Abdourahmane Diouf n’exclut pas d’entrer dans le gouvernement
Tous les chemins mènent, d’ici jeudi prochain, à Touba. Le président Sall est attendu, cet après-midi, dans la cité religieuse. Il a été devancé dans cette ville par le chef du parti Awalé. Abdourahmane Diouf demande à Macky Sall de tirer les leçons des dernières Législatives et d’aller vers un gouvernement de concordance.
Le Magal de Touba sera célébré, le 15 septembre prochain. À jour J -5, les hommes politiques se bousculent au portillon de la cité religieuse. Alors qu’il est attendu cet après-midi à Touba, Macky Sall a été devancé dans cette ville religieuse par certains de ses adversaires. Parmi eux, le chef du parti Awalé. Hier, Abdourahmane Diouf lui a demandé de reconnaître qu’il a perdu le pouvoir. ‘’Il n’y a pas de gouvernement de majorité présidentielle élargie. À l’époque, dans les années 90, quand on parlait de gouvernement de majorité présidentielle élargie, il y avait clairement une majorité présidentielle, aussi bien au niveau de l’Exécutif qu’au niveau du Législatif. Aujourd’hui, il faut que le président de la République saisisse que les Sénégalais comprennent qu’en réalité, le président de la République a perdu le pouvoir. Il n'a plus la majorité qui lui permet d'exercer la totalité de son pouvoir. C’est pourquoi je parlais de générosité, d’humilité’’.
Abdourahmane Diouf, qui n’exclut pas de travailler dans l’intérêt exclusif du Sénégal aux côtés de Macky Sall, confie : ‘’Aujourd’hui, s’il lui arrivait d’inviter l’opposition dans un gouvernement, ce n’est pas un cadeau qu’il ferait à cette opposition. Cela résulterait simplement de sa bonne lecture de cette situation. Nous, nous avons toujours parlé de gouvernement de concordance qui n’est pas, je le précise, un gouvernement de transhumance. Mais il peut arriver que, dans la sagesse d’un peuple, on choisisse de ne pas donner tout le pouvoir à une personne, mais qu’on donne le pouvoir à plusieurs personnes et à plusieurs entités.’’
L’opposant d’ajouter : ‘’Maintenant, celui qui est la clé de voûte de toutes les institutions, le président de la République, c’est à lui d’ouvrir les opportunités, que tout le monde puisse travailler. Nous, nous sommes à l’écoute. On ne nous a consultés sur rien. Nous donnons notre point de vue que le président de la République n’a plus la totalité du pouvoir. Nous sommes à l’écoute pour voir. Mais s’il continue à vouloir gouverner de façon solitaire, avec son clan, avec sa famille, avec sa coalition, comme il l’a toujours fait, cela veut dire qu’il n’a pas compris les enjeux. Cela veut dire qu’il n’a pas une bonne lecture de la façon dont le Sénégal doit fonctionner pour les 16 prochains mois. Et cela veut dire que nous allons vers le chaos, s'il ne revient pas à de meilleurs sentiments, que nous ne souhaitons pas.’’
Sur les raisons de sa présence à Touba, il a déclaré : "Je suis venu à Touba pour faire du ziar, dans le cadre des préparatifs des festivités du Safar. Le Sénégal traverse des moments qui ne sont pas évidents, du point de vue de la cherté de la vie, du point de vue des inondations et du point de vue du climat politique. Il est extrêmement important qu'il y ait une communion des cœurs et ces exemples nous viennent des chefs religieux, en l'occurrence Touba qui joue un rôle de régulateur dans le dialogue social et politique".
‘’Aller vers une gouvernance concertée’’
Et Abdourahmane Diouf de renchérir en s’adressant à ses pairs politiques : ‘’Les tiraillements par rapport à la classe politique, il faut que la classe politique comprenne que les aspirations du Sénégalais qui a voté pour lui ne sont pas dans le tiraillement. Nous avons beaucoup parlé d’une démocratie de communion, de concordance des cœurs. Il ne faut pas que la classe politique continue d’être l’objet de déception des Sénégalais. Elle représente un espoir. Que l’on soit de l’opposition ou bien du parti au pouvoir, il faut savoir, des fois, ranger les armes, se mettre ensemble et travailler pour l’intérêt du pays. Nous espérons que cette 14e législature va apporter la prospérité, la paix au Sénégal. Et qu’aussi, celui qui est à la tête des institutions, le président de la République, comprenne les enjeux, qu’il arrive avec beaucoup d’humilité à lire les résultats des élections.’’
S’adressant au président Macky Sall, l’ex-directeur exécutif du Club des investisseurs l’invite à faire une lecture lucide des Législatives passées. Toutefois, il note que, pour la première fois depuis 1960 et sur 13 législatures, aucun président de la République du Sénégal n'a été mis en situation de ballottage pareil à l'Assemblée nationale. Donc, à son avis, ‘’quand il arrive dans un pays une réalité politique qui n’est jamais survenue, le président de la République doit avoir la modestie de lire les résultats et de faire ce qu’aucun autre président n’avait jamais fait. Le pouvoir ne lui appartient plus exclusivement. Il faut qu’il se consacre avec ceux qui ont fait l’objet de la confiance des Sénégalais, pour que nous vivions les 16 mois qui lui restent au pouvoir dans le calme, dans la sérénité, dans la paix et dans la tranquillité. Et pour que cela puisse se faire, il faudra, avec beaucoup d’humilité, que le président de la République reconnaisse qu'il n'a plus la totalité du pouvoir entre ses mains, mais que l'opposition a une partie du pouvoir et qu’on doit aller vers une gouvernance concertée’’.
BOUCAR ALIOU DIALLO (DIOURBEL)