Publié le 15 Mar 2014 - 15:22
LOI CONTRE LE TABAGISME

Des lieux publics sans tabac

 

Dans sa croisade contre le tabagisme, le Sénégal vient d’asséner un coup de cendrier à l’industrie du tabac, en interdisant son usage dans tous les lieux publics, sauf dans les fumoirs aménagés à cet effet. Même si certaines voix réclament une interdiction totale pour mettre fin à ce ‘’fléau’’ qui constitue une menace pour la santé publique.

 

Le projet de Loi n°09∕2013 relatif à la fabrication, au conditionnement, à l’étiquetage, à la vente et à l’usage du tabac a été adopté hier, à l’unanimité,  par l’Assemblée nationale. Cette loi composée de 33 articles atteste de la volonté du gouvernement de lutter contre le tabagisme passif, en interdisant de fumer dans tous les lieux publics ou à usage collectif, comme les établissements ou les transports, selon Awa Marie Coll Seck, ministre de la Santé et de l’Action sociale.

Toutefois, cette loi est soumise à quelques restrictions, puisqu’elle autorise dans son article 16, les tenants des espaces publics comme les  restaurants, hôtels, et autres lieux publics à  aménager des lieux réservés (fumoirs), avec un système de ventilation indépendant de celui de leur établissement.

Les contrevenants à cette présente disposition de la loi s’exposent à des amendes allant de 25 000 à 50 000 F, pour toute personne qui aura fumé dans les lieux publics ou ouverts au public,  d’après l’article 23. Les structures qui, après la promulgation de la loi et des décrets d’application, tarderont à adopter ces dispositions, pourront voir leur établissement déclaré espace 100% non fumeurs, donc interdit au tabac, a averti le ministre de la Santé. 

En outre, cette loi sanctionne aussi, par des amendes pouvant aller jusqu'à 200 millions, toute personne qui aurait favorisé le parrainage ou la publicité du tabac dans des supports médiatiques ou sur des affiches et panneaux (Article 7).

L’apposition des images chocs sur les paquets de cigarettes, sur 70% du paquet, a été aussi adoptée par loi,  afin d’alerter les fumeurs sur les risques encourus. ‘’La majorité de la population est analphabète, donc il paraît beaucoup plus pertinent de montrer les ravages de la cigarette pour dissuader les fumeurs‘’, affirme le député Cheikh Oumar Sy. 

Amendements

Cette loi a soulevé de nombreux amendements de la part des parlementaires, dont le plus important a concerné le maintien des espaces dits fumeurs dans les espaces publics. ‘’Les expériences dans les pays développés comme l’Australie qui ont interdit totalement la cigarette dans les endroits publics avec une baisse nette du nombre de fumeurs, méritaient d’être imitées par le Sénégal‘’, a soutenu Mbayame Dione Ba, rapporteur de la loi.

''Pour lutter contre le tabagisme passif, une interdiction totale de la cigarette dans l’espace public sera beaucoup plus efficace, afin de mieux préserver notre population des méfaits sanitaires comme les cancers, les maladies cardio-vasculaires et les accouchements prématurés chez les femmes'', a renchéri Hawa Dia Thiam, présidente de la Commission de la Santé, de la population, des affaires sociales et de la solidarité nationale.

En outre, les parlementaires se sont interrogés sur la pertinence de la cigarette électronique, à l'instar de Me Aïssatou Tall Sall. La  député socialiste a également déclaré que l’éloignement des points de vente de tabac d’au moins 200 mètres des établissements scolaires est essentiel, pour préserver notre jeunesse des méfaits de ce fléau. En effet, l’article 15 qui interdit la vente du tabac aux mineurs veut mettre fin à la progression de ce fléau  dans les couches les plus vulnérables.

Un pas dans la bonne direction

Du côté de la société civile,  la Ligue sénégalaise de lutte contre le tabac  (LISTAB) salue un pas dans la bonne direction, dans la lutte contre le tabagisme et contre le lobby pro-tabac, même s’il dénonce le maintien de la clause qui autorise les fumoirs dans les endroits publics. ‘’Nous ne sommes pas satisfaits entièrement par cette présente loi. On aurait aimé avoir des espaces 100 % non fumeurs dans les espaces dédiés au public’’, déclare Amadou Moustapha Gaye, vice-président de l’Ong.

‘’Un centre de sevrage... à l’hôpital Fann''

En réponse aux différentes sollicitations des députés sur l’applicabilité de la loi, Awa Marie Coll Seck a salué une avancée majeure dans ce qui constituait jusque-là une grande menace pour la santé publique. ''En effet, les nombreuses maladies liées à la consommation du tabac pèse fortement dans notre budget de santé de la république'', a-t-elle affirmé.

Et en ce qui concerne la prise en charge des personnes qui souffrent d’une addiction au tabac, le ministre a tenu  à rassurer les députés. ‘’Un centre de sevrage est en construction à l’hôpital Fann, pour aider les  personnes  à  se départir de leur addiction. L’esprit de la loi n’est pas seulement de punir ou de les culpabiliser, mais d’épauler des citoyens qui souffrent d’une dépendance nocive‘’, a-t-elle déclaré en guise de conclusion.

Mamadou Makhfouse Ngom

 
 
 

 

Section: