La douloureuse remontée
Après 12 ans au purgatoire, le Saltigué de Rufisque retrouve l'élite sénégalaise du basket masculin cette saison. Mais malgré cette prouesse réalisée dans la difficulté, la ville affiche une indifférence totale.
Rufisque est vraiment une drôle de ville. L'actualité sportive de ce mois y vécue presque dans l'indifférence totale, et même quand cela concerne directement les clubs de la localité. Alors que son club sportif phare, le Saltigué, a retrouvé l’élite sénégalaise du basket-ball masculin, le 21 octobre dernier, après 12 longues années au purgatoire, les passionnés de sport de la commune se sont terrés dans leur demeure, quand les autres ont vaqué tranquillement à leurs occupations. La joie est vraiment mesurée même chez les joueurs, supporters et dirigeants. ''Nous sommes contents pour cette montée en première division après toutes ces années de disette'', sourit le coach adjoint du club rufisquois, Pape Moustapha Cissé.
''La main de Dieu''
Pourtant il y a bien des raisons d'exulter car le club vient de loin. ''Nous remercions Dieu pour cet exploit. Nous étions partis avec des difficultés mais les joueurs ont surmonté tous les obstacles pour obtenir ce résultat'', confie le capitaine Pape Karim Sow. ''C’est un vrai coup de chance parce que la préparation a vraiment fait défaut'', confie le capitaine. ''Depuis cinq ans, je suis derrière l’équipe et je dirais que c’est la pire des préparations que nous avons connues. Parce que, figurez-vous, nous sommes partis au tournoi de montée sans un sou. Nous étions confrontés à des problèmes internes d’ordre financiers et matériels. Lorsqu’une délégation sort d’une ville pour aller représenter ses couleurs, il y a un minimum'', rappelle Moustapha Cissé. ''Pis, nous vivons des moments trop durs pendant les regroupements. Il nous arrivait que, à des veilles de match, certains se mettent à chercher des chaussures. Seul Ass Gaye (ancien président FSBB), qui n’est que simple membre du Saltigué, qui mettait ses billes pour les regroupements, les déplacements et la prise en charge de certains joueurs blessés'', salue le vice-capitaine du Saltigué de Rufisque, Issa Laye Ba. Lequel voit ''sûrement la main de Dieu'' dans cette remontée en première division.
Durant tout leur parcours, les basketteurs révèlent avoir été laissé à leur triste sort. ''Le dimanche dernier (21 octobre, Ndlr), lors de la remise des trophées, nous n’avons vu qu'un seul membre du Comité directeur (du Saltigué). Il n’y avait que les gens de la Fédération sénégalaise de basket-ball (FSBB), les responsables des HLM'', d'après Issa Laye Ba. Comme pour s'excuser, le Comité directeur évoque une maladie du président du Saltigué. Et le président de la section basket, Modou Ndiaye, plus connu sous le nom de ''Fils'', tente d'esquiver le sujet. Il a prétexté un rendez-vous tout en promettant d'en parler après sans jamais honorer la promesse. Et l’inquiétude plane toujours chez les joueurs : ''Si les mêmes conditions continuent, nous ne resterons pas trop longtemps en première division'', prévient le capitaine Sow.
Les atouts des Saltigués
Malgré ces multiples problèmes, les joueurs étaient avaient le cœur à l'ouvrage et voulaient à tout prix retrouver l’élite et faire revivre leur ville. ''Rufisque a toujours été une ville de basket. Nous ne voulions pas que l’équipe joue éternellement en National 2 ou les play-downs. Il fallait y mettre fin. Lorsque les jeunes ont voulu bouder faute de moyens, nous avons appelé les uns et les autres dans une concertation pour leur dire qu’il est tant que nous soyons responsables. Car il serait absurde de tout laisser tomber après avoir surmonté tant de problèmes et après avoir été champion de la région de Dakar. C'était juste pour montrer au Comité directeur que même s’il ne nous prend pas en charge, nous assumerons nos responsabilités'', rappelle le capitaine Karim Sow.
La solidarité et le sacrifice sont à ajouter aux atouts du Saltigué. ''Il y avait un soutien mutuel entre nous, ce qui constitue une force non négligeable. Les joueurs et les entraîneurs étaient en osmose. Les coaches nous disaient toujours d’oublier la galère, d’être unis et de jouer pour Rufisque'', narre Issa Laye Ba. Une gestion psychologique très efficace. ''La méthode a payé parce que l’équipe n’a pas une seule fois été déstabilisée au cours de ses matchs. C'est grâce aux techniciens qui nous ont gérés comme il se devait sur tous les plans'', dit-il.
Il y a en outre une stabilité remarquable au sein de l'effectif rufisquois. ''L’équipe évolue avec la même ossature depuis un certain nombre d’années, en plus de renforts de taille. Les anciens joueurs ont accepté de revenir pour prêter main forte à l’équipe. Je veux dire qu’il y a un mélange de joueurs d’expérience et de jeunes qui ont évolué ensemble en cadets et juniors. En plus de cela, il y avait un fort mental au sein de l’équipe'', explique l’entraîneur adjoint, Pape Moustapha Cissé qui souligne l’apport du coach titulaire, Mamadou Ndiaye, un ancien basketteur militaire. ''Sa philosophie, c'est de faire accepter aux joueurs qu'il faut atteindre un objectif avant de demander quoi que ce soit'', apprécie M. Cissé.
PAPE MOUSSA GUÈYE
A suivre ....
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