Publié le 14 Nov 2012 - 22:00
MACKY SALL, ABDOULAYE WADE ET LE PDS

 Un si long compagnonnage...

 

 

Entre Macky Sall et son ancienne formation politique le Parti démocratique sénégalais (PDS), c’est désormais une bataille à mort. L’annonce de l’audition des dignitaires de l’ancien régime dont Karim Wade, fils de l'ancien Président de la République Abdoulaye Wade, par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI), a poussé ces derniers dans leurs derniers retranchements.

 

 

Assommés par la sortie d'Alioune Ndao, ils ont vite fait de menacer le président de la République Macky Sall de «déballage». «Jusqu’à présent, nous avons été calmes, mais s’il (Macky Sall) n’arrête pas, nous allons publier ce que nous savons», a menacé Oumar Sarr, coordonnateur du PDS, au cours d’une conférence de presse tenue le dimanche dernier. Que détiennent les libéraux de si compromettant contre leur ancien frère de parti ? «Soyez patients, vous verrez le moment venu», promet Meïssa Sall, ex-sénateur et membre du Comité directeur.

 

Compagnon de la première heure de Me Abdoulaye Wade, Meïssa Sall dit bien connaître le président Macky Sall pour l’avoir accueilli au PDS en 1988 alors qu’il venait de quitter And Jëf, un parti d’obédience marxiste léniniste. «Comme il (Macky) ne partageait pas les même idées que les marxistes, il a adhéré au PDS, confie l’ancien sénateur. Il était trop aimé par le secrétaire général national à cause de son intelligence et de sa politesse». Des qualités qui ont amené à l’époque le «pape» du Sopi, plus tard, à lui confier la Cellule initiatives et stratégies (CIS).

 

L’idylle entre Me Wade et Macky fut donc sans limite. Même absent du territoire, le secrétaire général du PDS ne se faisait pas de souci sur son parti. «Depuis Paris, Me Wade me demandait d’aller chez Macky à Derklé pour qu’il signe les communiqués destinés aux fédérations. Les militants avaient fini par croire que c’est Macky qui les écrivait», raconte Meïssa Sall. Sous l’aile protectrice de Pape Samba Mboup, ex-chef de cabinet du président Wade, et Coumba Souna Dieng, ancienne sénatrice, Macky Sall pouvait traverser sans grand dommage le désert en dépit des querelles internes qui ont miné le PDS et qui provoquèrent des dissidences-départs de Serigne Diop (PDS - Rénovation), Me Ousmane Ngom (Parti libéral sénégalais, PLS).

 

En 2000, à la faveur de l’alternance démocratique, Macky Sall, ingénieur géologue de formation, est nommé directeur général de Petrosen. Mais il ne durera pas longtemps à ce poste, puisqu’en 2011, il est promu ministre de l’Énergie, des Mines et de l’Hydraulique, en remplacement du Pr. Abdoulaye Abdoulaye Bathily dont le parti, la Ligue démocratique, ne s'entendait plus avec Me Wade. L’ascension de Macky Sall se fera de manière fulgurante. En août 2003, il passe ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales dans un gouvernement dont le chef était Idrissa Seck.

 

Dans ce département également, l'actuel président ne fit qu’un bref passage. Car, à la faveur de la «crise au sommet de l'Etat» qui opposa alors le chef de l'Etat à son numéro 2, le bien nommé Idrissa Seck, Macky Sall devint Premier ministre en avril 2004. Un contexte qui rend la tâche difficile à Macky. Contraint de mener par procuration le duel à mort Wade-Idy, Macky Sall pilota le dossier de mise en accusation de son prédécesseur poursuivi, entre autres, pour atteinte à la sûreté de l’Etat, enrichissement illicite. Traduit devant la Haute cour de justice, le maire de Thiès, qui passa 7 mois en prison, bénéficiera d’un «non-lieu partiel», puis «total».

 

Cet épisode passé, Macky Sall a travaillé à la réélection du président Wade, candidat à sa propre succession en 2007. Le renouvellement des instances du PDS, à quelques encablures de la présidentielle, suscita des remous. Certains responsables, qui tenaient à leur postes comme à la prunelle de leurs yeux, accusèrent l’ancien directeur de campagne du candidat Wade de mener le parti à sa perte. Me Wade, qui était l’initiateur de ces renouvellements, se défaussa sur son numéro 2 et interrompit le processus. L’ancien député, Wack Ly s’en souvient : «Je m’étais farouchement opposé à ces renouvellements. Parmi les 100 personnes qui étaient choisies, j’étais le seul à être au PDS avant 2000. Finalement, Macky avait choisi Baïdy Souleymane Ndiaye.» Réélu au premier tour, Me Wade envoya son Premier ministre à l’Assemblée nationale. Un début de galère pour l'ex-futur président de la République.

 

Au niveau de cette station, le nouveau président de l’Assemblée nationale entra en conflit avec son mentor. Motif : avoir convoqué Karim Wade pour audition à propos de sa gestion de l’Agence nationale de l’organisation de la conférence islamique (ANOCI). Déchu du perchoir après plusieurs semaines de «résistance», Macky Sall se replia dans sa mairie de Fatick et organisa, avec une poignée de fidèles, sa «marche irrésistible» vers le pouvoir avec son nouveau parti, l’Alliance pour la République (APR), venu élargir le spectre de l'opposition au régime d'Abdoulaye Wade. Une longue et périlleuse aventure certes, mais payante. Le 25 mars 2012, il est élu président de la République.

 

 

DAOUDA GBAYA

 

 

 

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