Publié le 24 Jul 2019 - 03:37
ASSASSINAT DU JOURNALISTE GAMBIEN EN 2004

Les meurtriers de Dayda Hydara enfin connus 

 

Un coup de tonnerre dans un ciel serein. L’assassinat du journaliste Gambien Dayda Hydara, perpétré le 16 décembre 2004, raconté par l’un des bourreaux dans un récit glaçant. Cela s’est déroulé ce lundi devant la Commission vérité et réconciliation mise en place pour faire la lumière sur les dérives du régime dictatoriale de Yahya Jammeh (1994-2017).

Le lieutenant Malick Jatta des Forces armées gambiennes a avoué avoir participé au meurtre du journaliste chevronné Deyda Hydara, ancien correspondant de l’AFP et cofondateur du journal Gambien The Point.

Dayda Hydara a été tué par des hommes armés non identifiés le 16 décembre 2004, à l'occasion du 13e anniversaire de son journal The Point. Le gouvernement de Yahya Jammeh a toujours nié à plusieurs reprises toute implication dans le meurtre du doyen de la presse en Gambie.

Dans son témoignage devant la Commission vérité, réconciliation et réparations, le lieutenant Jatta, membre de l’escadron blindé de l’ancien autocrate, a fait de fortes révélations. Il a confirmé les spéculations de l’opinion sur l’implication du président Jammeh sur le meurtre du journaliste Hydara. Mieux, il a révélé que Jammeh en a été le commanditaire.

Il raconte: « Tumbul Tamba (Ndlr: considéré comme l'un des plus grands assassins du régime de Jammeh) nous a dit qu'aujourd'hui nous allons chercher le « stylo magique ». ‘’Magic Pen’’, a été le nom de l'opération consistant à l’élimination du journaliste Deyda Hydara.

Le lieutenant Malick Jatta de poursuivre que Tumbul Tamba, commandant de l’opération, avait conduit l’équipe de Kanilai, village natal de Jammeh, à Serrekunda, théâtre de l’opération. Il explique que Tumbul a utilisé son propre véhicule jusqu'à Kanifing avant de prendre un taxi dans un garage appartenant à l'ex-président Jammeh. Ce taxi a servi à exécuter l’opération. «Il faisait nuit. Sana Manjang, Tumbul Tamba (commandant) et Alieu Jeng ont garé le véhicule et nous ont ordonné de monter dans le taxi de marque Mercedes Benz 200. Tumbul prit la place du conducteur. Sana Manjang était à sa droite. Alieu Jeng était assis derrière lui. J'étais assis à gauche », a déclaré le lieutenant Jatta devant la commission.

Il poursuit que la voiture a roulé jusqu’au feu sur l'avenue Kairaba avant de se garer. A cet endroit, Tumbul a parlé au téléphone avec le président Jammeh. J’ai deviné que Tumbul parlait à Jammeh à cause de la fréquence des appellations fréquentes: «oui monsieur! Votre Excellence!»

Le lieutenant de poursuivre : «Pendant que nous étions garés là-bas, j'ai vu deux autres taxis nous dépasser avec des soldats à bord. C’était une V-boot et une Benz 190. L’une avait à son bord Kawsu Camara alias Bombardier et la deuxième, le commandant Manlafi Corr. Je sais que Bailo était le conducteur de Bombardier et que Bora Colley était avec Manlafi Corr. L'un des taxis a effectué un trajet rectiligne et s'est dirigé vers le stade et l'autre s'est élancé vers l'avenue Kairaba. »

Tumbul était celui qui coordonnait les deux autres taxis concernant, confie le lieutenant Jatta dans un récit captivant. Selon lui, Tumbul aurait par la suite pris un virage en direction de l'extrémité du stade, faisant face à l'autoroute Observer de Bakau. A environ trois ou quatre mètres de l'autoroute, ils se sont garés alors que Tumbul descendait de la voiture en fixant des yeux son côté gauche.

«À un moment donné, il s'est approché du véhicule et a fait un demi-tour rapide. Nous avons repris l'itinéraire que nous avions emprunté et sommes revenus au feu. Nous avons ensuite suivi cette route pour contourner Westfield, puis nous nous sommes dirigés vers Banjul. Lorsque nous avons dépassé la caserne PIU, il y avait une route à droite. Nous sommes passés devant le garage de la police et il y avait un véhicule devant nous. Au début, nous ne savions pas qu'il courait après un véhicule.»

 Tumbul a dépassé le véhicule ciblé s’est mis devant et a crié : «Messieurs, le chauffeur, hé l’idiot ! », raconte le témoin du jour.  « Lorsque Tumbul a donné l’ordre, aucun de nous n’a tiré. Il a presque dépassé le véhicule et je peux dire sans me tromper que le coup est venu d’à côté… Il criait : tirez, tirez, vous feriez mieux de tirer ! Lorsque nous avons tiré, il a continué à rouler, s’engouffrant dans les rues ».

Le conseiller juridique Essa Faal a demandé au lieutenant Jatta de citer les personnes qui ont tiré sur la cible et il a avoué : « Moi-même, Jeng et Manjang, même si j'étais excentré. Du côté gauche du véhicule, je suis venu rejoindre Jeng pour lancer un coup de feu. Pour être honnête, Tumbul n’a pas tiré. Il donnait l'ordre et conduisait le véhicule sans s’arrêter».

Le lieutenant Jatta a avoué qu'ils n’avaient reçu aucune information sur l'identité de leur victime. Après leur acte, il a révélé qu'ils sont ensuite allés chercher leur véhicule au garage en y déposant le taxi utilisé pour l'opération, avant de retourner à Kanilai.

« Personnellement, j'ai tiré une balle. Je ne peux pas savoir combien de balles ont été tirées par mes collègues », a-t-il déclaré avant de confier que, sur la route vers Kanilai, personne ne parlait dans la voiture. Il a soutenu devant les enquêteurs que, le lendemain, Tumbul les avait rencontrés pour leur remettre des enveloppes contenant des dollars en guise de remerciement de la part du « Grand maître », faisant référence à l’ex-président Yahya Jammeh. « Quand j’ai fait le change, je ne me souviens plus, mais j’ai cru avoir récolté plus de cinquante mille dalasis. Nous avions tous reçu des enveloppes », dixit le lieutenant Jatta. Il confie n’avoir connu l’identité de la victime qu’au lendemain de l’assassinat, lorsqu’il a appris que c’était le journaliste Deyda Hydara.

Il déclare : « J’étais paniqué, traumatisé et très effrayé, lorsque j’ai entendu l’ancien président condamnant le meurtre, alors que c’était lui qui avait donné l’ordre ».

Malick Jatta a aussi avoué devant les membres de la commission avoir participé au meurtre de Dawda Nyassie, toujours sous le commandement de Tumbul Tamba, en 2003, dans la brousse près de Bafuluto, dans la région de la côte ouest.
« Selon le briefing, il ne fallait pas laisser éclore la rébellion. Tumbul Tamba nous disait cela à moi, Sana Manjang et Alieu Jeng. Quoi que nous fassions, c’’était sous son commandement et il était toujours présent. Malick Jatta doit réapparaître devant le TRRC, mardi, pour poursuivre son témoignage.

Infosansfrontieres.com

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