Publié le 12 Aug 2013 - 16:30
ÉPIDÉMIE DE KORITÉ AU SÉNÉGAL

L'imam Habib Ly souhaite l'implication du chef de l’État

 

Après avoir fustigé l'incompétence de la Commission nationale d'observation et de concertation sur le croissant lunaire, l'imam de la mosquée de Liberté 6 Extension a appelé le Président Macky Sall à s'engager pour stopper le ridicule d'un système à deux Korité/Tabaski pour une communauté qui croit en un Dieu unique.

 

La célébration d'au moins deux fêtes de Korité par la communauté musulmane sénégalaise a été au centre du sermon de l'imam de la Grande mosquée de Liberté 6 Extension, vendredi dernier. Devant une assistance nombreuse de fidèles venus célébrer la fin du jeûne du mois de Ramadan, Mouhammad Habib Ly a fait une large analyse du phénomène de la division.

Si l'islam est «un», si la «foi» qu'il promeut est «unique», et «si Allah est le Dieu Unique», comment est-il possible qu'une communauté musulmane comme celle établie au Sénégal en arrive à organiser plusieurs fêtes de Korité en l'espace de 72 heures ?, s'est interrogé imam Mouhammad Habib Ly du haute de sa chaire. «Malheureusement, l'unité est l'exception, la division est la règle chez nous», a-t-il lâché.

Sur ce terrain, il a appelé le chef de l’État à peser de tout son poids afin que cette tendance devenue lourde soit inversée. «Le président de la République, s'il est conscient du pouvoir qu'il détient, peut aider les musulmans, l'islam et lui-même en s'impliquant dans la recherche de solution» à ce phénomène. Faisant peut-être allusion au risque encouru sur cette question, imam Habib Ly s'est montré optimiste : «(même) si Dieu ne lui donne pas un second mandat en 2017, Il lui donnera plusieurs mandats au Paradis» s'il devait pâtir de son engagement.

 

«Dérives communautaristes»

A la base de cette dérive communautariste, imam Ly a fustigé une «foi de l'associationnisme» en vigueur chez les musulmans et qui creuse les dissensions entre eux. Indiquant que des principes d'éparpillement n'existent ni dans le Coran, ni dans la Sunna du Prophète (psl), ni dans le Fiqh, imam Mouhammad Habib Ly se dit d'autant plus choqué que les Sénégalais se réfèrent pourtant dans leur écrasante majorité à une même école. «Les textes de Imam Malick sont assez explicites et les Sénégalais sont des Malékites», a-t-il indiqué.

Or, ce savant de l'islam a enseigné, à la suite du Prophète, que si deux personnes de bonne foi et crédibles attestent avoir vu la lune, la communauté musulmane doit en prendre acte et organiser la prière. «Ceci est d'ailleurs enseigné dans tous les daaras du pays, en même temps que les paroles du Prophète sur la question.» Rappelant l'interdiction stricte par l'islam de «suivre ses passions», l'imam de Liberté 6 Extension a expliqué combien il peut être difficile, sur un sujet comme celui sur le croissant lunaire, de faire passer la vérité devant ses propres convictions. «Mais c'est le chemin à emprunter pour réaliser l'unité des musulmans» à l'occasion des fêtes de Korité et de Tabaski, a-t-il souligné.

Ne mettant pas en cause la sincérité des membres de la Commission d'observation du croissant lunaire, imam Ly a souligné l'urgence de les faire encadrer par des spécialistes reconnus de la Charia et disposant de ce fait de solides connaissances transversales sur l'islam de manière précise et documentée. «Ce n'est pas parce qu'on est parent ou petit-fils de marabout qu'on est forcément expert en Charia ou capable d'émettre des avis islamiques pertinents», a-t-il avancé.

 

Refonte de la Commission

Au fond, imam Habib Ly préconise la réorganisation de la Commission autour de l'islam et de la Charia car le travail de détermination des jours de fête requiert la participation d'experts islamiques reconnus comme tels. A cet égard, il a invité les plus hautes autorités politiques sénégalaises ainsi que les chefs religieux à prendre leurs responsabilités parce que cette instance doit cesser d'être centrée sur les seules préoccupations des confréries qui la composent. «Ce qui est grave, a-t-il indiqué, c'est que cette division sur la Korité est justifiée au nom de l'islam !» C'est pourquoi il a appelé les musulmans, individuellement et collectivement, à refuser le fait accompli car «Dieu demandera des comptes à chacun d'entre nous».

Après avoir confirmé l'apparition de la lune dans plusieurs départements du pays dont Linguère, Ranérou, Koumpentoum, dans le Ferlo et dans le Djolof, bien avant que la commission décrète la fin du Ramadan, imam Mouhammad Habib Ly a plaidé en faveur d'un élargissement de l'observation du croissant à la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), ce qui serait conforme, selon lui, à la Fatwa (avis juridique plus ou moins contraignant) d'El Hadj Malick Sy sur ce point.

 

 

 

 

 

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