Publié le 18 Jan 2024 - 10:45
PRÉSIDENTIELLE 2024

La machine s’emballe !

 

En attendant la bataille des programmes, les candidats se livrent un combat épique sur fond de contentieux des listes électorales devant le Conseil constitutionnel. Alors que Thierno Alassane Sall tente de faire de Karim Wade son punching-ball, ce dernier essaie de le minimiser pour cogner directement sur le PM Amadou Ba qu’il accuse d’être derrière. Pendant ce temps, Sonko recadre les recalés et autres encagoulés qui utilisent son nom sans son consentement.

 

La Présidentielle approche. L’adrénaline monte dans l’arène politique. Et les coups pleuvent de toutes parts. Elles portent moins sur les programmes politiques que sur les personnes et la validité de leur candidature. Dans ce jeu, c’est Thierno Alassane Sall qui semble tenir le haut du pavé. Les missiles qu’il largue depuis son compte X secouent gravement le Parti démocratique sénégalais (PDS). Hier, il en a remis une couche. Réagissant à la publication du décret actant la renonciation de Karim Wade à la nationalité française, il déclare : ‘’Il est aujourd’hui incontestable que lorsqu'il (Karim Wade) présentait sa candidature en 2019, en accompagnant celle-ci d'une déclaration sur l'honneur affirmant qu'il était exclusivement de nationalité sénégalaise, il était pleinement conscient de perpétrer un acte de parjure…’’ Ce seul fait, estime M. Sall, constitue un motif suffisant pour le Conseil constitutionnel de l'écarter définitivement.   

Selon le candidat à la Présidentielle, ce décret, loin de conforter le fils de l’ancien président, l’enfonce et l’éloigne de la prochaine élection. ‘’Karim Wade administre lui-même la preuve qu'à la date du 26 décembre 2023, à l'expiration des délais de dépôt de candidatures, son dossier était irrecevable, car il avait au moins deux nationalités… En conséquence, monsieur Karim Wade doit être retiré de la liste des candidats’’, dénonce Thierno Alassane Sall qui estime que cette affaire est la preuve palpable de ‘’l'immixtion flagrante de la France dans notre processus électoral pour tenter de sauver la candidature de monsieur Karim Meissa Wade’’. 

D’habitude peu bavard, le candidat du PDS est, cette fois, monté au créneau pour porter la réplique. Sa réponse montre cependant le peu de considération qu’il semble avoir pour l’ancien ministre chargé de l’Énergie.

À en croire Karim Wade, ce dernier alimente cette polémique, qu’il considère comme ‘’stérile et dangereuse’’, juste pour avoir de la visibilité. Mieux, il estime que le Thiessois agirait pour le compte du Premier ministre Amadou Ba. Feignant de minimiser le leader de Réwum Ngor, le fils d’Abdoulaye Wade n’a pas été tendre avec le Premier ministre. ‘’Amadou Ba, dont le manque de témérité face à la confrontation est désormais évident, doit cesser ces manœuvres déloyales. Malgré les informations que j'ai reçues sur l'acquisition d’autres nationalités par certains candidats, j’ai décidé de ne déposer aucun recours devant le Conseil constitutionnel. Ma conviction est claire : seul le peuple sénégalais doit décider dans une élection présidentielle ouverte et inclusive’’, accuse-t-il non sans le traiter de ‘’spécialiste des coups bas’’.

Ousmane Sonko refuse d’être un fonds de commerce

Pendant ce temps, du fond de sa cellule, Ousmane Sonko, lui, semble suivre de très près ce qui se passe dans le landerneau politique. Par un communiqué rendu public hier, ses proches ont informé de sa démarcation de la liste des candidats recalés qui ont saisi le président de la République pour lui demander d’intervenir dans le processus en tant que clé de voute des institutions. Informé que son nom a été mentionné dans le document où il y a une quarantaine de signataires, le candidat de la coalition SonkoPrésident réfute : "Sous réserve de l'authentification de ce document, le président Ousmane Sonko tient à démentir toute implication  dans cette initiative dont il n'a jamais été informé." 

