Publié le 14 Jan 2016 - 04:10
MACKY-IDY

Des rapports de gentlemen agreement au choc des ambitions politiques

 

Macky et Idy sont deux hommes politiques qui se vouent un respect mutuel. Si pour l’un les dés étaient déjà jetés pour son ascension à la magistrature suprême Idy4prsésident, l’autre s’est servi d’une telle posture assurantielle en puisant dans ses ressources essentielles pour devenir le quatrième Président de la République du Sénégal.

L’itinérance d’un parapluie wadien pour accéder à la magistrature suprême ne peut s’expliquer que par des liens de filiations intrinsèques qui existent entre le « Père » et le fils adoptif qu’il tuera par ailleurs sur l’autel des ambitions du fils biologique, aujourd’hui derrière les barreaux, par le fils d’emprunt. Tel un ouragan et ses corollaires dévastateurs des prairies bleues, l’ascension de Macky fut sans nul doute l’une des épisodes les plus fulgurantes de l’histoire politique du Sénégal. Et c’est cela qui fait que d’aucuns n’en reviennent pas à le voir s’installer de façon républicaine et démocratique au perchoir. Réveillez-vous non de Dieu ! Macky est le Président de la République. Et cette république s’appelle : le Sénégal 

La singularité des rapports de gentlemen agreement entre Macky et Idy trouve leurs sens dans l’histoire des configurations et des restructurations du Parti démocratique sénégalais. Quant à leur essence, il est à chercher dans l’histoire des pérégrinations de ces deux hommes d’Etat. En accueillant les membres de son gouvernement sur la base d’une réponse à une de ses invitations, Idy les reçoit en ces termes « mes ministres », ce que Macky conteste « je suis un ministre de la République » au même moment d’autres personnalités de la « Rue publique » se comportaient comme des courtisans. Par ailleurs, Idy ne les a pas raté dans une de ses nombreuses sorties dans le contexte de la « lutte au sommet ».

 D’une famille modeste, Idy fera pourtant honneur aux siens avec une mémorisation parfaite du saint coran et de très bons résultats scolaires dans les cycles primaires, moyens et secondaires. Eduquer politiquement dans l’ombre du père où il a bien affuté ses armes, Idy a eu beaucoup de mal à couper le cordon ombilical d’avec sa famille politique allant jusqu’à se déclarer actionnaire majoritaire du Pds. En étant le plus jeune directeur de campagne des jouxtes présidentielles de 88, Idy tel un cheval de Troie, est utilisé par le père à chaque fois que de besoin. C’est ainsi qu’il alla au charbon contre le tout puissant Djibo Leyti Ka qu’il accusa de tortuosité. Aussi déposera-t-il Moustapha Niass de la « station primatoriale » avant de l’occuper.

Il faut le reconnaitre Idy a bien géré l’Etat et le Pds de 2000 à 2004. Cependant la déseckisation effective au sein de l’appareil étatique en privant à des dizaines de centaines de sénégalais leurs emplois, confine dans ses travers un état de trahison machiavélique du père vis-à-vis de son fils adoptif. Du coup d’Etat rampant au coup d’Etat debout, en passant par le « Toucher couler », Idy soutenu en cela par le peuple sénégalais, puisa dans  ses « entrailles » une résistance que la Haute cour de justice finira par reconnaitre par un non-lieu total dans tous les chefs d’accusations à son encontre. En bon talibé, pouvait-il refuser l’appel de Serigne Saliou Mbacké et de Serigne Abdoul Aziz Sy Al Amin pour accepter la main tendue de Wade ? Idy était sincère, Wade non !

Dans l’œuvre de liquidation du fils adoptif, Wade ne chercha pas loin. Il puisa directement dans la famille en choisissant un « homme courageux » mais sans « grands ambitions politiques » qu’il écartera le moment venu, tout simplement, parce qu’il était le plus enclin, à résister à la toute-puissance d’un numéro 2 qui symbolisait une sorte de dualité au sommet de l’Etat que personne n’osait affronter, en tous cas dans les rangs Pds à tel enseigne que Wade formera un « commando de mercenaires politiques » extérieur au parti à l’image d’un Maitre El hadji Diouf, d’Abdourahime Agne, de Serigne Mbacké Ndiaye, du Colonel Malick Cissé.

