Hissein Habré ne veut plus de Me El Hadj Diouf
La rencontre entre Me El Hadj Diouf et Idriss Déby est une pilule amère pour Hissein Habré. L’ancien président tchadien estime que son avocat a maintenant choisi son camp.
Avocat de Hissein Habré, depuis 14 ans, Me El Hadj Diouf a rencontré récemment Idriss Déby, l’actuel président tchadien et ennemi juré de son client. Cet épisode a du mal à passer du côté de l’ex-président tchadien, même si Me El Hadji Diouf continue à lui jurer loyauté. Si on en croit le communiqué parvenu à EnQuête, Hissein Habré ne veut plus de lui comme conseil. Le document transmis à « EnQuête » et signé par l’ex-président détenu à la prison du Cap Manuel pour crimes internationaux, fustige la rencontre survenue le 17 décembre dernier à Dakar, entre Me El Hadj Diouf et Idriss Déby, en marge du sommet sur la Paix et la sécurité.
Selon la défense de Habré, le Président Habré n'a pas été informé par leur confrère. Par conséquent, les avocats estiment que Me Diouf a agi pour son compte personnel. Mieux, les conseils considèrent que l’avocat-député « a désormais choisi une autre voie, sans mandat ni concertation aucune avec le Président Habré dont il a porté la cause pendant 14 années, avec engagement sur tous les fronts judiciaire, politique et médiatique ». Non seulement, Me El Hadji Diouf « s'est concerté d'une part, avec Idriss Déby qui a fait condamner à mort le Président Habré en 48 heures aux termes d'une mascarade judiciaire », mais l’avocat est aussi accusé d’être de connivence avec « ceux qui sont impliqués au premier plan dans l'opération de liquidation du Président ! »
« Nous prenons acte du choix qu'il a fait et de sa nouvelle vision de l’affaire », ajoutent Habré et ses conseils qui n’ont pas manqué de s’en prendre à l’Etat du Sénégal. Ils accusent les autorités, avec au premier chef le président de la République, d’avoir facilité la rencontre. Pour la défense de Habré, cette démarche traduit « un abus de pouvoir dominant », mais aussi fait partie des manœuvres visant à nuire à la défense, dans la mesure où les preuves contre leur client font défaut.
Opération Maître El Hadj Diouf
Ainsi, ce que les avocats appellent «opération Maître El Hadj Diouf» heurte, à leurs yeux, « les consciences et viole les règles déontologiques de la profession d'avocat ». Au-delà des questions d’éthique et de morale, Habré et sa défense estiment que cette affaire « les édifie, chaque jour, sur le fossé immense entre le discours sur une gouvernance démocratique et vertueuse et une pratique politique nauséabonde ». Et d’ajouter : « Chaque jour qui passe, le Tout-Puissant met à nu les comploteurs et expose au grand jour leurs méthodes immorales, illégales et scandaleuses déployées à grand renfort d'argent, de pressions, des agissements qui démontrent quotidiennement que l'affaire Hissein Habré n'a jamais été une affaire de justice, mais un sordide complot politique. »
Cette discorde entre Hissein Habré et le tonitruant avocat Me El Hadj Diouf est la conséquence de la rencontre entre la robe noire et le président Déby. Une rencontre que la robe noire semble minimiser. «Je l'ai vu rapidement. On s'est vus. Je pense qu'il faut trouver des solutions. Même après les grandes guerres mondiales, la France et l'Allemagne ont signé l'armistice », a déclaré Me Diouf à l’émission Grand-Rendez de la 2Stv repris par Leral. L’avocat de poursuivre : « L'ennemi des Chambres africaines extraordinaires, c'est Déby. Le rencontrer, ça ne doit pas surprendre ». L’avocat parlementaire a ajouté qu’il ne va jamais trahir Habré, car son travail consiste à le libérer et non à l’enfoncer. Apparemment, il n’a pas réussi à rassurer son client.
FATOU SY