Le leader de l'ex-Pastef se veut très clair : "Macky Sall ne dispose d'aucune prérogative, à cette étape de la procédure, le Conseil constitutionnel étant seul maître du déroulement des opérations'’, souligne le candidat qui invite les uns et les autres à s'abstenir d'associer son nom à des initiatives pour lesquelles il n'a ni été consulté, encore moins consenti.

Il faut rappeler qu’ils sont nombreux les candidats malheureux à citer partout son nom pour espérer le soutien de ses partisans. Pour l’heure, le candidat recalé se focalise lui aussi sur le recours introduit par son représentant pour espérer revenir dans la course, malgré sa désolidarisation de cette lettre adressée au chef de l’État.

Loin de cet abattage médiatique, le Premier ministre, lui, cible de toutes les attaques, continue sa tournée en Casamance, fief de l’opposant radical au régime. Il a tout de même instruit ses représentants de déposer des recours contre les candidats Bassirou Diomaye Faye et Dr Cheikh Tidiane Dièye, pour le motif très léger d’être issu de l’ex-Pastef.

Les autres candidats reçus, eux, n’étant ni demandeurs ni défendeurs à un quelconque contentieux, pourront préparer tranquillement leurs troupes en vue d’engager la bataille du 25 février 2024.

Pour rappel, il y a sur la table des sept sages du Conseil constitutionnel une quarantaine de recours, dont la plupart visent à revoir les opérations de contrôle des parrainages.

Il faut souligner que le Conseil constitutionnel n’est pas tenu par les délais. Il a jusqu’à la veille de la campagne électorale, c’est-à-dire le 4 février, pour rendre publique sa décision.

Qu’en est-il alors de la date du 20 janvier annoncée par beaucoup comme deadline pour la publication de la liste définitive ?

En fait, cette date qui marque les 35 jours avant le scrutin était la date butoir pour la publication de la liste provisoire. Finalement, cette liste a été publiée le 12 janvier dernier, soit huit jours plus tôt. Sur le règlement des litiges, le Conseil constitutionnel n’est pas tenu par les délais. Il peut statuer le 20 janvier comme il peut le faire avant ou après. Seulement, les candidats doivent être connus d’ici au démarrage de la campagne électorale.

 

TAS et les Wade, une longue histoire

Entre l’ancien ministre de Macky Sall et la famille Wade et ses soutiens, l’inimitié ne date pas d’aujourd’hui. Dans son livre ‘’Le protocole de l’Élysée’’ publié à la suite de sa sortie fracassante du gouvernement, on sentait déjà toute sa rage envers l’ancien président et certains de ses ministres. Fonctionnaire de l’Asecna (Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar), ancien représentant de l’agence au Sénégal sous le règne de Wade, le candidat à la prochaine Présidentielle a réservé un bon chapitre de son ouvrage à la gouvernance du père de Karim Wade. Le jugement a été sans appel. ‘’Wade et les siens, accusait-il, pensaient que l’Asecna disposait de coffres regorgeant de liquidités… Étaient en jeu non pas des principes, mais comme dirait un ancien PM de Wade, ‘le partage du butin’’’, soulignait Thierno Alassane Sall, non sans ajouter : ‘’Ce qui se cachait derrière tout ce brouhaha relatif aux menaces de retrait du Sénégal, c’était une volonté de faire main basse sur le foncier mis à la disposition de l’Asecna.’’

Le point culminant de cette inimitié entre Sall et Wade a été quand le Sénégal menaçait de quitter l’organisation régionale, si certaines réformes souhaitées n’étaient pas mises en œuvre. Thierno Alassane Sall, qui était le représentant de l’Asecna et qui, visiblement, ne partageait pas la politique des autorités de l’époque, avait fini par en payer les frais.

‘’Il m’en veut juste parce que je l’avais limogé, sur instruction du président Abdoulaye Wade. C’était parce qu’il était de connivence avec des partenaires contre les intérêts du Sénégal. Abdoulaye Wade avait estimé qu’il est incompétent et qu’il n’était pas un patriote. Cette frustration, il la traine toujours’’, confiait Farba Senghor dans la note de lecture consacrée à l’ouvrage, intitulé : ‘’Asecna, une guerre sans fin’’.

 
Mor AMAR
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