Publié le 27 Oct 2020 - 23:16
CELLOU DALEIN DIALLO, OPPOSANT GUINEEN

‘’Je n’attends rien de la mission de la CEDEAO, de l’Union africaine et de l’ONU’’ 

 

Depuis dimanche dernier, les trois organisations ont dépêché des émissaires pour tenter de ramener le calme en Guinée.   

 

‘’Je ne fais pas confiance à la CEDEAO’’. ‘’Elle a toujours joué le jeu d’Alpha Condé’’. Cellou Dalein Diallo montre ainsi son scepticisme sur les propositions que pourraient apporter la mission menée par l’organisation sous-régionale en Guinée depuis dimanche. Assistée de l’ONU et de l’Union africaine, elle espère apaiser les tensions post-électorales.

Mais, du côté de l’opposant guinéen, l’on ne s’attend pas à trop de miracles. Surtout pas de solutions qui remettent en cause la sincérité du scrutin du dimanche 18 février 2020. 

Huit jours après l’organisation de l’élection présidentielle, la tension n’a toujours pas baissé dans le pays. Malgré les dénonciations de fraudes massives par le candidat Cellou Dalein Diallo, la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a désigné le président sortant Alpha Condé vainqueur de la Présidentielle au premier tour. Les manifestations de désapprobation ont éclaté. Des personnes sont mortes. Mais jusqu’ici, aucune condamnation du processus menant à l’élection. Ou encore de la fiabilité des résultats prononcés par la Ceni.

C’est dans ce contexte que la mission, qui comprend notamment Jean-Claude Kassi Brou, le président de la Commission de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et Mohamed Ibn Chambas pour les Nations Unies, doit rencontrer toutes les parties. Cela comprend des rencontres avec les responsables de la Ceni, le Premier ministre, les ambassadeurs du G5-CEDEAO, ainsi que les ambassadeurs africains. Puis, au programme aussi, des rencontres prévues avec les deux principaux acteurs du bras de fer, Alpha Condé et Cellou Dalein Diallo.

Ce dernier a révélé hier qu’il n’attend ‘’pas grand-chose de ces émissaires de la CEDEAO, de l’UA et des Nations Unies’’. En réalité, explique-t-il, ‘’ils se sont toujours rangés du côté d’Alpha Condé. Mais il est important de saisir toutes les opportunités pour communiquer les informations qui mettent en évidence notre victoire à l’élection présidentielle du 18 octobre et pour attirer l’attention sur la répression sanglante qui est en train de s’abattre sur les Guinéens’’.

Pour celui qui s’est déclaré vainqueur, au lendemain du scrutin, c’est uniquement pour ces motifs qu’il a accepté de rencontrer ces émissaires. Toutefois, il se dit ‘’convaincu que notre victoire ne peut être défendue que par nous-mêmes. Continuons notre mobilisation dans les rues et sur les places publiques pour exiger le respect de la vérité des urnes’’.

Seulement, un problème subsiste. Cellou Dalein Diallo est ‘’bloqué’’ dans sa demeure depuis le 21 octobre.  Un dispositif sécuritaire composé de pick-up ainsi que de camions de la gendarmerie et de la Cmis (Compagnie mobile d'intervention et de sécurité), une unité de la police, bloque chacun des accès routiers. Il est ainsi difficile de savoir si la mission réussira à le rencontrer.

Dans un entretien accordé hier à lepoint.fr, l’opposant guinéen dénonçait ses conditions de vie. ‘’Il n'y a absolument rien qui justifie une telle épreuve. Monsieur Alpha Condé fait ce qu'il veut. Il utilise les pouvoirs liés à sa fonction de président de la République pour entraver ses adversaires, pour essayer de les neutraliser et de casser leur moral. Mais mon moral n'est pas cassé. Je suis déterminé. Ce qui me fait mal, c'est de voir des enfants, des jeunes de moins de 30 ans être tués. Ils sont innocents, et à supposer même qu'ils aient commis une infraction, comment peut-on faire usage d'une arme à feu pour les abattre ?’’, regrette-t-il.

Une organisation de défense des Droits de l'homme a déclaré, dimanche 25 octobre, que les forces de sécurité avaient tiré à balles réelles contre des manifestants. Fabien Offner, chercheur pour l’Afrique de l’Ouest et centrale à Amnesty International, a assuré avoir travaillé sur ‘’une vidéo qui a été authentifiée. Cela s’est passé à Kobaya, dans la banlieue de Conakry, le 21 octobre : trois personnes en uniforme, dont une tire à trois reprises en direction de civils présumés.

La réplique des autorités guinéennes a été apportée par Albert Damantang Camara. Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a, lui aussi, assuré qu'il n'y aura pas d'impunité, si des crimes ont été commis. Il a demandé à Amnesty International de transmettre les preuves que l'ONG affirme détenir afin que la justice puisse faire son travail.

GUINEE

Deux vice-présidents de l’UFDG arrêtés, après avoir rencontré les émissaires internationaux

Des représentants de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) ont rencontré, hier, lors d’une réunion, la mission de la CEDEAO, de l’Union africaine et de l’Organisation des Nations Unies. Seulement, après la discussion, deux d’entre eux auraient été arrêtés par des éléments appartenant à la police. En tout cas, si l’on en croit Cellou Dalein Diallo.

 ‘’Au sortir de la réunion avec la mission de la CEDEAO, de l’UA et des NU à laquelle ils ont participé, Fodé Oussou Fofana et Kalémodou Yansané, tous deux Vice-Présidents de l’UFDG, ont été kidnappés par la police et conduits vers une destination inconnue’’ a-t-il annoncé sur les réseaux sociaux.

Sans décolérer, le président de l’UFDG a mis ce qu’il assimile à un kidnapping de ses partisans sous la faute des trois organisations africaines et internationale : ‘’Leurs institutions sont les seules responsables de l’incarcération des deux vice-présidents de l’UFDG.’’ Le kidnapping de Kalémodou Yansané et de Fodé Oussou Fofana ‘’par la police d’Alpha Condé’’, ajoute-t-il, au sortir de la réunion avec ces émissaires, ‘’est une preuve éloquente du peu de respect et de considération que le despote guinéen accorde à ces émissaires’’.

Lamine Diouf

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