Grand-Mbao et Ouakam se révoltent
Les litiges frontaliers n’ont pas fini de faire des ravages. Ce week-end, les populations de Grand-Mbao et celles de Ouakam ont exprimé leur colère.
Il y a eu du grabuge, ce samedi, à Ouakam. Les populations se sont violemment opposées aux éléments de la gendarmerie. Les manifestants ont lancé des pierres en direction des forces de l'ordre, qui ont riposté avec des grenades lacrymogènes. Ils ont aussi brûlé des pneus et perturbé la circulation routière. Réunis autour du collectif Momelou Ouakam, ces habitants dénoncent l'accaparement des terres par des sociétés privées et des hommes politiques.
Ainsi, ils sont toujours contre l’attribution de parcelles aux joueurs de l’équipe nationale de football, une décision prise par Macky Sall à la suite des exploits des Lions à la Can-2021 au Cameroun.
Les Ouakamois exigent qu’on leur restitue le camp militaire, soutenant que les terrains occupés situés au niveau dudit camp leur appartiennent historiquement. Soutenant qu’ils n’ont même pas d'aires de jeu, ils exigent la création d'espaces verts et la construction de stades.
Ibrahima Alassane Mbengue, représentant du collectif, déclare : "Nous demandons la restitution de nos terres. Les espaces dédiés aux hommes de tenue doivent revenir aux habitants. Le morcellement des terres est un réel problème. Cité Avion n’a pas d’espaces suffisants pour des infrastructures revenant à la commune." Il note que des sociétés privées complices veulent accaparer leurs terres, alors que les autorités sont au courant.
"Ouakam est dans la promiscuité totale. De la cité à Touba Ouakam, il n’y a plus d’espaces. Nous avons besoin de ces terrains pour des infrastructures dans la commune. Nous ne voulons plus que les autorités parlent en notre nom… Elles ont montré leurs limites, car elles ne prennent plus en charge les aspirations des populations", a-t-il ajouté.
Il espère que les autorités ouvriront un dialogue constructif afin d'éviter de nouvelles violences.
Grand-Mbao
Cette même tension risque d'avoir lieu à Grand-Mbao où les populations sont profondément préoccupées par les agissements d’un homme du nom d’El Hadj Mamadou Dial Niguel. "Cette personne est venue menacer, depuis quelque temps, d’expropriation des terrains que des personnes ont acquis il y a 80 ans", a indiqué leur porte-parole lors du point de presse.
En effet, un différend foncier concernant un terrain de 600 m² a suscité des tensions au sein de cette communauté. "Ce terrain, cédé en 1995 par Ousseynou Diagne au défunt Assane Ndoye dit Assane Tahir Ndoye, transporteur, est situé sur le titre foncier 249 D/P, dans la localité de Grand-Mbao village", ont expliqué les résidents. Ils ont également fait un retour sur l'historique, notant que Grand-Mbao est un village traditionnel dont l'histoire remonte bien avant l'arrivée des explorateurs européens dans la région du Cap-Vert.
Fondé autour de 1440, il s'agit d'un village lébou avec un riche patrimoine et des traditions bien ancrées. "Le terrain en question fait partie intégrante de cet héritage historique, ce qui confère aux habitants autochtones de Grand-Mbao un droit légitime sur leurs terres ancestrales", a indiqué leur porte-parole. Il renseigne que ce litige foncier a déjà été examiné par les instances judiciaires compétentes.
L'arrêt n°315 rendu le 16 mai 2022 par la première chambre correctionnelle a tranché la question, déboutant les prétentions d’Oumoukhayrou Seck, dit-on. "Cependant, malgré cette décision, un rapport contradictoire a été produit le 16 février 2023 par le chef du bureau du cadastre de Pikine, ce qui a relancé inutilement un contentieux déjà résolu", regrettent les populations de Grand-Mbao.
Dans ce contexte, il juge déplorable qu'un certain individu, dénommé Djigueul, tente de raviver ce différend avec "des prétentions infondées, qui ne sont rien de moins qu'une tentative d'humilier les habitants autochtones de Grand-Mbao".
Toujours par rapport aux spoliations foncières, les populations ont aussi donné l’exemple du terrain appelé à l’époque "bâtiment". Cet espace, explique-t-on, a été acheté par la mairie de Dakar en 1955 pour le compte du village de Grand-Mbao pour loger les enseignants devant servir à l’école Mame Wassour Seck. Ces actions sont, aux yeux des populations, "non seulement offensantes, mais elles montrent également un manque total de respect envers la dignité des Lébous de Grand-Mbao, un peuple qui a toujours défendu ses droits avec honneur et intégrité".
Les notables appellent les populations à rester unies et à ne pas céder aux provocations. "La force de Grand-Mbao réside dans son unité et sa capacité à résoudre les différends de manière pacifique et respectueuse des lois. Nous devons continuer à travailler ensemble pour préserver notre patrimoine et nos droits légitimes, tout en rejetant fermement les prétentions offensantes de ceux qui cherchent à porter atteinte à notre dignité", ont-ils soutenu.
PAR BABACAR SY SEYE