Publié le 2 Aug 2023 - 19:44
DISSOLUTION PASTEF

Une décision à l’efficacité douteuse !

 

Par la force de son travail et la perspicacité de son leader, Pastef est devenu une réalité politique indéniable au Sénégal. Sa dissolution ne saurait avoir d’impact véritable sur l’esprit qu’il est devenu dans le cœur de beaucoup de Sénégalais. Le Parti est toutefois appelé à faire sa mue, pour espérer compétir aux échéances électorales futures.

 

A la suite de sa dissolution par décret présidentiel, une multitude de questions se pose sur l’avenir du Parti Les patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastetf). Que va-t-il advenir du Parti, de ses dirigeants, de ses élus, de ses militants ? En fait, l’un des premiers constats est que la dissolution n’apporte pas de changements majeurs sur la participation du Parti aux élections. De toute façon, comme le rappelait le Parti lui-même dans son dernier communiqué, il n’a jamais participé aux élections sous sa propre bannière. ‘’Ce énième décret antidémocratique de Macky Sall est un non-événement. La seule chose qui vaille, c’est la participation du Président Ousmane Sonko, le porteur du projet Pastef, à la présidentielle de 2024. Sur le plan politique, nous rappelons que Pastef-Les Patriotes n’est jamais parti à une élection sous sa bannière’’, réagissait le Bureau politique. 

Non seulement, ils peuvent participer à des élections sous la bannière d’une coalition, en tant qu’indépendants, ou même en utilisant le récépissé d’un autre parti, comme le font beaucoup de mouvements et personnalités publiques. Aussi les membres du parti peuvent continuer de mener certaines activités, tant que cela ne requiert pas de formalités particulières. Seulement, ils ne peuvent plus se prévaloir de la qualité de parti pour prétendre aux droits attachés à cette qualité, ni de la personnalité juridique qui leur permettait d’accomplir certains actes. Sauf à créer une autre organisation qui va devoir se distinguer du désormais ex-Pastef.

L’ancien gouverneur Cheikh Mbagnick Ndiaye explique : ‘’L’essentiel est que le nom du Parti doit changer, même si les objectifs peuvent rester les mêmes. C’est pour éviter la confusion avec le récépissé de reconnaissance de l’autre parti qui est dissous.’’

Aux termes de l’article 1er de la loi 81-17 du 6 Mai 1981, les partis politiques sont constitués sous forme d’association, selon les dispositions des articles 812 à 814 du Code des obligations civiles et commerciales. Il ressort de l’article 812 alinéa 1er du COCC que ‘’l'association se forme librement sans aucune formalité que celle de la déclaration préalable et de l'enregistrement de cette déclaration’’.

En principe, l’autorité administrative ne peut refuser l’enregistrement de cette déclaration. Toutefois, la loi prévoit un certain nombre de limites. ‘’L'autorité administrative compétente ne peut refuser l'enregistrement que pour des motifs de légalité et notamment : -si les statuts ne sont pas conformes aux dispositions de l'article 814 ; -si l'objet de l'association est illicite ou s'il résulte de présomptions graves et concordantes que sa constitution est en fait destinée à porter atteinte à l'ordre public…’’

Un trésor électoral qui fait saliver beaucoup d’opposants

Dans la même veine, l’article 812 a prévu à son alinéa 2 tiret 3 une autre limite qui pourrait être opposée aux dirigeants de Pastef dans le cas où ils souhaiteraient créer une autre formation politique, mais cela est strictement encadré par les textes. Il s’agit en effet du cas où l'association nouvellement constituée s’avère être en fait ‘’la reconduction d'une association dissoute par l'autorité judiciaire ou par le pouvoir exécutif dans les conditions prévues par l'article 816. Le refus d'enregistrement doit cependant être motivé et il peut faire l'objet du recours pour excès de pouvoir devant la Cour suprême’’, précise le texte.  

En attendant, l’Etat est en train de mettre à exécution son plan de démantèlement du désormais ex-parti de Sonko, en fermant la plupart de ses sièges. Après le siège principal sis à Dakar qui a été fermé, dès que la mesure a été prise, certaines sources ont fait état de la saisine de la Police et de la Gendarmerie dans d’autres localités pour fermer toutes traces de Pastef.

Pour les soutiens de Sonko, c’est peine perdue. ‘’Lorsque nous disions que les grands-parents de celui qui peut dissoudre Pastef ne sont pas encore nés, nous ne faisions certes pas référence à un acte administratif abusif et illégal. Il s’agit bien de l’esprit Pastef’’, fulminait le Bureau politique.

Pour le moment, l’urgence chez les dirigeants de l’ex parti politique semble être l’élection présidentielle du 25 février 2024. Pour ce faire, il faudra batailler ferme pour faire recouvrer au leader politique ses droits civiques et politiques. Ce qui est loin d’être gagné. D’ici là, ils sont nombreux les observateurs à être convaincus que Pastef devra faire sa mue, pour éviter les erreurs du passé.

Ancien membre de la formation, Serigne Ampastef a posté ce commentaire sur sa page tout de suite après la dissolution. ‘’C’était prévisible, la stratégie était mauvaise et vous n’avez jamais voulu écouter ceux qui prônaient des changements profonds au niveau des instances dirigeantes du Parti. Désormais, soit vous continuez dans votre stratégie du chaos et vous pouvez être sûrs de tout perdre ; soit vous réfléchissez à une meilleure stratégie, républicaine, pour renaître de vos cendres.’’

Conscients en tout cas du poids électoral que représente l’ex-parti, mort ou vif, ils sont nombreux les partis politiques de l’opposition qui feignent de les soutenir, mais qui en réalité ne visent qu’à capter ses électeurs, dont la probabilité de ne pas avoir de candidat à la prochaine présidentielle est de plus en plus agitée.  

MOR AMAR

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