Le gendarme Kabou perdu par ses démons
Brice Danty Lo Kabou, gendarme en service à la compagnie de gendarmerie de Kolda, a été déféré mardi au parquet puis placé sous mandat de dépôt. Il a abusé de la confiance de huit citoyens.
Né le 27 novembre 1978 à Niaguis, région de Ziguinchor, Brice Danty Lo Kabou est présenté comme un coutumier des faits d’abus de confiance. Ce marié et père de deux enfants a déjà purgé 4 mois de prison pour le même délit. Dernièrement, il a fait courir la nouvelle selon laquelle il était chargé de la vente de motos saisies par la gendarmerie. Que c’était des motos toutes neuves vendues entre 230 à 240 mille francs CFA. « Un prix abordable pour aider les populations de Kolda », disait-il à qui voulait l’entendre. Ainsi, du haut de son statut de gendarme, il n’a eu aucun mal à s’attirer une clientèle nombreuse. Ousmane Sagna, une de ses victimes, témoigne : « Brice Danty Lo Kabou est d’une finesse d’esprit incroyable. Quand il vous parle, vous croyez avoir affaire à un saint. Or, tout ce qu’il vous dit n’est que mensonge. » Ce professeur habite à Sikilo, un des quartiers de la commune de Kolda.
En effet, l’information selon laquelle le gendarme Brice vend des motos toutes neuves s’est répandue dans la capitale du Fouladou et du Pakao comme une traînée de poudre. Tombés sous le charme du prix abordable, les clients se sont rués vers le gendarme, ignorant totalement qu’ils avaient affaire avec un escroc connu des fichiers de la justice de Dakar et de Kolda, en passant par Sédhiou, où il a eu à servir la nation. A ce jeu, il est parvenu à empocher la somme de 1 900 000 francs CFA de huit clients. Ensuite, il leur donnait d’interminables rendez-vous qu’il ne respectait jamais. Ne parvenant pas à rentrer dans leurs fonds, ni même à voir la couleur des motos, ils se sont rendu compte qu’ils avaient affaire à un grand escroc. Ils ont fini par mettre au parfum la police, à travers une pluie de plaintes. C’est ainsi que les élèments du commissariat ont procédé à l’interpellation du gendarme. Après audition, « en exécution des instructions de monsieur le procureur de la République près le tribunal régional de Kolda, il a été déféré au parquet, puis placé sous mandat de dépôt.
‘’Ce qui m’arrive, c’est un problème familial’’
Avant cela, il a été entendu. A la question de savoir s’il connaissait les plaignants, Alain Mendy, Mouhamadou Bassirou Sabaly, Abdoul Ba, Kéba Cissé, Xavier Sumpa Mantane, Ousmane Sagna, Malick Mané, Ousmane Keita, il a répondu par l’affirmative et reconnu les faits qui lui sont reprochés. « Tout ce que les plaigants ont dit sur moi est vrai », a répondu l’inculpé, avant d’évoquer un mauvais sort qui le poursuit. « Je suis gendarme.
Mon père fut également gendarme. Mais, à dix ans de la retraite, il a été atteint de ce qui m’arrive présentement et il est décédé. Le sort qui a emporté mon père me poursuit. C’est pourquoi il m’est arrivé de songer à démissionner de la gendarmerie pour avoir la paix. C’est mieux pour moi. J’ai été garde du corps de hautes autorités. Je traînais leurs valisettes qui contenaient cinq, dix millions et même plus. Mais jamais je n’ai soutiré à ces autorités le moindre centine. Aujourd’hui, je suis devant vous pour avoir pris l’argent d’autrui. Ce qui m’arrive, c’est un problème familial que j’ai expliqué au général Fall de la gendarmerie. C’est d’ailleurs grâce à lui que j’ai été affecté en zone sud, pour que je puisse me soigner de manière traditionnelle. »
« Mais depuis que je suis là, il m’est pratiquement impossible d’obtenir une permission pour m’occuper de ma santé. Je suis fatigué, très fatigué même, parce que chaque fois, c’est de moi qu’on parle », a-t-il confié aux enquêteurs. A propos des sommes reçues, il a ajouté : « Je ne peux pas vous dire ce que je fais de cet argent. Dès que le plaignant se présente à moi pour réclamer son argent, je vais emprunter ailleurs ; et la chaîne continue sans que je ne me rende compte. C’est après coup que je me rends compte que j’ai fait une bêtise. » Toutefois, il a promis de rembourser ses dettes, le 8 mai 2015. Ce jour-là, il doit recevoir un prêt. « Encore une fois, tout ce qui m’est reproché, je l’ai fait inconsciemment. »
Selon une source proche du dossier, pour l’exemple, le gendarme sera puni par la loi et même démis de ses fonctions, car il fait la honte à la gendarmerie nationale.
EMMANUEL BOUBA YANGA (KOLDA)