Publié le 4 Nov 2023 - 18:35
MAMADOU LAMINE DIALLO, ABDOUL MBAYE, THIERNO ALASSANE SALL EN VUE DE LA PRÉSIDENTIELLE 2024

Les échappées solitaires

 

À l’approche de la Présidentielle, des candidats plus modestes tentent de se démarquer des grosses pointures comme Amadou Ba, Ousmane Sonko, Khalifa Sall et cultiver leur singularité dans ce magma politique marqué par l’ultramédiatisation. Ainsi, Mamadou Lamine Diallo et Abdoul Mbaye veulent s’imposer sur la scène politique sénégalaise en se plaçant sur le terrain des propositions et des idées principales.

 

Si la nouvelle donne politique au Sénégal semble être dévolue aux grandes coalitions telles que YAW, BBY et Wallu Sénégal, dans la perspective du scrutin présidentiel de février 2024, ces grands ensembles devraient se renforcer laissant peu de champ médiatique à des candidats plus modestes. Même si ces coalitions connaissent quelques soubresauts notamment à YAW avec la scission de Taxawu Sénégal, des personnalités imposantes comme Khalifa Sall, Ousmane Sonko et même plus modestement, Déthié Fall et Malick Gackou occupent tout l’espace dévolu à l’opposition. L’absence du secrétaire général du PDS Karim Wade, toujours en exil au Qatar, ne permet pas aux libéraux de peser suffisamment sur l’échiquier politique.

Face à cette omniprésence de certaines personnalités dans le jeu politico-médiatique, des candidats comme Abdoul Mbaye (ACT), Mamadou Lamine Diallo (Tekki), Cheikh Bamba Dièye (FSD/BJ), Thierno Alassane Sall (République des valeurs), Ibrahima Hamidou Dème tentent d’exister dans l’espace politique sénégalais. 

Même si pendant un temps on a espéré une plus grande pluralité politique avec la multiplication des plateformes de diffusion médiatique et autres réseaux sociaux, force est de constater que ces instruments d’information accentuent le gouffre entre les grandes figures politiques et les candidats plus modestes.

Ainsi, des candidats à la Présidentielle comme Abdoul Mbaye, Mamadou Lamine Diallo, Thierno Alassane Sall, Abdourahmane Diouf ont fait le choix de devenir avant tout des forces de proposition plutôt qu’attirer les médias avec des phrases chocs et outrancières.  Ces personnalités politiques peinent à susciter une adhésion populaire. Elles ont du mal à fédérer autour de leurs noms et de leurs programmes qui, selon certains, apparaissent souvent comme très pertinents.

La dernière expérience de la coalition Aar Sénégal avec Thierno Alassane Sall, Abdourahmane Diouf et Cie en est la preuve. Cette coalition qui avait l’un des meilleurs programmes du scrutin législatif, n’a pas résisté à la furia de YAW et de BBY, ne se contentant que d’un seul poste de député.

Dans l’optique de la Présidentielle de 2024, ces candidats auront du mal à exister face à celui de Benno et des grandes pontes de l’opposition comme Khalifa Sall, Sonko ou Karim Wade, si les deux derniers nommés sont qualifiés pour les joutes électorales. Ce qui leur laisse peu de chance de succès face à ces différentes machines électorales. L'absence d’un maillage électoral peut à court terme entraver la collecte des parrainages citoyens.

Mamadou Lamine Diallo : Le débatteur infatigable

Le député investi sur la liste de la coalition Wallu a longtemps brillé au sein de l’hémicycle (3e élection à l’Assemblée nationale)  par la qualité de ses interventions et sens de la répartie avec les députés de Benno et des membres du gouvernement. Adepte des débats techniques et très à cheval sur les dossiers économiques, le leader de Tekki doit se départir d’une image très austère et très technocrate. Sa posture très intellectuelle pourrait constituer une entrave à la ‘’popularisation’’ de son discours souvent réservé à une élite intellectuelle.