 Malgré tout, en renard politique, Wade avait entre ses mains les rapports des services de renseignement sur la fermeture des carrières de Thiès par le premier ministre Idy sans en informer le ministre des Mines Macky. Il sauta sur l’occasion en faisant de Macky, son porte flambeau dans la guéguerre. Mis au-devant de la scène, c’est lui qui accusera sur les chantiers de Thiès en face des accréditations diplomatiques, c’est lui qui portera la parole institutionnelle en refusant de donner de récépissé à un parti du nom de Rewmi.

Mais chacun à son tour chez le coiffeur. Baignant dans le Léninisme puis dans le maoïsme, Macky savait déjà poser des ruptures et maitrisait parfaitement ce que Marx appelle la contradiction fondamentale. Du processus de démackysation enclenché par le régime libéral, parce que tout simplement le fils biologique devait rendre compte, Macky tracera une bonne fois sa voie en refusant les appels du pied de fossoyeurs et d’aboyeurs bien nichés au Palais. Mais l’expérience d’Idy lui servait largement dans son combat politique. Peut-être qu’un jour dans ses mémoires, il le dira. N’empêche que les vociférations de l’ancien Président du groupe parlementaire libéral, distributeur de baffes à l’assemblée nationale, n’ont fait qu’exacerber un sentiment d’injustice flagrant qui se résume dans un wolof simple « lax sa dom, toroxal domu jambuur ».

Macky ne sera pas en reste, également issue d’une famille modeste comme la majorité des sénégalais qui l’ont élu en 2012, il reste un produit national, une fierté nationale qui n’a pas été bombardé dans une fonction parce que revenant de Harward ou de la Sorbonne. Des toilettes du Pavillon A, il en a bavé, de la nourriture pourrie du restaurant central, il en a été servi, de l’odeur âcre des gaz lacrymogène dans le « couloir de la mort », il en a humé. À contrario dans la conjugalité, tous ses prédécesseurs ont versé dans un mimétisme occidental qui ne dit pas son nom. Senghor et sa Colette, Abdou et sa Elisabeth, Wade et sa Viviane. Les considérations dermiques ne nous intéressent guère mais la culture, le comportement et le degré d’insertion dans les réalités locales nous recommandent de rester prudents dans notre analyse. Phénomène en mode dans la haute administration ou basses considérations sur la femme africaine dans sa destinée de première dame de la nation ?

En réalité, la gouvernance du Sopi n’avait pas surestimé les capacités de nuisance d’Idy mais sous-estimé la volonté de Macky à se remettre d’une humiliation que tout sénégalais épris de paix et de justice portait en bandoulière. En  démissionnant de son poste à l’assemblée nationale, du comité directeur du Pds, de sa fonction de maire de Fatick, bref de toutes les fonctions électives libérales, Macky incarnait du coup le type d’opposant que le peuple voulait en « Idy » vis-à-vis d’un régime de brigands et de contrebandiers.

Refusant catégoriquement de regarder dans le rétroviseur, Macky se fraya un chemin dans la course à la Présidentielle dans un contexte électoral où Idy recevait les coups et les contrecoups de libéraux devenus à la force de l’exercice du pouvoir des inquisiteurs, à l’image d’un Farba pyromane et d’un Karim mal sevré. Wade tel un Zeus dans « son » Palais laminait un certain Lamine qu’il voulait chasser de son « Palais ». Lamine eut pourtant l’outrecuidance de le lui rappeler qu’en réalité, c’était le palais de la République, en fait le Palais du peuple. Diack, dans sa tentative de sabordage, fera de la roulette russe son jeu favori qu’un certain baron du Pds assimile honteusement, malgré les leçons de l’histoire, à la volonté de tout un peuple de « mettre hors état de nuire » le régime de Wade et de ses sbires.                                                                                    

                                                                          Sawrou FALL, Doctorant en Histoire UCAD

                                                                          F1 B1 HG FASTEF/fsawrou@yahoo.fr         

 

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