Entre cri du cœur et éveil des consciences sur le viol
Etudiante en Master 2 en littératures et civilisations du monde anglophone à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, Dado Touré est à son premier roman. Née dans la ville tricentenaire et ayant grandi dans la ville de Tivaouane (région de Thiès), elle s’est basée sur des faits réels pour écrire son roman qui dénonce le viol, le comportement de la société sénégalaise et motive les victimes à aller de l’avant.
Paru en décembre 2022 et publié éditions Fama, le roman ‘’Les Liens maudits’’ raconte l’histoire de Saly et de Khar, mère et fille qui ont été toutes les deux victimes de viol et que les liens invisibles du destin relient dans un destin qui suscite un sentiment de compassion et d’indignation chez le lecteur. Il y a deux histoires dans cet ouvrage.
La première phase concerne Khar. Elle est la fille de Saly et a été violée par le frère de son amie Fatou. Sa grand-mère l’a bannie et maltraitée, à cause de ce viol qui n’a pas eu de suite.
La seconde partie de l’histoire s’intéresse à sa mère Saly qui a subi le même sort que sa fille, violée par un charlatan et trahie par son entourage. Elle a fini par se suicider, parce qu’il n’y avait pas de solution à son problème.
L’auteure Dado Touré explique la raison qui l’a poussée à écrire ce roman basé sur l’histoire de son amie d’enfance. ‘’L’écriture de ce roman a commencé en février 2022, un samedi même à l’université. Cela a toujours été un objectif de ma part pour rendre hommage à toutes les femmes victimes de viol, surtout à mon amie d’enfance qui a été violée et bannie par la société et son entourage. Cela me tenait à cœur. Quand j’étais petite, elle me racontait plein de choses de sa vie, le fait qu’on la maltraitait et je pleurais avec elle. Quand j’ai su sa mort, cela m’a affectée. C’était un devoir moral d’écrire ce roman pour lui rendre hommage, elle et à toutes les femmes qui ont vécu des cas similaires et que justice n’a pas encore été rendue’’, confie l’auteure.
Selon la jeune demoiselle, c’est une forme de lutte pour elle de dénoncer la violence et les fantasmes phallocrates dans une société où les femmes ne sont pas respectées.
Elle qualifie le violeur de bête sauvage qui ne mérite pas sa place dans la société. ‘’Les parties intimes d’une femme sont si sacrées et protégées par Dieu ! Il a imposé une loi que pour y toucher, il faut l’épouser. Donc, pourquoi enfreindre la loi de Dieu ? Je n’arrive pas à comprendre pourquoi des hommes infligent une telle souffrance à des femmes et aux enfants. C’est un cri du cœur que je devais sortir’’, dit-elle.
‘’Saly représente l’amie que j’ai perdue, celle que j’ai toujours voulu avoir et qui est malheureusement décédée. Quant à Khaar, j’ai utilisé cet enfant pour animer et donner sens à cette histoire. A la fin du roman, le personnage Saly s’est suicidé et Khaar est retournée chez elle pour faire face à son destin et venger la mort de sa mère’’, révèle l’auteure. Et elle veut atteindre son objectif d’éveil des consciences sur le respect des femmes.
Dado Touré d’ajouter : ‘’Je suis la dernière personne à écrire, parler sur le viol. Des auteurs comme Fama Diagne Sène, Ken Bugul, Aminata Sow Fall, Mariama Ba et tant d’autres en ont fait un sujet. Mon objectif est de les avertir des méfaits du viol et de l’hypocrisie de la société sénégalaise. Ce roman est un héritage que je dois laisser aux femmes et aux enfants qui souffrent en silence et leur montrer que le viol n’est pas une fin en soi, qu’il faut relever la tête, avancer et persévérer’’.
La jeune auteure de 25 ans espère, par ailleurs, que ce roman fera le tour du monde et que les femmes, les enfants pourront le lire et en tirer des leçons.
NDEYE KHOUDIA DIENG (STAGIAIRE)