Le patron de Tekki aura beaucoup de difficultés à séduire un électorat populaire. Son absence de fief électoral peut aussi constituer un handicap. Passer le cap du parrainage pourrait constituer une première victoire pour cet économiste de formation. 

Abdoul Mbaye :  L’homme des alliances 

Le leader de l’Alliance pour la citoyenneté et le travail (ACT) peine à exister médiatiquement depuis son éviction de poste de Premier ministre en 2013. Il a été investi comme candidat à la Présidentielle par son parti en mars 2023 et s’est engagé à renforcer les bases de la souveraineté monétaire, alimentaire dans notre pays.  L’Alliance pour la citoyenneté et le travail (ACT) apparaît désormais comme un simple faire-valoir en vue pour la Présidentielle. Ses critiques acerbes et diatribes incessantes contre la mauvaise gouvernance du régime de Macky Sall l’avait positionné comme l’un des opposants les plus virulents contre le “Macky”.

Mais l’émergence de YAW a relégué le leader de l’ACT à un rôle mineur dans une opposition dominée par Yewwi et par l’émergence de la coalition Wallu. Une coalition qu’il rejoindra lors des élections législatives en 2022, après avoir quitté le CRD.

L’ancien directeur de la Banque de l’habitat du Sénégal (BHS) qui se présente comme un technocrate, a du mal à susciter l’enthousiasme des foules autour de sa personne. Son absence de tribune politique l’empêche aussi de bénéficier d’un temps conséquent pour mieux exposer ses idées dans le champ politique sénégalais. 

Thierno Alassane Sall : Le pari de l’intégrité 

L’ancien chef de file de la coalition Aar Sénégal lors du dernier scrutin législatif se positionne comme le leader d’une opposition qui veut évoluer sur le terrain de la lutte contre la corruption et la bonne gouvernance. L’ancien ministre de l’Énergie de Macky Sall refuse de céder au jeu politico-médiatique fait d’invectives, d’injures et de l’outrance dans le but d’attirer l’attention sur eux. Thierno Alassane Sall a dû céder face aux machines de Benno, de YAW dans son fief de Thiès lors des Locales et des Législatives. De ce fait, le manque d’ancrage territorial de la République des valeurs pourrait être préjudiciable à l'ex-directeur de l’ARTP.

Dans la perspective de la Présidentielle, une candidature solitaire de la République des valeurs aura du mal à percer dans ce magma politique où l’APR, l’ex-parti Pastef, le PDS ou Taxawu Sénégal sont appelés à jouer les premiers rôles. Son caractère ferme et intransigeant peut aussi constituer une entrave à la mise en place de diverses alliances autour de sa candidature pour la Présidentielle de 2024. 

Abdourahmane Diouf : Le souverainiste 

Ce Rufisquois de naissance veut s’imposer comme l’une des surprises de la Présidentielle de 2024. Le patron du parti Awalé, qui a lancé son livre programme, veut aussi incarner un changement dans notre perception des politiques sénégalais avec une rhétorique basée sur des propositions et des idées directrices pour tenter de rallier les électeurs.

Mais cette stratégie risque de se heurter à l’importance de la structuration pour un parti. L’élection présidentielle qui est la rencontre d’un homme avec son peuple nécessite la présence de nombreux relais dans diverses contrées du pays afin de rapporter les propositions et la parole du candidat. Awalé, porté sur les fonts baptismaux en novembre 2021, ne semble pas disposer d’assez de temps pour se structurer et s’organiser en vue de 2024.

L’ancien responsable politique de Rewmi veut se démarquer des autres candidats en axant sa communication sur le credo de la souveraineté économique. ‘’Nous en avons marre que les décisions viennent de l’étranger, pour nous dicter la façon dont nous devons travailler dans notre pays’’, a-t-il déclaré lors du lancement de son parti.

Sa posture élitiste va-t-elle marcher auprès des masses populaires à l’approche de la Présidentielle ? 

Mamadou Makhfouse NGOM

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