Sous et malentendus
Les oreilles de toute une nation suspendues à leurs lèvres fantômes. Mais, comme dans un rituel occulte, ils se contentent de publier une décision vouée à l’affichage. Il n’y a plus qu’à se ruer dessus pour lire et connaître leur jugement. La magie médiatique s’opère et la suite est connue. Faudra se reporter à un ancien numéro du journal Le Quotidien pour voir les visages de ces cinq ''sages'' du Conseil constitutionnel qui ont tant fait parler d’eux ou plutôt de la décision qu’ils ont rendue. Eux, semblent cultiver le secret dans leur citadelle du silence et ne seront ni aperçus, ni vus et encore moins entendus. Contrairement au candidat à sa propre succession qui cristallise toute cette tension ambiante et qui continue en alimentant le débat.
Il est l’auteur de la phrase vedette reprise en boucle lors de la revue de presse du jeudi. En déclarant : ''Une brise est un vent léger qui secoue les feuilles des arbres, mais elle ne devient jamais un ouragan'', Abdoulaye Wade, pour le nommer, exploite encore la puissance du verbe. Faisant ainsi allusion aux manifestations qui ont secoué le pays depuis l’annonce de la validité de sa candidature. Provocation ? Encore ! A ce jeu, qui n’en est pas un, nul doute qu’il est le maître.
Les sous-entendus alimentent ainsi les malentendus et toute tentative de dialogue semble s’éloigner chaque jour. Dans ce concert de voix discordantes, le citoyen ne sait plus à qui prêter oreille. Et la presse, accusée d’être partisane et menacée par certains, a des effets amplificateurs jusqu’à l’assourdissement. C’est la course au scoop et l’on s’essaye au ''breaking news'' des confrères anglo-saxons, mais le trash est aussi au rendez-vous. Images choquantes et difficilement soutenables diffusées sans la phrase d’avertissement de rigueur (attention ! ces images peuvent choquer).
Dans cette ambiance confuse, la communication s’en mêle. L’intervention du Colonel Alioune Ndiaye, responsable de la Communication de la Police nationale, dans la rubrique ''Paroles aux auditeurs'', diffusée après le Journal du midi de la RFM, a donné lieu à un échange musclé avec le journaliste Mamoudou Ibra Kane. Évoquant la blessure d'une vendeuse de café, le journaliste parle de ''balle'' alors que le Colonel Ndiaye avance une plaie due à de la ''ferraille''. Et à propos du tragique accident qui a coûté la vie au jeune Mamadou Diop, le journaliste cite une ''voiture de la police'' tandis que son interlocuteur rapporte que c'est le fait d'une ''voiture de marque Mercedes''. L’interview de tourner court.
Aux auditeurs de trouver la bonne version. En attendant une enquête et un procès - car la famille de la victime a annoncé une plainte - laissons les coupables dialoguer avec le tribunal de leur conscience.
Karo DIAGNE-NDAW