Le vivre-ensemble, un viatique pour l’avenir
Hier, au musée des Civilisations noires, a été célébré le Mois de l'histoire des Noirs, sur initiative de l'ambassade du Canada au Sénégal. La question des Noirs, dans tous ses aspects, a été au cœur des débats, pour porter le plaidoyer sur le vivre-ensemble pour bâtir un avenir radieux.
Voilà des siècles que la question des Noirs retentit encore dans nos espaces de discussion. Des mémoires, expositions artistiques, commémorations ont déjà retracé l’histoire des peuples noirs. Ceci, dans le but d’éclairer les jeunes sur leur héritage et les aider à mieux s'ouvrir au monde.
Hier, à l'entame de la cérémonie commémorative, le court métrage ‘’Âme noire’’, réalisé par Martine Chartrand, a été visionné. Un film de neuf minutes qui raconte l'histoire des peuples noirs, de la grandeur des rois d'Afrique à la lutte pour les droits civils, en passant par les années sombres de l'esclavage jusqu’à l'éclosion du jazz.
Suite à cette projection, les débats entrecoupés des prestations musicales de Kya Loum ont été ouverts. L'artiste sénégalaise a joué trois de ces chansons : "Yobalé" qui parle des enfants de la rue ; "Goré" qui a deux sens : l'île de Gorée et l'autre qui veut dire l'honneur chez le Sénégalais ; et "Waw Coumba" qui exalte la femme.
Plusieurs personnalités ont pris part à cette rencontre. Parmi elles, Marie Bernadette Amy Dione, qui a représenté le ministre de la Culture et du Patrimoine historique. "Cette commémoration qui a plus d'un quart de siècle, précisément 28 ans, est une occasion de montrer l'apport fécond des Noirs, depuis l'arrivée de Mathieu Da Costa au début des années 1600 jusqu'à nos jours. En effet, votre pays possède d'éminentes personnalités noires dans tous les domaines politique, économique, social et culturel", a-t-elle déclaré, pour citer ensuite ces figures auxquelles elle fait référence. Parmi elles, il y a le docteur Clément Ligoure (1886-1922), premier Noir à qui on a refusé un poste dans les hôpitaux, mais qui, néanmoins, a ouvert un cabinet privé dans sa maison et a reçu beaucoup de victimes, lors de l'explosion d'Halifax. Il y a également Oscar Peterson, qui est un pianiste de jazz, avec plus de 200 albums, et a reçu de nombreuses distinctions, dont 8 Grammy Awards.
Sur ces figues, on peut énumérer Eleanor Collins. La ‘’première dame du jazz a été la première femme canadienne à avoir sa propre émission de télévision nationale. C'est la 27e gouverneure et secrétaire générale de I'OIF en 2014.
Marie Bernadette Amy Dione, s’adressant à ses hôtes canadiens, d’ajouter : "Cette rétrospective de l'histoire permet de jauger le rôle prépondérant des pionniers qui ont lutté contre l'esclavage ; ce qui a jeté les bases d'une société canadienne inclusive et diversifiée." Elle a ajouté que cette initiative est un exemple pour "la communauté internationale qui montre l'image d'une nation qui, après avoir causé des torts à une partie intégrante de sa composante, corrige ses erreurs du passé". Que c’est à travers cette date officielle qu'on va magnifier la grande contribution des Noirs qui a fait du Canada un pays culturellement diversifié.
Elle a terminé son propos en citant Jean Augustine : ‘’L'histoire des Noirs n'est pas réservée qu'aux Noirs. L'histoire des Noirs est l'histoire du Canada.’’
Le film "Âme noire" consacré à l'histoire des peuples noirs, au goût des panélistes
Présent à la rencontre, l'écrivain Amadou Lamine Sall s’est dit très surpris par le film de Martine Chartrand. "Je m'attendais à un film. Je n'ai pas vu un film. J'ai vu une manière esthétique assez originale de montrer, par des séquences diverses, l'histoire de la traite négrière. C'est un film très court. Très coloré et qui décline ce que nous savons tous. Parce que nous savons tous ce qui s'est passé. Donc, c'est un devoir de mémoire que nous avons vu à travers ce film. Quand on parle d'un devoir de mémoire, on parle toujours des Droits de l'homme", a déclaré M. Sall.
Prenant la parole, le professeur Mbaye Thiam a renchéri : ‘’Ce court métrage est une succession de tableaux symboliques qui parlent à tous ceux qui connaissent l'histoire de l'Afrique et du monde."
Poursuivant son argumentaire, il a confié que rien que la technique de diffusion rend le film captivant. "Une grand-mère et un petit-fils, par le biais du conte qui était l'exercice le plus marquant du modèle d'éducation et de formation, d'éveil des enfants et de formation ou de formatage social. Cette technique du conte, dès le départ, qui met en scène deux acteurs - la grand-mère et le petit-fils. Cet Africain du nord au sud et de l'est à l'ouest. Et puis après les autres symboliques. Les pyramides qui rappellent l'Afrique dans sa dimension, le tambour qui est apparu très rapidement, les caravelles de la traite négrière et les marchés d'esclaves... Tout ça sous forme de douleur accumulée, mais qui est transmise à travers une musique qui est aujourd'hui la musique du monde entier. Mais inventée par les Noirs. Le jazz et le blues", a-t-il décortiqué.
Sur la question de l'histoire du continent africain mal connue, le secrétaire général de la fondation de Gorée a déclaré : "Ce mois est devenu le mois de l'histoire des Noirs de toutes les couleurs. La vérité, comme le disait Senghor d'ailleurs : ‘Quand des peuples se rencontrent, ils se combattent souvent. Mais ils se métissent toujours.’ Nous sommes tous devenus noirs de toutes les couleurs. C'est cela qui est l'avenir de notre civilisation. Nous devons y prêter attention."
À en croire Amadou Lamine Sall, le vivre-ensemble est un aspect fondamental pour bâtir notre avenir. "Sinon, il n'y pas d'avenir. Il n'y a pas d'avenir sans le métissage. Il n’y a pas d'avenir sans le vivre -ensemble. Il n'y a pas d'avenir sans le respect. Il n'y a pas d'avenir sans l'amour. Il n'y a pas d'avenir sans la fraternité. Que ce Mois d'histoire des Noirs fêté par le Canada, c'est l'histoire du Noir de toutes les couleurs", a-t-il expliqué.
MOUHAMADOU RASSOUL KANE (STAGIAIRE)