Publié le 14 Mar 2024 - 20:34
CRISE AU SEIN DE LA MAJORITÉ, RECOURS DU PDS, LIBÉRATION DE SONKO ET DE DIOMAYE FAYE

La drôle de campagne

 

L'élection présidentielle de 2024 se déroule dans un contexte particulièrement atypique et chargé de tensions, marqué par une série de rebondissements dignes d'un roman politique. À quelques jours du scrutin, l'atmosphère politique du pays est électrique, chaque acteur jouant une partition qui pourrait redéfinir l'avenir de la nation pour les années à venir.

 

On dirait ‘’24 heures chrono’’ avec l’acteur principal Jack Bauer à la manette, chaque jour avec un lot d’évènements pouvant changer le cours du film. La particularité de cette élection présidentielle 2024 se fonde sur plusieurs rôles joués par des acteurs de premier et de second plan.

L’un des derniers épisodes avant le scrutin est la décision tant attendue de la Cour suprême de demain vendredi 15 mars. La haute juridiction va statuer, à la suite du recours du Parti démocratique sénégalais (PDS) et de ses alliés contre le décret portant convocation du corps électoral.

Une décision qui va orienter les prochaines scènes et scénarios à venir de cette élection qui a connu déjà plusieurs surprises. Les juges peuvent reporter le scrutin jusqu’au 31 mars, en se référant à la décision du Conseil constitutionnel, maintenir la date du scrutin le 24 mars ou l’annuler, selon les différentes interprétations des juristes.

Les libéraux avaient introduit, le lundi 11 mars, une requête aux fins de référé suspension à la suite d’une requête en annulation des décrets du 6 mars 2024 (2024 - 690) fixant la date de l’élection présidentielle au 24 mars 2024, du 6 mars 2024 (2024-691) convoquant le corps électoral et du 7 mars 2024 (2024-704) fixant la période de la campagne électorale.

Les mêmes acteurs du PDS comptent jouer les prolongations au cas où ils seront déboutés par la Cour suprême. Le président du groupe parlementaire Liberté, démocratie et changement du PDS, Mamadou Lamine Thiam, soutient la dissolution du Conseil constitutionnel accusé de corruption par ses camarades de parti et lui. ‘’Les audio qui circulent dans les réseaux sociaux prouvent à suffisance des tractations financières pour éliminer notre candidat. Le CC est définitivement discrédité. C'est la voix d'Amadou Ba et de membres du Conseil constitutionnel qu'on entend’’, affirme-t-il au cours d'un point de presse.

Karim Wade et ses soutiens espérant à nouveau faire capoter le processus électoral comme le 2 février dernier, en déclenchant une enquête parlementaire.

Par cette série d’actions, l'indépendance et l'intégrité du processus électoral sont remises en question, avec des accusations de corruption qui pèsent sur deux membres du Conseil constitutionnel. Chargée de valider les résultats de l'élection présidentielle, cette institution clé est désormais perçue comme un pion dans le jeu politique, sapant la confiance de certains électeurs dans la légitimité du scrutin à venir.

Au cœur de cette tourmente, l’un des candidats favoris du scrutin, Bassirou Diomaye Faye (ex-Pastef), malgré une popularité indéniable auprès d'une large frange de la population, mène sa campagne depuis sa cellule de la prison du Cap Manuel. Accusé d’outrage à magistrat, son incarcération depuis presque un an n'a fait qu'accroître son aura de martyr auprès de ses supporters qui dénoncent une incarcération politisée visant à l'écarter de la course présidentielle.

Sa libération et celle de son mentor Ousmane Sonko pourraient redéfinir le cours de cette élection qui semble être la plus incertaine de l’histoire du pays. Plusieurs sources non officielles ont annoncé leur libération ce mercredi 13 mars 2024.

Amadou Ba : Un soutien vacillant dans son propre camp

Face à lui, le candidat du régime, Amadou Ba, peine à fédérer, malgré le soutien officiel de Macky Sall qui l'a récemment appelé au palais pour arrondir les angles, selon plusieurs médias. Même s'il bénéficie du soutien de certains ministres et l'accès privilégié aux médias d'État, ses partisans (Lat Diop, Doudou Ka) pensent que les autres membres du régime ne s’impliquent pas pour sa victoire.

Dans la foulée, une retrouvaille des libéraux entre Boun Abdallah Dionne et le PDS n’est pas exclue. Une entente qui pourrait être qualifiée de syndrome de Stockholm, eu égard aux divergences entre l’ancien Premier ministre les ouailles de Karim Wade.

Par ailleurs, la défiance croissante d'une partie de la population à l'égard des institutions et l'accusation de maintenir le statu quo ont sérieusement érodé sa base électorale, le plaçant dans une position délicate face à l'appétit de changement exprimé par certains électeurs.

Ajoutant à la complexité de la situation, la campagne électorale se déroule en plein ramadan et carême chrétien, un timing qui pourrait influencer la participation et l'engagement des citoyens dans le processus électoral. Les candidats sont contraints d'adapter leurs stratégies de campagne pour respecter la sensibilité de cette période de jeûne et de prière, tout en essayant de mobiliser leurs bases.

Dans ce contexte explosif, l'élection présidentielle du 24 mars s'annonce comme un scrutin historique, capable de redéfinir les contours politiques du pays. Entre défiance, aspirations au changement et recherche d'une stabilité politique, les électeurs sont face à un choix qui déterminera non seulement leur avenir immédiat, mais aussi la trajectoire à long terme du Sénégal.

À l'approche du jour J, tous les yeux sont rivés sur ce petit pays, devenu le théâtre d'une lutte acharnée pour le pouvoir, reflétant les enjeux démocratiques et les défis auxquels sont confrontées de nombreuses sociétés à travers le monde. L'issue de cette élection pourrait bien envoyer un signal fort au-delà de ses frontières, sur la vitalité de la démocratie sénégalaise en temps de crise.

Amadou Camara Gueye

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