri", déclare-t-il, le visage crispé.

Lorsque les jeunes ont été repêchés, poursuit Abdoulaye Kandj, son fils a été le premier à appeler. "On les cherchait, depuis un mois et cinq jours. Lorsqu'on m'a annoncé qu'ils ont été retrouvés, j'étais à Touba. Mon téléphone a sonné et la personne m’a dit : ‘C'est toi, Abdoulaye Kandj ?’ J'ai répondu oui. Elle m'a dit : ‘Tu avais un fils dans la pirogue qui avait quitté Fass Boye ?’ Et j'ai répondu par l’affirmative. Le crédit de la personne s’est épuisé. J'ai très rapidement acheté du crédit. Je l’ai rappelée et je l’ai entendue dire : ‘Baye Mor, vient répondre à ton père.’ Je lui ai dit : Baye Mor ? Il m'a répondu : ‘Oui papa, c'est moi.’ Je lui ai demandé s'ils allaient bien. Il m'a confié qu'ils ont rencontré beaucoup de difficultés, qu’ils étaient très fatigués", narre Abdoulaye Kandj.

Embouchant la même trompette, Abdou Karim Sarr, membre de l’Unapas, originaire de Fass Boye, confie qu'il a perdu deux fils et quatre petits-fils dans ce malheureux événement. "Concernant mes enfants, je n’étais même pas au courant qu’ils se préparaient à prendre la mer. L’un devait rejoindre l’université Cheikh Ahmadou Bamba de Touba. Les autres aussi travaillaient. J’avais quatre de mes petits-fils à bord de la pirogue, mais malheureusement ils ont tous péri en mer et c’est vraiment regrettable et douloureux", raconte le quinquagénaire.

Un appel lancé à l'État

"On demande à l’État du Sénégal un accompagnement psychologique, mental et financier pour ces enfants, car ils sont dans une situation difficile et s’ils n’ont pas quelqu’un derrière pour les soutenir dans ces situations difficiles, ils risquent de s’effondrer", ajoute Abdou Karim Sarr. Il interpelle le président de la République pour qu’il demande à la gendarmerie et à la police d’arrêter les arrestations qui sévissent à Fass Boye, avant que le pire ne se produise.  Car, ajoute-t-il, ils ont déjà assez souffert et sont traumatisés. Et même si les enfants sont coupables, le mieux, dit-il, est de régler le problème autrement.

FATIMA ZAHRA DIALLO (STAGIAIRE)

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